Dans sa décision du 16 juillet 1998, la première chambre civile de la Cour de Cassation s'est prononcée sur une question à laquelle aucune réponse claire n'avait jamais été donnée : celle des effets de l'exception de nullité en matière de contrats à exécution successive. La Cour y a également rappelé quels étaient les effets de la nullité en général.
En l'espèce, M. Ducrocq, qui était notaire, avait souscrit une part dans le capital social de la société civile de moyens Groupement notarial de négociation de l'agglomération de Lille, le GNNAL. Quelques années plus tard, le GNNAL s'était vu autoriser en garantie de sa créance de plusieurs cotisations annuelles à pratiquer une saisie arrêt entre les mains de la Chambre départementale des notaires du Nord qui détenait des fonds issus de la cession de l'étude de M. Ducrocq. La GNNAL l'avait donc assigné en validité de cette saisie arrêt. La femme de M. Ducrocq avait fait jouer l'exception de nullité, laquelle est perpétuelle, afin de remettre en cause la validité de l'apport fait par son mari à la GNNAL.
Les juges de la Cour d'appel de Douai avait certes accueilli l'exception de nullité soulevée par Mme Ducrocq, mais il n'en avait par moins condamné son mari à payer une certaine somme au titre de l'indemnisation des prestations qu'il avait reçues par la GNNAL. Non contents de devoir indemniser la société demanderesse, les époux Ducrocq se sont pourvus en cassation. Ils estimaient que les juges du fonds avaient violé les articles 1427, 1427 al.2 et 1832-2 du Code Civil.
Le problème juridique posé à la Cour de Cassation s'articulait en deux temps : l'exception de nullité peut-elle emporter nullité du contrat, c'est-à-dire son anéantissement rétroactif ? Si oui, y aura-t-il lieu à restitution ?
Le 16 juillet 1998, la première chambre civile a débouté les époux Ducrocq de leur demande au motif que « la nullité qu'elle soit invoquée par voie d'action ou par voie d'exception emporte, en principe, l'effacement rétroactif du contrat » et que « l'article 1427 n'édicte (…) aucune restriction au principe selon lequel la nullité a pour effet de remettre les choses dans l'état où elles se trouvaient avant conclusion du contrat ».
Au regard des motifs de la Cour et du principe qu'elle pose, faut-il considérer cette décision comme un arrêt d'espèce ou comme un arrêt de principe, auquel cas c'est toute la théorie du droit des contrats qui serait bouleversée ?
Dans la mesure où le principe posé par les juges de Cassation est pour le moins surprenant (I), il convient de s'interroger sur la portée de cet arrêt (II).
[...] Au regard de la décision du 16 juillet 1996, il est légitime de se poser cette question. Deux éléments dans l'arrêt permettent de répondre à cette question. On peut tout d'abord se demander si ce principe ne concerne pas uniquement le cas d'espèce, à savoir celui de la communauté de biens entre époux prévu à l'article 1832-2 du C.Civ. selon lequel un époux ne peut sous la sanction prévue à l'article 1427 employer des biens communs pour faire un apport à une société ou acquérir des parts sociales non négligeables sans que son conjoint en ait été averti et sans qu'il en soit justifié dans l'acte. [...]
[...] L'exception de nullité qui est soumise au régime et produit les effets de l'action mérite-elle encore l'appellation d'exception ? [...]
[...] Cour de Cassation, Civ. 1ère juillet Dans sa décision du 16 juillet 1998, la première chambre civile de la Cour de Cassation s'est prononcée sur une question à laquelle aucune réponse claire n'avait jamais été donnée : celle des effets de l'exception de nullité en matière de contrats à exécution successive. La Cour y a également rappelé quels étaient les effets de la nullité en général. En l'espèce, M. Ducrocq, qui était notaire, avait souscrit une part dans le capital social de la société civile de moyens Groupement notarial de négociation de l'agglomération de Lille, le GNNAL. [...]
[...] La fin de la distinction entre action et exception ? A. La maxime quae temporalia vidée de son sens ? La nullité qu'elle soit invoquée par voie d'action ou par voie d'exception emporte, en principe, l'effacement rétroactif du contrat tel est le motif de la Cour de cassation. On peut dès lors se demander si la distinction entre l'action en nullité et l'exception de nullité a toujours lieu d'être. De plus,, reconnaître les effets de l'action en nullité à l'exception en nullité pose un problème théorique : faut-il en conclure que l'action en nullité pourra être invoquée de façon perpétuelle ? [...]
[...] Pourtant, la Cour opère nettement la distinction entre l'action en nullité et l'exception. Elle leur reconnaît certes les mêmes effets, mais elle n'assimile à aucun moment la première à la seconde ou inversement. Dès lors, si le principe quae temporalia voit sa portée diminuée par cet arrêt, il n'est à aucun moment vidé de son sens. B. La consécration d'une nullité ‘hybride' largement justifiée en matière de contrats à exécution successive Il convient d'abord d'étudier la porté du principe la nullité qu'elle soit invoquée par voie d'action ou par voie d'exception emporte, en principe, l'effacement rétroactif du contrat dégagé par les juges de Cassation au regard des faits. [...]
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