« L'action en justice est le droit mis en mouvement.
C'est le droit à l'état d'action, le droit à l'état de guerre ou de paix. » Deblonde
Si le romantisme de Deblonde est incontestable l'action en justice demeure une notion délicate à interpréter pour les juges qui sont quotidiennement confrontés à l'article 31 du NCPC.
A la suite de nuisances occasionnées par l'exploitation d'une carrière, des riverains ont constitué une association, afin d'assigner en réparation, en leur nom propre et au nom de la personne morale, la société exploitante qu'ils considéraient être responsable « des poussières, des odeurs, des bruits, de la surpression aérienne et des vibrations de sol ».
La cour d'appel déclare irrecevable l'action de la personne morale, au motif que les demandes ainsi que leurs montants, sont identiquement formulés par les membres de l'association qui agissent également en leur nom propre.
L'association forme donc un pourvoi en cassation et pose ainsi un problème d'interprétation de l'article 31 du NCPC.
Dans quelle mesure, une association est recevable à agir pour la défense des intérêts collectifs de ses membres ?
La cour de cassation casse l'arrêt de la Cour d'appel, au motif que celle-ci aurait du rechercher si l'association « n'était pas recevable à agir pour la défense des intérêts collectifs de ses membres conformément à son objet social».
Si l'article 31 du NCPC pose le principe de l'intérêt à agir comme condition sine qua non à la recevabilité de l'action - qui se veut en l'espèce « possessoire » du fait des troubles apportés aux immeubles -, ce critère est beaucoup plus difficilement identifiable lorsqu'il s'agit d'analyser une action entreprise, pour sauvegarder des intérêts collectifs.
La jurisprudence ancienne était d'ailleurs très hostile à l'action déclenchée par les associations et par un arrêt rendu en chambres réunies le 15 juin 1923, la Cour de cassation à marquée « son hostilité de principe à la recevabilité d'une telle action ».
C'est ainsi que le législateur est venu accorder à certaines associations agréées, le droit d'ester en justice, afin de défendre des intérêts collectif, comme le prévoit par exemple l'article L. 142-2 du code de l'environnement.
Ce présent arrêt est donc d'une grande importance, en ce qu'il touche au « droit d'action en justice » et non au « principe de libre accès de la justice » comme l'avançait Martine Boutonnet lorsqu'elle commenta une série de décisions dont celle qui nous est donnée à étudier.
En effet, le libre accès à la justice est une notion antérieure au droit d'action et constitue une liberté publique, un principe fondamental qui est indifféremment attribué à tous les sujets de droit.
Mais l'action en justice est également à distinguer de la demande en justice, l'action étant le pouvoir légal de saisir le juge alors que la demande est l'acte de procédure par lequel son auteur exerce effectivement son pouvoir.
Henri Motulsky, auteur de l'actuel article 30 du NCPC a défini l'action en justice comme « le droit pour l'auteur d'une prétention, d'être entendu sur le fond de celle-ci, afin que le juge la dise bien ou mal fondée ».
Ainsi, le sort réservé à un demandeur dépourvu de ce droit est la fin de non recevoir prévue à l'article 122 du même code qui dispose que « c'est le sort normal de toute prétention émise par ou pour une personne dépourvue du droit d'agir ».
Or, le droit d'action est bien plus difficilement identifiable pour une personne morale que pour un simple justiciable.
Ainsi, s'il apparaît que l'action d'une association est recevable dès lors qu'elle remplie les mêmes conditions requises par l'action individuelle (I), il n'en demeure pas moins qu'elle est soumise à des critères qui lui sont spécifiques (II).
[...] Mais l'évolution de la société a entraîné des préjudices qui se voulaient avant tout collectifs, au premier desquels figurent les dommages écologiques, ce qui a entraîné un besoin d'adaptation auquel répondait le législateur mais qui a nécessité une adaptation de la jurisprudence, pour accueillir des actions civiles collectives, tout à fait légitimes, que les juges de la cour suprême affirment en l'espèce avec une grande clarté, mais uniquement pour les associations La nécessité d'une qualité à agir L'article 31 du NCPC dispose en effet que seule la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé Une personne physique ou morale a donc la qualité à agir lorsqu'elle a été investie par le législateur d'un titre qui l'habilite à agir en justice. Le plus souvent, les personnes physiques auront qualité à agir dès lors qu'elles auront un intérêt personnel à le faire. Pour les actions banales en justice, il suffit donc d'avoir l'intérêt pour avoir la qualité. [...]
[...] Cette solution était donc d'emblée critiquable car les juges de la Cour d'appel, reconnaissaient tacitement le bien-fondé de l'action collective en ce qu'ils la déclaraient mal fondée du seul fait d'un écho des demandes. On peut donc légitimement se demander si, dans le cas où les juges du fond considéreraient une demande abusive, du fait de cet écho de plaideurs, ils ne devraient pas tout simplement réserver cette appréciation souveraine, pour le moment de l'évaluation de l'indemnisation. Mais la Cour de cassation rappelle par cet arrêt qu'en tout état de cause, l'action collective demeure recevable dans certaines conditions, qui sont tirés de l'exception légale, prévue à l'article 31 du NCPC. [...]
[...] Mais l'action en justice est également à distinguer de la demande en justice, l'action étant le pouvoir légal de saisir le juge alors que la demande est l'acte de procédure par lequel son auteur exerce effectivement son pouvoir. Henri Motulsky, auteur de l'actuel article 30 du NCPC a défini l'action en justice comme le droit pour l'auteur d'une prétention, d'être entendu sur le fond de celle-ci, afin que le juge la dise bien ou mal fondée Ainsi, le sort réservé à un demandeur dépourvu de ce droit est la fin de non recevoir prévue à l'article 122 du même code qui dispose que c'est le sort normal de toute prétention émise par ou pour une personne dépourvue du droit d'agir Or, le droit d'action est bien plus difficilement identifiable pour une personne morale que pour un simple justiciable. [...]
[...] La cour de cassation a longtemps considéré que l'intérêt n'était légitime, que lorsqu'il était juridiquement protégé. La doctrine analysait donc cette conception comme une confusion entre l'action et le fond de la prétention Dans les faits, la jurisprudence a par exemple refusé d'accorder une légitimité à l'action entreprise par une femme, à la suite de la mort de son concubin, pour des questions de moralité. Mais cette interprétation a évoluée et aujourd'hui, on considère que l'intérêt est légitime, dès lors qu'il est un minimum sérieux et plus précisément : ni fantaisiste, ni illusoire, ni opportun En l'espèce, les conditions sont donc bien remplies, puisque les troubles sont sérieux et que l'action de la personne morale et des personnes physiques a été entamée, suite à l'immobilisme du responsable des troubles et ce, malgré une expertise judiciaire l'invitant à réagir. [...]
[...] Cour de cassation : deuxième chambre civile, le 5 octobre 2006 L'action en justice est le droit mis en mouvement. C'est le droit à l'état d'action, le droit à l'état de guerre ou de paix. Deblonde Si le romantisme de Deblonde est incontestable l'action en justice demeure une notion délicate à interpréter pour les juges qui sont quotidiennement confrontés à l'article 31 du NCPC. A la suite de nuisances occasionnées par l'exploitation d'une carrière, des riverains ont constitué une association, afin d'assigner en réparation, en leur nom propre et au nom de la personne morale, la société exploitante qu'ils considéraient être responsables des poussières, des odeurs, des bruits, de la surpression aérienne et des vibrations de sol La cour d'appel déclare irrecevable l'action de la personne morale, au motif que les demandes ainsi que leurs montants, sont identiquement formulés par les membres de l'association qui agissent également en leur nom propre. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture