Dans le domaine contractuel, si le débiteur n'a pas exécuté son obligation mais qu'il démontre que ce fait est dû à la force majeure ou au cas fortuit alors il n'y aura lieu à aucun dommages et intérêts (article 1148 du Code civil). Dans le cadre plus particulier de l'hôtellerie, ainsi « les hôteliers ne sont pas responsables des vols ou dommages qui arrivent par force majeure », encore faut-il démontrer l'existence de la force majeure (article 1954 du Code civil). C'est ce qu'illustre un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 9 mars 1994.
En l'espèce, des malfaiteurs s'étaient introduits dans un hôtel et sous la menace de leurs armes, s'étaient fait ouvrir le coffre qu'ils ont dévalisé. Un client de l'hôtel assigne la société en charge de l'hôtel et son assureur en remboursement des sommes qu'il soutenait avoir versées dans le coffre.
La cour d'appel d'Aix-en-Provence le 9 avril 1991 infirme le jugement de première instance et accueille la demande du client au motif que « ce vol à main armée ne constituait par le cas de force majeure visé par l'article 1954 al 1 du Code civil ».
[...] Cependant, le fait d'avoir caractérisé l'irrésistibilité de l'évènement suffisait-il à caractériser la force majeure ? En l'espèce oui. B. La force majeure pouvant être caractérisée par l'irrésistibilité seule La force majeure ou le cas fortuit qualifie des situations ou on ne peut agir convenablement en bon père de famille puisqu'un évènement qu'on ne pouvait déceler est arrivé. Dans l'arrêt la première chambre civile affirme que (à certaines conditions qui feront l'objet du paragraphe II) l'irrésistibilité peut, seule, constituer la force majeure. [...]
[...] Cet arrêt ouvre la voie à une application plus restrictive de la force majeure. B. L'utilisation restrictive de la force majeure La condition d'imprévisibilité posée par première chambre civile apparaissait nécessaire. En effet, surtout dans le cas étudié d'un client qui fait confiance à un hôtel pour garder ses fonds, reconnaitre le caractère de force majeure facilement permettait finalement à la société hôtelière d'être totalement exonérer. De plus, il apparaissait clairement que les mesures de sécurité s'imposant dans un tel lieu n'avaient pas été scrupuleusement appliquées. [...]
[...] L'imprévisibilité comme condition sous-entendue à la caractérisation de la force majeure L'imprévisibilité d'un évènement est le fait qu'il n'a pu être envisagé et donc contourné. Dans cet attendu, la Cour de cassation énonce que l'irrésistibilité est seule constitutive de la force majeure uniquement si la prévision ne permettait pas d'en empêcher les effets. Par conséquent, si en l'espèce la prévision de l'évènement avait permis d'agir en conséquence, la force majeure n'aurait pas été retenue. Il apparait que c'est le cas ici. [...]
[...] En considérant dans un premier temps que l'irrésistibilité, le caractère insurmontable du vol à main armée, seule pouvait constituer la force majeure, la Cour de cassation n'a fait que s'inscrire dans le curant jurisprudentiel sur la question, des années 90, et finalement jusqu'en 2006. En effet, et ce pour la première chambre civile de la Cour de cassation le caractère irrésistible d'un évènement pouvait seul qualifier la force majeure il primait sur l'imprévisibilité et l'extériorité de l'évènement. Ainsi pour cette jurisprudence, un évènement prévisible ou non, dès lors qu'il était insurmontable permettait d'exonérer totalement le débiteur. Cependant, soulignons qu'ici, la Cour de cassation dans un second temps pose une condition supplémentaire au fait que l'irrésistibilité peut seule caractériser la force majeure. [...]
[...] Deux critères sont à remplir pour s'exonérer totalement. D'ailleurs, cet attendu a été complètement repris par un arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 1er octobre 1997, démontrant ainsi son importance et son utilité. Cette évolution restrictive de la force majeure sera close par un arrêt de l'Assemblée Plénière le 14 avril 2006. [...]
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