L'arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation, rendu le 7 juin 2005, traite d'un principe directeur de l'instance nouveau, la loyauté.
Les 23 et 24 novembre 2004 se sont déroulées des élections, par voie électronique, afin de désigner le nouveau bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris. Un des avocats de ce barreau a agi en justice, réclamant la nullité de l'élection. Il reproche en effet l'absence de confidentialité de celle-ci. Le 27 janvier 2005, la Cour d'appel de Paris a rendu un arrêt dans lequel elle a décidé de ne pas prendre en considération une note en délibéré, émise par le demandeur initial, révélant un avis du Président de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) défavorable à l'élection litigieuse. Le refus est motivé par l'application des articles 16, et surtout 445, du Code de procédure civile, lequel permet l'acceptation de notes ou pièces par les juges, après clôture des débats, dans deux hypothèses ne correspondant pas au cas de l'espèce. Or, l'avis émis par la CNIL avait été connu par le défendeur bien avant l'action en nullité et celui-ci l'avait en sa possession durant le déroulement des débats, tandis que le demandeur initial n'en avait pris connaissance qu'au jour de la clôture des débats.
Quel nouveau principe processuel la Cour de cassation consacre-t-elle afin de sanctionner une partie qui ne communique pas une pièce utile aux débats ?
Le 7 juin 2005, la Cour de cassation rend un arrêt de cassation dans lequel elle affirme que la Cour d'appel aurait dû recevoir la note en délibéré, celle-ci étant de nature à influencer sa décision. Elle prend en considération le comportement du défendeur qui n'a pas communiqué ladite note parce que contraire à ses intérêts. Surtout, la Cour de cassation, visant l'article 10 du Code civil et l'article 3 du Code de procédure civile, consacre un nouveau principe directeur de l'instance, la loyauté des débats.
Cette consécration explicite et nouvelle (I) emporte des conséquences sur le rôle du juge et la structure de base de la procédure civile (II).
[...] La frontière entre ce nouveau principe et ceux déjà légalement consacrés, c'est-à-dire le principe du contradictoire, le principe accusatoire et le principe du dispositif, est difficile à tracer, surtout vis-à-vis du premier. En effet si l'exigence de contradiction visa à garantir la possibilité de contester toute allégation de l'adversaire, l'obligation de loyauté a pour objet de permettre au juge de disposer de tous les éléments nécessaires afin de statuer équitablement et objectivement. Ainsi définie, la loyauté n'est que le prolongement du principe de la contradiction. [...]
[...] En effet, comme le rappelait Gérard Cornu, chaque principe directeur : ne vaut ni plus ni moins que les autres dispositions du Code Le principe de loyauté diffère, sous cet angle, des autres principes directeurs de l'instance. Cela pose problème vis-à-vis de la logique sur laquelle est fondé le droit procédural, c'est-à-dire l'équilibre nécessaire entre la protection des intérêts privés et l'exigence de la manifestation de la vérité qui relève de l'intérêt général. Cet équilibre repose nécessairement sur un ensemble de règles de mêmes valeurs cohérentes. Certains auteurs ont, par ailleurs, prétendu que la Cour de cassation avait consacré la loyauté comme nouveau principe afin d'écarter, pour le cas de l'espèce, l'application de l'article 455. [...]
[...] Le double visa des articles relatif au juge, et 10, relatif aux parties, le prouve. En l'espèce, la Cour de cassation, en censurant les juges du fond, vise à sanctionner la partie qui n'a pas spontanément communiqué un élément utile au débat et qui ainsi a eu un comportement déloyal. La consécration d'un nouveau principe directeur de loyauté engendre évidemment des conséquences. II) Les conséquences du principe de loyauté de débats Bien que saluée par une majorité d'auteurs, la consécration de ce nouveau principe directeur a des effets dangereux sur la procédure civile. [...]
[...] Toujours est-il que le principe directeur de loyauté a été réaffirmé dans des arrêts de la Cour de cassation en date du 7 juillet septembre juin 2007 ou encore 27 juin 2007. La chambre commerciale le rappelant, par un arrêt du 3 juin 2008, concernant l'enregistrement et la conservation d'une conversation téléphonique sans que la partie adverse soit avertie, en visant l'article alinéa 1 de la Convention européenne des droits de l'homme. Cet arrêt consacre ainsi le fondement supra- législatif du principe de loyauté des débats. [...]
[...] Commentaire d'arrêt, première chambre civile de la Cour de cassation juin 2005 L'arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation, rendu le 7 juin 2005, traite d'un principe directeur de l'instance nouveau, la loyauté. Les 23 et 24 novembre 2004 se sont déroulées des élections, par voie électronique, afin de désigner le nouveau bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris. Un des avocats de ce barreau a agi en justice, réclamant la nullité de l'élection. [...]
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