S'il existe certains grands contrats types, comme la vente ou le bail, il n'est pas rare en pratique que l'exercice de la liberté contractuelle conduise à la formation de contrats complexes combinant différents types de contrat. La question de la qualification d'un tel contrat, passage obligé pour le juge afin de trouver une solution au litige, se pose alors. Le goût du juriste pour la classification poussera-t-il le magistrat à forcer le contrat pour le faire entrer dans une catégorie prédéfinie, au risque de méconnaître la volonté des parties ? Le choix d'une qualification distributive est-il pertinent ? Le juge se trouve-t-il face à un contrat sui generis qui le conduira à suivre un raisonnement par analogie ? Ce problème de qualification sera central dans l'arrêt de la 1ère Chambre civile en date du 3 juillet 2001 qui va être ici étudié.
En l'espèce, un contrat complexe lie le propriétaire d'un cheval de course et un entraîneur. Ce dernier est chargé d'héberger, de soigner et d'entraîner l'animal en contrepartie d'une rémunération. Or ce cheval est retrouvé comateux dans son box alors que l'entraîneur l'avait quitté en parfaite santé la veille. Il sera euthanasié. Le propriétaire agit en justice contre l'entraîneur en réparation du dommage subi. La CA de Rouen, dans un arrêt du 13 janvier 1999 déboute le propriétaire de sa demande. L'arrêt rendu retient que le contrat doit recevoir une qualification unitaire, celle de contrat d'entreprise et que de ce fait l'obligation de soin et d'hébergement n'est qu'une obligation de moyen accessoire. La charge de la preuve repose donc sur le propriétaire qui, en l'espèce, n'a pas prouvé de faute de la part de l'entraîneur.
Le contrat complexe doit-il revêtir une qualification distributive conduisant ainsi à l'application du régime spécial du contrat de dépôt salarié ?
La 1ère Chambre civile, dans cet arrêt du 3 juillet 2001, retient que le contrat doit recevoir une qualification distributive. Le régime spécial du dépôt va alors s'appliquer, renversant la charge de la preuve. L'arrêt de la Cour d'appel sera donc cassé.
Le raisonnement de la Cour de cassation se fait en deux étapes. Il conviendra d'abord de déterminer la qualification contractuelle à adopter (I) avant d'en déduire le régime applicable, régime qui conduira à une solution favorable au propriétaire qui soulève toutefois quelques questionnements sur la jurisprudence en matière de qualification (II).
[...] En l'espèce, la Cour de cassation opte pour une qualification distributive de ce dernier type. Ainsi, selon la 1ère Chambre civile, le contrat litigieux s'analyse pour partie en un contrat d'entreprise et pour partie en un contrat de dépôt salarié Le contrat de dépôt se définit comme un acte par lequel on reçoit la chose d'autrui, à la charge de la garder et de la restituer en nature (art du Code civil), la particularité du dépôt salarié résidant dans son caractère onéreux. [...]
[...] Le juge a recours très fréquemment aux qualifications mixtes. La 1ère Chambre civile est d'ailleurs allée jusqu'à déclarer dans un arrêt du 16 juillet 1997 que la qualification mixte d'un contrat complexe est le principe Seul peut l'écarter une manifestation de volonté expresse ou tacite contraire des contractant (en faveur de) l'adoption d'une qualification unitaire La qualification distributive peut prendre deux formes. Dans un premier cas de figure, à des moments différents de la vie contractuelle des règles différentes vont s'appliquer. [...]
[...] Il est possible de faire ici un parallèle avec les contrats de garage et de déménagement qui pose également souvent la question du choix de qualification. Dans une décision en date du 1er avril 2003 la Chambre commerciale avait affirmé que le contrat de déménagement était un contrat d'entreprise, lequel se différencie du contrat de transport en ce que son objet n'est pas limité au déplacement d'un mobilier Mais une solution inverse fut retenue par cette chambre le 10 mars 2004, le déménageur, en l'espèce, n'ayant pas eu à emballer les objets à transporter. [...]
[...] En outre l'article 1927 du Code civil fixe l'étendue de l'obligation du dépositaire. Il dispose que le dépositaire doit apporter, dans la garde de la chose déposée, les mêmes soins qu'il apporte dans la garde des choses qui lui appartint L'article 1928 apporte une précision en ajoutant que la disposition de l'article précédent doit être appliquée avec plus de rigueur [ ] s'il a stipulé un salaire pour la garde du dépôt C'est le cas en l'espèce, la Cour de cassation mentionnant un contrat de dépôt salarié Pourtant, c'est le contrat complexe qui est onéreux. [...]
[...] Le propriétaire agit en justice contre l'entraîneur en réparation du dommage subi. La CA de Rouen, dans un arrêt du 13 janvier 1999 déboute le propriétaire de sa demande. L'arrêt rendu retient que le contrat doit recevoir une qualification unitaire, celle de contrat d'entreprise et que de ce fait l'obligation de soin et d'hébergement n'est qu'une obligation de moyen accessoire. La charge de la preuve repose donc sur le propriétaire qui, en l'espèce, n'a pas prouvé de faute de la part de l'entraîneur. [...]
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