La question principale que soulève l'espèce est de savoir si le bénéficiaire d'un pacte de préférence violé peut obtenir du juge la conclusion forcée de la vente à son profit par substitution au tiers acquéreur de mauvaise foi. La Cour de Cassation y répond de façon négative sans qu'aucune contestation quant à l'interprétation de sa motivation ne soit possible. Il convient donc d'étudier les différentes sanctions à la violation d'un pacte de préférence offert par l'arrêt (I) avant d'en étudier la portée sur les principes de base du droit des contrats (II)
[...] Par acte du 13 novembre 1990 la Société Imprimerie H. Plantin a donné à bail des locaux à l'association Médecins de Monde comportant une clause selon laquelle en cas de vente de l'immeuble loué, un droit de préemption est accordé par le bailleur au preneur. La Société Imprimerie H. Plantin a vendu ces locaux à l'OFEI (Office Européen d'Investissement) le 13 février 1991 pour un montant de 000F. L'OFEI a fait une offre de vente à l'association de 000F le 20 février 1991. [...]
[...] D'ailleurs, l'association obtiendra sûrement cette nullité lors de l'audience de renvoi devant la Cour d'Appel de Versailles. Quels sont les effets de cette annulation sur chaque protagoniste ? Seul le tiers acquéreur assume pleinement les conséquences de l'annulation. Il ne restera pas propriétaire. Ce qui apparaît normal, puisqu'il l'est devenu en fraude aux droits du bénéficiaire. En effet, l'effet relatif des contrats permet en général, que la bonne foi du tiers fasse obstacle à l'élargissement de l'action en dommages et intérêts à ce tiers (Civ 3e mars 1999). [...]
[...] Il est donc évident que seule la réalisation forcée par substitution peut faire échec à cette malversation. Ici, il y a une sorte de révocation du promettant, révocation fautive et frauduleuse de son engagement. Il n'a pas respecté la détermination du cocontractant éventuel prévu au pacte de préférence. Même si elle est sanctionnée par la réparation en dommages- intérêts et par l'annulation du contrat frauduleux, cette révocation fait obstacle à l'exécution forcée du pacte de préférence, c'est à dire du pouvoir du juge de décider que le contrat est formé avec le bénéficiaire. [...]
[...] Bien que le pacte de préférence soit tributaire de ce principe de relativité des conventions, il est lui-même opposable à tous en tant que fait. Il est donc normal que le tiers connaissant l'existence de ce pacte subisse la nullité du contrat frauduleux. La critique à apporter est que les effets de l'annulation sont minimes pour les parties au pacte de préférence. Le promettant voit son entreprise frauduleuse déjouée, mais rien ne l'empêchera par la suite, soit de ne plus vendre son bien s'il en retrouve la propriété, soit de le proposer dans des conditions par exemple de prix différentes ; le bénéficiaire ne deviendra donc jamais propriétaire du bien comme il l'avait souhaité. [...]
[...] L'article 1142 du code civil, visa de l'arrêt de cassation n'autorise que les dommages- intérêts. La raison d'être de cet article est d'empêcher une exécution forcée lorsqu'elle porte atteinte à la liberté ou aux droits fondamentaux du débiteur. Or, dans le cas d'un pacte de préférence, ni la liberté, ni les droits fondamentaux du promettant ne sont en cause. A la conclusion du pacte, celui-ci ne se soumet qu'à une obligation de faire : proposer prioritairement au bénéficiaire du pacte, l'acquisition du bien. [...]
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