L'arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 11 juillet 1989 illustre parfaitement la réticence de la loi à faire évoluer le statut des couples homosexuels. M. Secher, steward de la compagnie Air-France, demande dans cette espèce pour son concubin homosexuel la délivrance d'un billet à tarif réduit, réservé d'abord au personnel de la compagnie, puis étendu par la suite à leur famille et à leur conjoint. La compagnie Air France refuse. Le conseil de prud'hommes a été saisi, et il a jugé en faveur du demandeur. La compagnie Air France ayant interjeté appel, la cour d'appel a débouté le demandeur, M. Secher, de sa prétention. Celui-ci se pourvoit en cassation contre la cour d'appel de Paris.
La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par M. Secher. Celui-ci soutenait que l'article 74 du statut du personnel au sol d'Air-France, qui établit les facilités de transport pour les employés de ladite compagnie, et qui a vu son champ d'application étendu au « conjoint en union libre » par une réglementation ultérieure, lui permettait de demander à ce que son conjoint du même sexe bénéficie lui aussi d'un billet à tarif réduit.
La question est donc de savoir si la Cour de cassation définit le concubinage comme l'union exclusive d'un homme et d'une femme.
[...] Vis-à-vis des tiers, les concubins peuvent se comporter comme un vrai couple : un concubin peut avoir à honorer les engagements pris par son partenaire, ou, dans un accident, le tiers responsable peut être obligé d'indemniser le partenaire restant en cas de décès de son concubin (Cass., ch. mixte février 1970). Toutefois, malgré cette existence de facto du concubinage, et les effets de droit qu'il produit, le législateur n'a jamais songé à le définir légalement. C'est sur ce point que le demandeur se fonde, en considérant que le concubinage est simplement la relation stable entre deux personnes. L'arrêt du 11 juillet 1989 a rejeté le pourvoi, pour différents motifs. [...]
[...] Cette décision suit les conclusions de l'avocat général Dorwling- Carter. Celui-ci rappelle que, dans la langue courante, et dans les dictionnaires, le concubinage est défini comme l'union durable d'un homme et d'une femme vivant maritalement sans être unis par le mariage. À partir de là, l'emploi des mots concubinage union libre ou vie maritale dans les textes juridiques ou la jurisprudence ne pourrait être compris comme englobant l'union de deux êtres du même sexe, pour l'avocat général et pour la Cour de cassation avec lui. [...]
[...] La compagnie Air France refuse. Le conseil de prud'hommes a été saisi, et il a jugé en faveur du demandeur. La compagnie Air France ayant interjeté appel, la cour d'appel a débouté le demandeur, M. Secher, de sa prétention. Celui-ci se pourvoit en cassation contre la cour d'appel de Paris. [...]
[...] Pour autant, la loi n'encadra pas pendant longtemps les relations homosexuelles, et la jurisprudence fut timide à admettre qu'une relation homosexuelle pouvait produire des effets de droit au même titre qu'une relation durable hétérosexuelle. L'arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 11 juillet 1989 illustre parfaitement cette réticence à faire évoluer le statut des couples homosexuels. M. Secher, steward de la compagnie Air-France, demande dans cette espèce pour son concubin homosexuel la délivrance d'un billet à tarif réduit, réservé d'abord au personnel de la compagnie, puis étendu par la suite à leur famille et à leur conjoint. [...]
[...] La Cour de cassation, en rejetant le pourvoi du demandeur, dit clairement que, pour elle, le concubinage, ou l'union libre, se définissent par ressemblance et différence avec le mariage, et, qu'en conséquence, ces termes ne peuvent viser que la relation durable d'un homme et d'une femme. Pour comprendre cet arrêt, il convient d'analyser d'abord les arguments du pourvoi en cassation avant de voir comment cet arrêt s'insère dans la jurisprudence (II). Les arguments du pourvoi Le pourvoi déposé contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris par le demandeur s'appuie sur deux arguments principalement : le règlement d'Air France, interprété comme s'appliquant uniquement à un couple hétérosexuel, est illégal d'une part ; et, d'autre part, le concubinage n'est nulle part défini légalement L'illégalité de l'interprétation de la cour d'appel Le pourvoi explique qu'interpréter le règlement interne d'Air France comme le fait la cour d'appel, ou comma la compagnie l'a fait, revient à le rendre illégal, comme contraire à diverses dispositions législatives proscrivant toute discrimination, notamment en droit du travail, à raison du sexe ou des mœurs et au préambule de la Convention européenne des droits de l'homme Les dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme visées par le pourvoi sont les articles 8 (al. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture