La détermination du lien de causalité impose un choix difficile au juriste, et cet arrêt en date du 25 janvier 2005 rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation illustre parfaitement cette situation. En l'espèce, Mme X a été victime d'un accident de la circulation survenu le 14 octobre 1985 dans lequel été impliqué le véhicule conduit par M Y assuré auprès de la MAAF.
Elle a subi une intervention chirurgicale à l'occasion de laquelle elle a reçu des transfusions de produits sanguins fournis par le centre régional de transfusion sanguine de Bordeaux (le CRTS) aux droits duquel est venu l'établissement français du sang (l'EFS) ; qu'il en est résulté une contamination par le virus de l'hépatite C diagnostiquée en avril 1996.
La question qu'ont dû se poser les juges de la Cour de cassation est de savoir si un fournisseur de produits sanguins peut ou non s'exonérer totalement de sa responsabilité en exerçant une action récursoire contre l'auteur de l'accident qui a rendu son intervention nécessaire.
[...] D'un autre côté, la cour d'appel de Bordeaux considère que le doute peut profiter au demandeur que si celui-ci apporte des éléments suffisants permettant de présumer le lien de causalité entre la transfusion et la contamination (19 décembre 2002). Il appartient à la partie défenderesse de renverser la présomption d'imputabilité résultant des éléments apportés par le demandeur, soit en fournissant la preuve de l'innocuité des produits sanguins transfusés, soit en établissant l'existence d'une cause étrangère à la transfusion. Cependant la cour d'appel de Paris en un arrêt du 28 novembre 1991 affirme que le vice interne du sang même indétectable ne constitue pas pour l'organisme fournisseur, une cause qui lui est étrangère, et que les allégations des centres de transfusion quant à la conservation du sang et à sa délivrance, dont ils ont le monopole, ne les dispensent pas de réparer les conséquences dommageables dues à la fourniture de sang nocif ; affirmation qui sera conservée par la première chambre civile de la cour de cassation en un arrêt du 12 avril 1995. [...]
[...] D'un autre côté, il conviendra d'étudier la difficulté posée par les dommages en cascades. A : L'équivalence des conditions et son incidence sur l'action récursoire. En ce qui nous concerne, le fournisseur de produits sanguins en appelant en garantie M Y et son assureur a obtenu que la cour d'appel le décharge de sa responsabilité. Cependant, la cour de cassation a jugé que, celui-ci manquant à son obligation de sécurité a commis une faute délictuelle qui n'était pas caractérisée par une cause étrangère ; elle en a par conséquent que ce dernier avait bien lui aussi une part de responsabilité ; la cour de cassation passe donc par la thèse de l'équivalence des conditions. [...]
[...] De ce fait, la cour d'appel d'Agen ne retient que la faute de défaut de maîtrise au sens de l'article 1382 du Code civil. On peut y voir un recours implicite à la thèse de la causalité adéquate, en quoi seule la cause efficiente sera retenue puisque celle-ci a joué un rôle déterminant dans la production du dommage. Néanmoins, il faut tenir compte de la nature de l'obligation qui incombe aux centres de transfusions sanguines au sujet des produits qu'ils fournissent. [...]
[...] On pourrait d'ailleurs faire un rapprochement avec l'article 1383 du Code civil qui pose implicitement une obligation de prudence et de diligence. Cependant, cette spirale de responsabilité potentielle peut paraître sécurisante, mais elle peut aussi être un frein, il est donc nécessaire de limiter le cadre dimensionnel de la responsabilité collective. La question qui se pose alors est de savoir ou est-ce que la prise en compte des causes à l'origine du dommage doit s'arrêter, car il est possible de remonter très loin en prenant en compte la cause qui est propre à chacun des fautifs ainsi que la cause de la cause La subtilité résulte alors dans le choix de la dimension causale, celle-ci ne devant pas sortir du cadre des causes sont directement à l'origine du dommage. [...]
[...] Le 9 octobre 2003, la deuxième chambre civile de la cour de cassation casse, annule et renvoie devant la cour d'appel d'Agen. Le 7 décembre 2005, la cour d'appel d'Agen condamne in solidum M Y et son assureur à relever et garantir l'EFS de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre aux motifs qu'« aucune faute délictuelle ou quasi délictuelle n'était démontrée à l'encontre du CRTS de Bordeaux À une date inconnue, M Y et son assureur forment à leur tour un pourvoi en cassation. [...]
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