L'article 220 du code civil dispose que « Chacun des époux a pouvoir pour passer seul les contrats qui ont pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants : toute dette ainsi contractée par l'un oblige l'autre solidairement.
La solidarité n'a pas lieu, néanmoins, pour des dépenses manifestement excessives, eu égard au train de vie du ménage, à l'utilité ou à l'inutilité de l'opération, à la bonne ou mauvaise foi du tiers contractant.
Elle n'a pas lieu non plus, s'ils n'ont été conclus du consentement des deux époux, pour les achats à tempérament ni pour les emprunts à moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante. »
L'application de cet article est au cœur du présent arrêt de la 1ère chambre civile de la Cour de cassation du 4 juillet 2006.
En l'espèce, Mme Durand a commandé à la société Les Demeures du Val la construction, sur un terrain constituant un bien propre de son époux d'une maison individuelle destinée au logement de la famille pour un prix de 316 309,76F. Elle a également commandé la construction d'une clôture et la mise en place d'un égout pour un prix de 33 357,96F. Par la suite, les époux Levesque ont engagé une instance en divorce. La société Les Demeures du Val a sollicité la condamnation solidaire des époux Levesque pour le paiement des constructions.
La Cour d'appel de Montpellier dans son arrêt du 25 février 2003 a débouté la société Les Demeures du Val de ses demandes formées à l'encontre de M Levesque.
Suite à cette décision, la société Les Demeures du Val a formé un pourvoi en cassation. Elle invoque deux moyens : tout d'abord, elle estime que l'article 220 du code civil est applicable en l'espèce car la construction d'un logement familial fait parti des dépenses ménagères et que cette construction n'apparaît pas être manifestement excessive eu égard au train de vie du ménage. Ensuite elle invoque un nouveau moyen, la présence d'un mandat tacite conféré par M Levesque à son épouse. (Ce 2nd moyen ne sera pas étudié)
Ainsi, la construction d'une maison destinée au logement de la famille entre t-elle dans la catégorie des dépenses ménagères auxquelles s'applique la solidarité de l'article 220 du code civil ?
La Cour de cassation dans son arrêt en date du 4 juillet 2006 rejette le pourvoi.
Elle affirme que « la conclusion d'un marché de travaux portant sur la construction d'une maison individuelle destinée au logement de la famille, n'a pas pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants et constitue une opération d'investissement, qui n'entre pas dans la catégorie des dépenses ménagères auxquelles l'article 220 du code civil attache la solidarité de plein droit. »
Cet arrêt de la Cour de cassation précise l'application de l'article 220 du code civil en excluant la construction du logement familial des dépenses ménagères. Pour la Cour de cassation, cette dépense constitue un investissement qui exclut la solidarité des époux au regard de l'alinéa 3 de l'article 220 du code civil. C'est une solution qui est donc légalement justifiée mais qui aurait pu être différente au regard notamment de la conception étendue de la notion de « dépense ménagère ».
Ainsi, la Cour de cassation exclut la solidarité de l'article 220 du code civil pour la construction d'un logement familial (I) ce qui est une solution légalement justifiée mais contestable (II)
I L'exclusion de la solidarité de l'article 220 du code civil pour la construction du logement familial
La Cour de cassation a jugé que la dépense de construction du logement familial n'entre pas dans la catégorie des dépenses ménagères (A) mais qu'elle constitue une opération d'investissement excluant la solidarité (B)
[...] Cet arrêt de la Cour de cassation précise l'application de l'article 220 du code civil en excluant la construction du logement familial des dépenses ménagères. Pour la Cour de cassation, cette dépense constitue un investissement qui exclut la solidarité des époux au regard de l'alinéa 3 de l'article 220 du code civil. C'est une solution qui est donc légalement justifiée mais qui aurait pu être différente au regard notamment de la conception étendue de la notion de dépense ménagère Ainsi, la Cour de cassation exclut la solidarité de l'article 220 du code civil pour la construction d'un logement familial ce qui est une solution légalement justifiée mais contestable I. [...]
[...] Ainsi, la solidarité entre époux n'est pas retenue pour la construction du logement familial, néanmoins si cette solution est légalement justifiée au regard de l'article 220n du code civil, elle n'en est pas moins contestable. II .Une solution légalement justifiée mais contestable La Cour de cassation a choisi d'appliquer strictement la loi néanmoins elle aurait pu faire une application plus souple de celle-ci pour admettre la solidarité des époux en raison de l'objet de l'emprunt A. Un refus de l'extension de la solidarité critiquable au regard de l'appréciation subjective de la notion de dépense ménagère La Cour de cassation aurait pu admettre la solidarité en jouant notamment sur la notion de dépense ménagère déjà étendue dans certaines hypothèses et en prenant plus en compte l'objet de l'emprunt : la construction du logement familial 1 Une notion étendue par la jurisprudence La jurisprudence a considéré qu'il faut dépasser la lettre même du texte et elle admet la solidarité pour les dettes non contractuelles en expliquant que ce qui est déterminant ce n'est pas la source de la dette mais le but auquel elle répond c'est-à-dire la cause. [...]
[...] Néanmoins, cela constitue un capital donc pourquoi pas un capital immobilier ? Aussi la jurisprudence a élargi la notion aux dépenses de loisir ex : achat d'un billet d'avion par le mari en considérant que le train de vie du ménage permettait de considérer la dépense comme une dépense normale (Paris 5 juillet 1996) 2 Une solution contraire envisageable La Cour de cassation aurait pu considérer que la dépense de construction du logement familial entraîne la solidarité en estimant que c'est une dépense qui a pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants (au regard de son but), qu'il s'agit d'une dépense non excessive au regard du train de vie du ménage (notion subjective) et qu'il s'agit d'une dépense utile. [...]
[...] Elle a également commandé la construction d'une clôture et la mise en place d'un égout pour un prix de 33 357,96F. Par la suite, les époux Levesque ont engagé une instance en divorce. La société Les Demeures du Val a sollicité la condamnation solidaire des époux Levesque pour le paiement des constructions. La Cour d'appel de Montpellier dans son arrêt du 25 février 2003 a débouté la société Les Demeures du Val de ses demandes formées à l'encontre de M Levesque. Suite à cette décision, la société Les Demeures du Val a formé un pourvoi en cassation. [...]
[...] (Ce 2nd moyen ne sera pas étudié) Ainsi, la construction d'une maison destinée au logement de la famille entre t-elle dans la catégorie des dépenses ménagères auxquelles s'applique la solidarité de l'article 220 du code civil ? La Cour de cassation dans son arrêt en date du 4 juillet 2006 rejette le pourvoi. Elle affirme que la conclusion d'un marché de travaux portant sur la construction d'une maison individuelle destinée au logement de la famille, n'a pas pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants et constitue une opération d'investissement, qui n'entre pas dans la catégorie des dépenses ménagères auxquelles l'article 220 du code civil attache la solidarité de plein droit. [...]
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