Cour de cassation chambre mixte 26 mai 2006, commentaire d'arrêt, substitution du bénéficiaire au tiers contractant, sanction violation du pacte de préférence, condition de mauvaise foi, conclusion d'un contrat, bonne foi des contractants, ordonnance du 16 février 2016
Jusqu'au début des années 2000, aucune solution claire n'émergeait quant à la sanction de la violation d'un pacte de préférence. C'est par l'arrêt du 26 mai 2006 que la chambre mixte de la Cour de cassation apporte cette solution. En l'espèce, Mme X se voit attribuer en 1957 un pacte de préférence concernant un bien immobilier ; près de vingt ans plus tard, une parcelle de ce même bien est transmise par donation à M. Ruini A, qui est informé du pacte de préférence, et revend cette même parcelle à la SCI Emeraude par acte notarié. Se prévalant d'une violation du pacte de préférence qui avait été attribué en 1957, Mme X demande sa substitution dans les droits de l'acquéreur ainsi que le paiement de dommages-intérêts.
L'affaire est portée devant la Cour d'appel de Papeete qui, le 13 février 2003, rejette la demande de substitution. Mme X et ses consorts se pourvoient alors en cassation, selon le moyen que : la réparation de la violation du pacte doit se faire en nature, les dommages et intérêts étant réservés aux cas où l'exécution en nature est impossible ; la violation du pacte de préférence entraîne l'inefficacité de la vente conclue avec le tiers ainsi que la substitution du bénéficiaire à ce dernier dans la vente, ce mécanisme étant le seul à permettre une exécution entière du contrat ; il ne peut pas y avoir subordination de la vente à l'existence d'une faute commise par l'acquéreur dans le cas où le pacte est valablement publié.
[...] Cependant, les juges de cassation vont rapidement nuancer leur solution en subordonnant la possibilité d'une substitution à la mauvaise foi des parties qui ont contracté malgré le pacte, en tort. Une substitution restreinte à la mauvaise foi des cocontractants en tort Si l'arrêt reconnaît bien la substitution comme sanction à la violation du pacte de préférence, c'est en réalité à une double condition de mauvaise foi du vendeur, mais aussi, et surtout du tiers-acheteur, dont la connaissance du pacte est essentielle. [...]
[...] Les juges ont en effet créé un véritable régime juridique de la responsabilité contractuelle qui va ultérieurement s'appliquer dans de nombreux cas : dès le 14 février 2007, la troisième chambre civile reprend mot pour mot, dans un arrêt de rejet, l'attendu de principe ainsi posé par les juges pour enfin accueillir l'action en nullité et la substitution de bénéficiaire. Le 3 novembre 2011, toujours en se fondant sur le principe posé, elle va admettre l'existence d'une forme de présomption de connaissance du pacte de préférence et de l'intention du bénéficiaire de s'en prévaloir lorsque le promettant et le tiers-acquéreur sont deux sociétés représentées par la même personne, fondant l'annulation du contrat. [...]
[...] Lorsque le tiers connaissait l'existence du pacte et l'intention du bénéficiaire de s'en prévaloir, ce dernier peut également agir en nullité ou demander au juge de le substituer au tiers dans le contrat conclu. » Ainsi, non seulement la pérennité de la solution admise dans le cas d'espèce est assurée par le législateur, mais encore ce dernier prévoit une protection supplémentaire du bénéficiaire du pacte qui, lorsque la mauvaise foi du tiers-acquéreur ne pourra être prouvée, pourra tout de même bénéficier d'une réparation. [...]
[...] La Cour de cassation, par le présent arrêt, retient donc une sanction à la violation d'un pacte de préférence à travers la substitution du bénéficiaire au tiers-acheteur, sanction cependant subordonnée à une mauvaise foi démontrée de la part de ce dernier. Cette solution est lourde de conséquences juridiques. II) La multiplicité des conséquences juridiques de la solution retenue Les conséquences de la solution retenue se font ressentir tant par le rôle conciliateur donné à la bonne foi que par la pérennité de la solution, notamment assurée par le législateur. [...]
[...] L'intérêt de cette interprétation est grand en matière de pacte de préférence : il s'agit en effet d'un véritable arrêt de principe qui consacre une sanction de la violation du pacte de préférence solution dont les conséquences juridiques sont multiples (II). La consécration d'une sanction de la violation du pacte de préférence Par cet arrêt, les juges de cassation consacrent une sanction de la violation du pacte de préférence à travers une admission claire de la substitution du bénéficiaire au tiers contractant tout en subordonnant cette dernière à la mauvaise foi des cocontractants en tort Une admission claire de la substitution du bénéficiaire au tiers contractant Parmi les avant-contrats destinés à préparer la conclusion d'un contrat se trouve le pacte de préférence, par lequel le propriétaire d'un bien s'engage, au cas où il vendrait ce bien, à le proposer en priorité au bénéficiaire du pacte. [...]
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