En l'espèce, Mme Desroches-Noblecourt -égyptologue de renom- avait été recrutée par la société Clio « Voyages Culturels » afin d'animer un circuit touristique organisé entre le 3 mars et le 15 mars 1997 ; voyage auquel devaient se joindre des touristes, dont Mme Tremois. Or, à la suite d'un incident de santé, l'égyptologue dut subir une intervention chirurgicale, l'empêchant d'assurer sa participation au séjour. De ce fait, la société Clio « Voyages culturels » décida d'annuler le circuit touristique.
Cependant, Mme Tremois, se réclamant du paiement de la pénalité prévue en cas d'annulation du voyage par l'organisateur et du versement de dommages-intérêts, assigna la société Clio « Voyages culturels » en rétribution desdites sommes devant le Tribunal d'Instance de Paris du XVe arrondissement, qui par son jugement du 17 décembre 1998, accueille les prétentions de Mme Tremois au motif que « la maladie d'une personne âgée n'est pas imprévisible ». Mécontente de la décision du Tribunal d'Instance, la société Clio « Voyages Culturels » décide de former un pouvoir devant la Cour de cassation au moyen duquel elle invoque la violation de l'article 1148 du Code civil.
La question qui se pose alors à la première chambre civile de la Cour de cassation est celle de savoir si la maladie de Mme Desroches-Noblecourt constitue un cas de force majeure.
[...] Par ailleurs, la jurisprudence de la Cour de cassation a progressivement affirmé le caractère irrésistible de la force majeure en matière de voyage puisqu'elle a été amenée à se prononcer plusieurs fois sur ce sujet au cours d'une série d'arrêts rendus par la première chambre civile ayant notamment conduit à la décision du 8 décembre 1998 (Bull. n°346) rejetant la force majeure pour une société annulant un séjour hôtelier au Maroc la veille de la guerre ; ou à la décision du 20 janvier 1998 (Bull. refusant pareillement l'annulation pour force majeure d'un voyage en raison d'émeutes dans le pays étranger alors que la situation s'était apaisée. Le point commun entre ces décisions est qu'elles ont toutes conduit à un arrêt de rejet. [...]
[...] Ainsi, par cette décision, la Cour de cassation a érigé, à travers la maladie, le caractère irrésistible de la force majeure, venant confirmer la consécration jurisprudentielle positive. La consécration du caractère irrésistible de la force majeure par la jurisprudence A la suite d'une jurisprudence abondante ayant pour thème de discussion la force majeure, la Cour de cassation a peu à peu accordé une place prépondérante au caractère irrésistible au détriment des autres caractères dont celui de l'imprévisibilité L'utilisation par les juges du fond du caractère d'imprévisibilité sanctionnée La décision attaquée par la société Clio, rendue par le Tribunal d'Instance de Paris, se réfère et motive son jugement par l'absence de caractère imprévisible résidant dans l'intervention chirurgicale de l'égyptologue. [...]
[...] Cour de cassation, première chambre civile novembre 2002 - les critères définissant la force majeure Sauf cas de force majeure Cette célèbre locution, largement utilisée et passée dans le langage usuel, est très souvent employée pour exprimer une réserve qui tiendrait à la survenance d'un événement imprévu bouleversant l'ordre des choses prévu. Aussi, cette expression coutumière a conduit à la rédaction de l'article 1148 du Code Civil qui, dès 1804, disposait déjà qu' il n'y a lieu à aucuns dommages et intérêts lorsque, par suite d'une force majeure ou d'un cas fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit De ce fait, l'acception issue du Code Napoléon recoupe en de nombreux points celle du sens commun puisque la force majeure désigne, juridiquement, tout événement imprévisible et insurmontable empêchant le débiteur d'exécuter son obligation, événement dont Mme Desroches-Noblecourt fut malheureusement victime. [...]
[...] La Cour de cassation prend soin de relever que les eaux venues du fonds voisin provenaient elles-mêmes d'autres terrains (extériorité) mais elle admet l'existence d'une force majeure alors même que phénomène était connu depuis longtemps», ce qui est clairement dispensé de la condition d'imprévisibilité (Civ janvier 1981, JCP 1982. II. 19814). Parfois, la Cour de cassation a employé des formules encore plus explicites : l'irrésistibilité de l'événement est à elle seule constitutive de la force majeure, lorsque sa prévision ne saurait permettre d'en empêcher les effets, encore faut-il que le débiteur ait pris toutes les mesures requises pour éviter la réalisation de cet événement» (Civ mars 1994, Bull. [...]
[...] Dans les deux cas, la maladie est appréciée comme un cas de force majeure libérant le débiteur. En effet, si le débiteur parvient à justifier que l'inexécution provient d'une cause étrangère, celui-ci est libéré de son obligation. En l'espèce, la maladie ayant frappé Mme Desroches-Noblecourt -malgré son âge avancé- n'était pas prévisible ; la décision d'annulation du voyage prise par la société Clio Voyages Culturels qui en a découlé provenait bien d'une cause étrangère qui ne lui était pas imputable. [...]
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