Arrêt du 7 février 2013 de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, abus de fonction de la part d'un préposé, responsabilité du commettant, détournement de souscription d'assurance vie, article 1384 alinéa 5 du Code civil, principe de la légitime conviction, légèreté de la victime, indemnisation de la victime, commentaire d'arrêt
La décision étudiée est un arrêt de cassation rendu le 7 février 2013 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation. Dans cet arrêt, la Cour de cassation a eu à se prononcer sur la responsabilité du commettant au regard de l'abus de fonction de son préposé. En l'espèce, le mandataire non-salarié d'une société d'assurances a détourné une somme de 200100 francs des suites de la souscription d'un contrat d'assurance vie (AREP) par Mme Y. À ce titre, une action est intentée à l'encontre de la société d'assurances dans le but d'obtenir réparation de son préjudice. La Cour d'appel de Nîmes va, dans un arrêt en date du 14 juin 2011, retenir l'abus de fonctions de la part du préposé dans la mesure où la victime n'avait pu légitimement croire que cet individu agissait dans le cadre de ses fonctions.
À ce titre, la Cour va très largement relever le comportement fautif du souscripteur. En ce sens, la Cour d'appel va relever qu'elle ne pouvait légitimement croire en l'étendue des pouvoirs du mandataire, qu'elle se prévaut d'avoir reçu les statuts de la société. De plus, la Cour relève que cette dernière est une retraitée des services fiscaux, le formalisme contractuel ne pouvait donc excéder ses capacités de compréhension. De plus, cette dernière ne s'est jamais étonnée de l'absence de retour du contrat d'assurance, et ce malgré l'encaissement de la somme versée par chèque. Que par conséquent, la Cour d'appel a relevé dans son arrêt que la plaignante a agi avec une légèreté anormale et coupable, que par conséquent la responsabilité du mandant du présumé coupable ne saurait être retenue selon la Cour de cassation.
[...] La légitime conviction signifie l'absence d'abus de fonction dès lors que la victime n'a pu considérer que le préposé abusait de sa fonction. Il faut donc nécessairement que la victime ait dû se douter que le préposé agissait en dehors de sa fonction pour caractériser l'abus de fonction et donc l'exonération de la responsabilité du commettant. Les juges relèvent donc en l'espèce un critère d'apparence dont le but est de légitimer les agissements de la victime. La légitime conviction est pour la victime le fait de croire ou non que le préposé agît dans ses fonctions. [...]
[...] Cette solution semble admissible en ce sens qu'elle souligne la volonté des juges de favoriser la victime et notamment son indemnisation en admettant la responsabilité du commettant qui sera plus certainement assuré que son préposé. Les juges de la Cour de cassation vont donc très largement étudier l'exercice de ses fonctions par le préposé et plus particulièrement la notion de légitime conviction. Il résulte de ces constatations que ce jugement semble assez sévère au regard des circonstances, mais assez légitime toutefois (II.) II. [...]
[...] C'est pour cette raison qu'il est important d'étudier les limites de la mission impartie au préposé par son commettant. En effet, comme cela a pu l'être observé dans un arrêt de l'Assemblée plénière de la Cour de cassation du 25 février 2000, Costedoat, n'engage pas sa responsabilité à l'égard des tiers, le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant. Autrement dit, l'abus de fonction n'est pas caractérisé si cela résulte d'une mission dont le préposé a été chargé par son commettant. [...]
[...] Ainsi les juges vont avoir tendance, comme c'est le cas en l'espèce, à rechercher la responsabilité du commettant et non celle du préposé. L'étude de critères accessoires, tels que le critère temporel, aux critères principaux permet ainsi aux juges de posséder un pouvoir souverain de détermination de la responsabilité. De manière plus large, dans de nombreux régimes de responsabilité et notamment ceux concernant le fait d'autrui, la Cour de cassation va avoir tendance à rechercher la partie détenant l'assurance la plus favorable à la victime. Les juges semblent donc avoir en premier lieu pour intérêt de faciliter l'indemnisation de la victime. [...]
[...] Les juges se refusent donc à exonérer la compagnie d'assurance de sa responsabilité malgré les nombreux éléments qui auraient pu permettre de justifier cela. En effet, de nombreux éléments de faits auraient pu conduire à admettre une solution tout autre. Toutefois, les juges de par leur appréciation souveraine ont pu considérer qu'en l'espèce il ne s'agissait pas d'un abus de fonction, dès lors que l'individu mis en cause agissait dans le cadre de la mission qui lui était conférée sans en abuser. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture