Un justiciable a été en procès avec une société de crédit. Estimant que lors de cette instance son avocat, omettant d'avoir assigné en garantie une société d'assurance qui aurait pris à sa charge une partie des sommes dues, lui a fait perdre une chance de gagner son procès, il l'assigne en justice pour faire réparer ce préjudice.
La Cour d'appel de Besançon rend un arrêt le 7 novembre 2007. Dans cet arrêt, d'une part, elle confirme le manquement fautif de l'avocat, et donc le versement de dommages et intérêts, et d'autre part majore cette somme en réparation de la perte de chance, non pas de gagner son procès, puisqu'elle estime que le justiciable n'a pas démontré que l'appel en garantie de la société aurait été couronné d'un succès judiciaire complet, mais de voir ses prétentions soumises à un débat et un examen judiciaire. Un pourvoi en cassation est formé.
Dans quelle mesure le juge peut-il prononcer l'indemnisation d'une perte de chance ?
[...] Dans quelle mesure le juge peut-il prononcer l'indemnisation d'une perte de chance ? En visant l'article 1147 du code civil, fondement de la responsabilité contractuelle, la cour de cassation casse l'arrêt de la Cour d'appel, sauf en ce qu'elle a condamné l'avocat au versement de dommages et intérêts pour manquement contractuel ( le devoir de diligence étant un devoir de l'avocat envers son client). Elle estime que la Cour d'appel n'a pas, pour évaluer la majoration, recherché s'il existait une chance sérieuse du succès du procès, en reconstituant fictivement la discussion qui aurait pu s'instaurer devant le juge, et donc a privé sa décision de base légale. [...]
[...] Elle estime que la chance de voir les prétentions du justiciable soumises à un débat judiciaire, n'a d'intérêt que parce qu'elle est une chance de réussite dans l'action en garantie. Cette position, en plus d'illustrer la définition de la perte de chance établie par l'arrêt du 21 novembre 2006 et inspirée d'Aubert, se place dans une jurisprudence de la Cour de cassation, qui dans un arrêt de la 1re chambre civile du 8 juillet 2003, énonce clairement que la chance perdue étant non celle de voir l'affaire portée en justice, mais celle d'y obtenir satisfaction En plus de faire la lumière sur le fait qu'une réparation concerne un événement favorable, l'arrêt commenté illustre le fait que la perte de chance est une perte certaine d'une chance sérieuse. [...]
[...] Le 10 juillet 2002 la Cour de cassation avait déjà établi que le juge était souverain dans l'évaluation du dommage. Généralement la réparation du dommage n'est que partielle, comme l'arrêt du 27 mars 1973 semble l'indiquer. Un arrêt du 16 juillet 1998 traduit que l'indemnisation doit être mesurée à la chance perdue, et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée Ainsi l'arrêt du 2 avril 2009 traduit le rôle actif et souverain du juge, tant dans l'appréciation de la probabilité que du dommage. [...]
[...] Evaluation du préjudice La cour d'appel de la présente affaire avait élevé à la somme de 10000 le montant des dommages et intérêts pour indemniser la perte de chance. La Cour de cassation ne censure pas cette évaluation souveraine du juge du fond. Elle lui reproche seulement la méthode avec laquelle elle a agi pour cette évaluation. L'arrêt laisse donc penser que le juge est souverain dans l'évaluation du préjudice résultant d'une perte de chance, ce qui semble cohérent étant donné que cette indemnisation est indissociable de l'évaluation de la probabilité et que c'est le juge qui apprécie celle-ci. [...]
[...] Cour de cassation, première chambre civile avril 2009 - l'indemnisation d'une perte de chance Un justiciable a été en procès avec une société de crédit. Estimant que lors de cette instance son avocat, omettant d'avoir assigné en garantie une société d'assurance qui aurait pris à sa charge une partie des sommes dues, lui a fait perdre une chance de gagner son procès, il l'assigne en justice pour faire réparer ce préjudice. La cour d'appel de Besançon rend un arrêt le 7 novembre 2007. [...]
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