Commentaire de l'arrêt du 10 juin 2004 de la Cour de cassation concernant l'élargissement de la responsabilité délictuelle

Extraits

[...] En effet, l'arrêt nous apprend que les construction litigieuses étaient totalement irrégulières ce qui caractérise une faute, cependant la cour de cassation casse l'arrêt rendu par la cour d'appel de Pau dans la mesure où elle n'avait pas constaté l'existence d'un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage et que le demandeur ne démontrait avoir subi aucun préjudice du fait de la construction irrégulière L'arrêt du 18 décembre 2003 marque une continuité par rapport à la jurisprudence antérieure et ne fait qu'une application directe des bases et des principes fondamentaux de la responsabilité délictuelle. Cependant, en matière de trouble anormal du voisinage, il ne suffit pas toujours, pour un individu, de causer un trouble manifestement excessif pour voir sa responsabilité engagée, en effet les sociétés commerciales sont soumises à un régime particulier qui permet une exonération de la responsabilité délictuelle. B/Les conditions d'exonération de la responsabilité des sociétés commerciales Dans l'arrêt du 10 juin 2004 il est question d'un litige entre une propriétaire d'une villa située en bordure d'un terrain de golf. [...]

[...] Le mouvement est encore renforcé par un arrêt du 8 juin 2004 qui pousse la théorie à son extrême dans la mesure où les juges retienne un simple risque de dommage futur alors même que le risque n'est que suspectable et incertain. En effet dans notre arrêt du 10 juin 2004, si le risque de dommage est admis c'est en raison de son caractère certain et inéluctable tandis que dans l'arrêt du 8 juin, le risque n'est même pas établi scientifiquement (il s'agissait de savoir si les ondes d'une antenne téléphonie présentaient un danger pour la population vivant à proximité) il n'est que possible et pourtant grâce à la théorie des troubles du voisinage la cour retient la responsabilité de son auteur. [...]

[...] Le règlement du golf informait d'ailleurs les propriétaires voisins qu'il devraient subir les contraintes comme profiter des avantages résultant de la proximité du parcours. Cependant la propriétaire de la villa se plaint de dégâts occasionnés sur sa propriété par la projection incessante de balles de golf et assigne la société exploitante du golf en réparation du préjudice subi. Les juges du fond reçoivent sa demande dans un arrêt du 5 novembre 2002 et condamnent la société exploitante du golf à réparer l'entier préjudice subi par la propriétaire du fait des troubles anormaux du voisinage. [...]

[...] En effet, désormais, et comme en témoigne l'arrêt, il n'est plus nécessaire qu'un dommage soit effectivement créé pour que la responsabilité de son auteur soit engagée. Cet élargissement pourrait s'entendre d'une obligation générale de ne pas nuire à autrui. L'arrêt remet en cause la théorie des troubles du voisinage dans le sens où le seul trouble , puisqu'il n'est pas excessif , n'est pas forcément générateur d'une action en responsabilité, tandis que l'application de la théorie du risque en cette matière suppose que le simple risque le soit, ce qui semble paradoxal. [...]

[...] L'exploitant du golf forme un pourvoi en cassation invoquant la violation par la Cour d'appel des dispositions de l'article L 112-16. En effet, les sociétés commerciales sont en principe soumises à une réglementation spécifique. Si l'activité s'exerce en conformité avec ces dispositions législatives et réglementaires en vigueur alors la société commerciale sera soumise à l'application de l'article 112-16 qui prévoit une exonération de responsabilité dans le cadre des troubles anormaux du voisinage si le permis de construire afférent au bâtiment exposé à ces nuisances a été demandé postérieurement à l'existence des activités les occasionnant. [...]