Durant le XIXe siècle, la responsabilité était nécessairement issue d'une faute, et cette faute était appréciée subjectivement : il s'agit de la question de l'imputabilité. Ainsi, les enfants étaient reconnus comme irresponsables civilement par une jurisprudence constante, car ils ne disposaient pas d'un discernement. Or, une série d'arrêts rendus par la Cour de cassation en 1984 ont contribué à faire disparaître la condition d'imputabilité en ce qui concerne les enfants, et à apprécier subjectivement cette faute ; c'est ce que démontre l'arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 12 décembre 1984.
En l'espèce, Jean-Claude Sabatier, jeune enfant de sept ans jouait avec un de ses camarades, Nicolas Desprats, dans la cour de leur école. Suite à un jeu de poursuite, le premier poussa le second qui tomba sur un banc, la chute ayant provoqué une hémorragie interne suite à un éclatement de la rate.
Madame Molina, représentante légale de Nicolas Desprats assigna le représentant légal de Jean-Claude Sabatier, M. Sabatier, en réparation du préjudice subi par l'enfant Desprats, ainsi que la société d'assurance moderne des agriculteurs.
En première instance, Madame Molina n'est pas accueillie dans sa demande et celle-ci interjette donc appel.
[...] Il est donc intéressant d'envisager tout d'abord la volonté de la Cour d'aller vers une responsabilité accrue de l'enfant en bas âge comme en témoigne cet arrêt pour voir ensuite l'abandon pur et simple de la condition d'imputabilité en ce qui concerne ces individus (II). I. Vers une reconnaissance de la faute de l'enfant en bas âge Afin de bien cerner la décision du 12 décembre 1984, il est nécessaire de rappeler l'état du droit antérieur, c'est-à-dire avant l'arrêt Lemaire et cet arrêt qui est venu le confirmer pour ensuite voir la position adoptée par la Cour dans ces deux décisions A. [...]
[...] Sabatier invoque une violation de l'article 1382 du Code civil au motif que la poussée nécessaire au jeu pratiqué par l‘enfant n'était pas violente, que la présence d'un banc dans une cour de récréation ne rend pas ce type d'amusement dangereux et enfin que la Cour d'appel ne peut que violer l'article 1382 du Code civil en déduisant de l'opération pratiquée sur la personne de Nicolas Desprats, la violence de la poussée dont Jean-Claude Sabatier a été l'initiateur. La question qui était donc posée à la deuxième chambre civile de la Cour de cassation était de savoir d'une part, s'il est possible d'imputer une faute à un enfant de sept ans seulement et d'autre part, si l'on peut déduire la faute des conséquences qu'elle a entrainées ? [...]
[...] -On est donc dans une abstraction qui veut qu'un enfant en bas âge soit aussi prudent et avisé que ses parents pour ne pas avoir commis une faute. -À l'inverse du mode d'appréciation précédent, il permettra toujours de retenir contre l'enfant en bas âge une faute. -Ainsi, la Cour de cassation a-t-elle pu décider que «Jean-Claude Sabatier a poussé Nicolas Desprats sur un banc de la cour de l'école avec une violence telle qu'elle a entrainé un éclatement de la rate avec hémorragie interne -On peut donc affirmer que l'appréciation des juges de la Cour de cassation est objective. [...]
[...] B. D'une appréciation in abstracto vers une appréciation in concreto ? 1. L'appréciation in abstracto -Raisonner de la sorte conduisait à penser que l'enfant étant donné son âge ne pouvait pas comprendre la gravité de son acte. cela pouvait être très lourd pour la victime qui a subi le dommage causé par l'enfant dans la mesure où celle-ci n'aurait pas obtenu réparation de son dommage à la hauteur de ses attentes. [...]
[...] -Ainsi, les juges de la Cour de cassation reconnaissent l'inutilité de rechercher si l'enfant était discernant au moment des faits ; ils abandonnent cette condition : la Cour d'appel qui n'était pas tenue de vérifier si le mineur Jean-Claude Sabatier était capable de discerner les conséquences de son acte B. Les conséquences de ces revirements de jurisprudence 1. La faute de l'enfant en bas âge = un comportement objectivement anormal -Abandonner la condition d'imputabilité revient à reconnaitre le comportement de l'enfant comme un comportement objectivement fautif puisqu'on le compare au standard juridique du bon père de famille. [...]
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