Régies par de multiples règles, les questions relatives à l'attitude de la victime dans la survenance du dommage et de ses conséquences dommageables ont suscité de nombreuses discussions. C'est ce qu'illustrent parfaitement les deux arrêts rendus par les juges de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 19 juin 2003.
Le premier concernait Mme X… et sa fille, victimes d'un accident de la circulation, ayant entraîné pour la première une incapacité permanente partielle l'ayant conduit à l'inexploitation de son fonds de commerce pendant plusieurs années, et ayant entraîné pour la seconde la perte de la chance de reprendre ledit fonds de commerce prospère.
second concernait une autre Mme X…, victime elle aussi d'un accident de la circulation, ayant entraîné là encore une incapacité permanente partielle qui s'était aggravée par des troubles psychiques dont elle avait refusé les soins. Dans les deux cas, les victimes cherchaient à obtenir une indemnisation auprès des auteurs des accidents de la circulation.
La question qui se posait aux juges était de savoir si l'attitude de la victime pouvait compromettre l'indemnisation du préjudice qu'elle avait subi.
[...] C'est ainsi que le Tribun Tarrible avait déjà mis en évidence le caractère fondamental de l'article fondateur de la responsabilité délictuelle dans son discours au Corps législatif en 1804. Celle-ci se définit comme l'obligation pour l'auteur d'un fait dommageable de réparer le dommage causé par ce fait en indemnisant la victime. Régie par de multiples règles, ce sont les questions relatives à l'attitude de la victime dans la survenance du dommage et de ses conséquences dommageables qui ont suscité de nombreuses discussions. [...]
[...] En effet, en ne parlant que de «conséquences dommageables», sans préciser les individus pouvant s'en prévaloir, le juge ouvre une large voie aux victimes de préjudices par ricochet. Il est donc clair que les solutions édictées en ce 19 juin 2003 sont destinées à perdurer et à permettre de nombreuses indemnisations. [...]
[...] Les requérantes ayant chacune formé un pourvoi en cassation, la question qui se posait aux juges était de savoir si l'attitude de la victime pouvait compromettre l'indemnisation du préjudice qu'elle avait subi. Dans les deux cas, les juges ont alors retenu comme solution de principe l'article 1382 du Code civil ; attendu que l'auteur d'un accident est tenu d'en réparer toutes les conséquences dommageables ; que la victime n'est pas tenue de limiter son préjudice dans l'intérêt du responsable Au regard de cette nouvelle décision audacieuse, il semble adéquat d'étudier dans une première partie la naissance même de cette absence d'incidence de l'attitude de la victime sur son indemnisation avant d'apprécier dans une seconde partie la réalité de cette absence d'incidence (II). [...]
[...] Contrairement à la matière médicale, la solution ici retenue semble moins propice à susciter des discussions car il est toujours moins choquant de jouer avec l'argent plutôt qu'avec la vie. Toutefois, la position qu'avait adoptée la Cour d'appel était compréhensible : la demanderesse aurait pu faire exploiter son fonds par un tiers, et sa fille aurait ainsi pu reprendre un commerce prospère. C'était en tout cas matériellement possible, l'arrêt ne révélant pas les conditions de vie des requérantes ni les moyens dont elles pouvaient éventuellement disposer pour louer leur fonds de commerce. [...]
[...] En fondant leurs décisions sur cet article, les juges en ont clairement réalisé une interprétation extensive puisque le principe énoncé ne figure pas textuellement au sein même de l'article. En effet, les juges ont étendu le principe de la réparation du fait dommageable au principe de la réparation de ce fait mais aussi à la réparation de «toutes ses conséquences dommageables», c'est-à-dire à tout ce qui en découle postérieurement. Le fait de ne pas limiter le cadre temporel autour de ces conséquences laisse donc à penser que les juges seraient prêts à accorder des indemnisations même longtemps après la survenance du fait générateur, tant que celui-ci génère encore des conséquences dommageables. [...]
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