Il s'agit d'un arrêt de la 3e chambre civile de la Cour de cassation rendu le 21 novembre 1969. C'est un arrêt de rejet du pourvoi en cassation formé contre l'arrêt de la Cour d'Appel de Rouen rendu le 12 décembre 1967.
Un syndic décide d'édifier un mur sur son terrain. Le mur édifié empiète sur la parcelle voisine. Le propriétaire de la parcelle de terrain voisine (victime de l'empiètement) engage une action en justice contre le syndic et exige la destruction de la partie du mur qui empiète sur son terrain.
En première instance le demandeur est le propriétaire victime de l'empiètement et le défendeur est le syndic. L'affaire est déférée à la Cour d'Appel de Rouen puis portée devant la Cour de cassation. Le demandeur au pourvoi en cassation est le syndic et le défendeur est le propriétaire victime de l'empiètement.
La Cour de cassation rejette le pourvoi en cassation formé contre l'arrêt de la Cour d'Appel. La Cour de cassation estime que la Cour d'Appel a légalement justifié sa décision en retenant en l'espèce qu'il s'agissait d'un empiètement réalisé sans droit sur le terrain d'autrui et non d'une construction édifiée sur le terrain d'autrui (au sens de l'article 555) et par ce motif que la Cour d'Appel a bien agit en ne recherchant pas si le constructeur était ou non de bonne foi et en appliquant les dispositions de l'article 545.
La question de droit qui se pose est la suivante : Le propriétaire d'un fonds, victime d'un empiètement peut-il exiger la démolition de la partie de la construction empiétant sur son fonds alors même que l'empiètement ait été de bonne foi ?
[...] Cet article considère la bonne ou la mauvaise foi du constructeur empiétant sur le fonds d'autrui. Si l'empiètement est réalisé de mauvaise foi alors les alinéas 1er, 2ème, et 3ème de cet article s'appliquent. Le propriétaire du fonds, victime de l'empiètement peut soit conserver la propriété du fonds et des constructions s'y trouvant (alors indemnisation du constructeur selon l'alinéa soit obliger le tiers à les enlever (la démolition aux frais du constructeur selon l'alinéa 2). Par contre si l'empiètement est réalisé de bonne foi par le constructeur, le propriétaire ne peut demander la démolition, mais seulement indemniser le constructeur selon l'alinéa 4. [...]
[...] Cette constance de la jurisprudence de la Cour de Cassation en matière d'empiètement ouvre la porte à un danger grave qui est celui de l'abus de droit. En effet, le propriétaire victime de l'empiètement pourrait faire un usage malicieux, égoïste et antisocial de son droit. L'abus de droit est le fait que le propriétaire use de son droit dans le but de nuire à autrui uniquement (arrêt Clément Baillard). La Cour de Cassation à toujours refuser de reconnaître l'abus de droit en matière d'empiètement (arrêt de la 3ème chambre civile du 7 juin 1990). [...]
[...] La question de droit qui se pose est la suivante : Le propriétaire d'un fonds, victime d'un empiètement peut il exiger la démolition de la partie de la construction empiétant sur son fonds alors même que l'empiètement ait été de bonne foi ? Analysons dans un premier temps le raisonnement de la Cour de Cassation puis la pertinence de sa solution (II). I. L'absoluité du pouvoir de droit sur la chose en matière d'empiètement Analysons les articles potentiellement applicables à l'espèce et le raisonnement de la Cour de Cassation. A. [...]
[...] Une solution imprégnée d'iniquité En l'espèce, la solution de la Cour de Cassation semble être, à plusieurs égards injuste, inéquitable dans la mesure où le syndic était de bonne foi. Dans notre cas, la Cour d'Appel n'a pas recherché si le syndic avait réalisé un empiètement en toute bonne foi, en ignorance de cause. La solution est profondément sévère et accable le constructeur. L'empiètement sur le fonds d'autrui est puni d'une sanction extrêmement sévère qui est la démolition. Cette solution apparaît encore plus sévère si l'empiètement du syndic avait été réalisé de bonne foi. [...]
[...] Ainsi, on peut affirmer qu'en matière d'empiètement, le droit de propriété est absolu car en cas d'empiètement, la sanction de la démolition est systématique, quand bien même l'empiètement avait été réalisé de bonne foi par le constructeur, malgré le fait que la partie du fonds empiété est minime, quand bien même le propriétaire du fonds n'ait opposé aucune contestation lors de la construction de l'édifice. Le droit de propriété est définitivement absolu en matière d'empiètement au vue de la constance de la jurisprudence de la Cour de Cassation qui, dans pareils cas, a constamment opté pour la démolition de la partie de l'édifice qui empiétait quelles que soient les circonstances. Plusieurs auteurs sont indignés devant cette inflexibilité de la Cour de Cassation. II. Une solution offrant matière à discussion Analysons la valeur et la portée de la solution de la Cour de Cassation. [...]
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