Cour de cassation chambre criminelle 22 mars 2016, préjudice écologique, accident environnemental, LPO Ligue pour la Protection des Oiseaux, rejet de substances nuisibles, article 1382 du Code civil, article L.142-2 du Code de l'environnement, Charte de l'environnement, responsabilité extracontractuelle, affaire Erika, atteinte environnementale, article L.162-9 du Code de l'environnement, déni de justice, préjudice collectif
En l'espèce, le 16 mars 2008, l'estuaire de la Loire se trouve pollué au fuel à la suite d'une rupture de tuyauterie de la raffinerie de Donges, raffinerie exploitée par la société Total raffinage marketing. Les juges du fond reconnaissent ladite société coupable de rejet en mer ou eau salée de substances nuisibles pour le maintien ou la consommation de la faune ou de la flore. La société est également reconnue coupable de reversement de substances entraînant des effets nuisibles sur la santé ou des dommages à la faune ou à la flore. Ainsi, les juges du fond condamnent la société responsable dudit accident environnemental à indemniser les collectivités territoriales et associations de leurs préjudices. Cependant, la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) interjette appel de cette décision, réclamant également une indemnisation pour leur préjudice. Le 27 septembre 2013, la douzième chambre de la Cour d'appel de Rennes déboute l'association de sa demande.
[...] En l'espèce, les juges du fond ont justifié la non-indemnisation de la LPO « par des motifs pris de l'insuffisance ou de l'inadaptation du mode d'évaluation proposé par la LPO ». Tout d'abord, cette motivation pose un véritable problème, ne pourrait-elle pas caractériser un déni de justice au sens de l'article 4 du Code civil ? C'est discutable, car il faudrait alors que les juges du fond aient reconnu un préjudice pour ensuite refuser de l'indemniser, toutefois, il n'en reste pas moins qu'on peut se questionner sur l'efficacité d'une justice qui se refuse à examiner l'étendue du préjudice présenté à elle par un demandeur. [...]
[...] La Cour d'appel reproche enfin à l'association le fait d'évaluer son préjudice sur la base de son budget annuel de la gestion de la baie dont il est question, et que ceci révèle que l'association – en l'espèce partie civile – confond son préjudice personnel et le préjudice écologique en confrontant ses frais de fonctionnement avec les dommages causés à l'environnement. Les juges, après avoir reconnu un préjudice écologique, peuvent-il ne pas indemniser une association ayant compétence particulière dans le domaine environnemental atteint au prétexte que les moyens par lesquels elle établit son préjudice semblent infondés en ce qu'ils confondent préjudices personnels et préjudices collectifs ? La Cour de cassation répond par la négative, ce au visa des articles 1382 du Code civil L. 142-2 du code de l'environnement [ . [...]
[...] Enfin, le fait que les préjudices soient appréciés au jour du jugement (Cour de cassation juillet 1943) aidera sans doute les juges, leur apportant un certain recul. On conçoit tout de même la faiblesse de cet argumentaire. La portée de la décision de la Cour de cassation est donc incertaine, au sens où, si sa décision est manifestement fondée, certaines problématiques entourent sa mise en œuvre, notamment dans l'appréciation des préjudices, ce qui aura une incidence sur le respect du principe de réparation intégrale du préjudice. [...]
[...] Dans l'affaire Erika, le juge déclarait indemnisable la collectivité territoriale touchée par l'atteinte environnementale, notamment parce qu'elle pouvait prouver qu'elle était la responsable du territoire dont il était question, et aussi parce qu'elle avait compétence en la matière environnementale. Les juges conciliaient atteinte aux intérêts collectifs et caractère personnel du préjudice en identifiant précisément la victime indemnisable. Seulement, reconnaître une collectivité territoriale comme victime d'un préjudice écologique semble, du moins dans un premier temps, plus évident que de reconnaître une association. En effet, les soupçons d'intérêts personnels empêchant la réparation du préjudice écologique envers elles peuvent se porter plus facilement sur les associations. [...]
[...] Une décision légitimée par l'encadrement du législateur On constate en l'espèce que la Cour de cassation rend sa décision au visa des « articles 1382 du Code civil L. 142-2 du code de l'environnement [ . ensemble les articles L. 161-1 et L. 162-9 du code de l'environnement ». Les textes de droit, en matière de responsabilité délictuelle, sont d'ordinaire peu nombreux, cette responsabilité ayant fait l'objet de nombreux développements prétoriens. Pourtant, en l'espèce, la Cour de cassation s'appuie sur des législations du Code de l'environnement. [...]
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