En l'espèce, une entreprise d'équipement en télécommunication avait conclu, en 1998 et 1999, six contrats de franchise avec le mandataire de la Société Française en Radiotéléphone (SFR). Ces contrats prévoyaient notamment, la perception par le franchisé d'une rémunération forfaitaire fixe, calculée à partir du nombre d'abonnements souscrits dans le point de vente, une rémunération variable, calculée à partir du chiffre d'affaires encaissé par SFR sur les abonnements souscrits par le distributeur et enfin, des primes et compléments en cas de renouvellement de téléphone mobile sans changement de ligne par un abonné SFR.
Chacune de ces conventions a été tacitement renouvelée jusqu'à ce que le franchiseur mette fin, en 2002 et 2003, à la reconduction de cinq d'entre eux et notifie la résiliation sans préavis du sixième. Suite à la mise en liquidation judiciaire de l'entreprise d'équipement, le liquidateur a assigné la société en paiement d'une indemnité pour perte de clientèle.
La Haute juridiction fut dès lors amenée à se demander si le franchisé pouvait bénéficier d'une indemnité compensatoire en raison de la perte de sa clientèle.
[...] En l'espèce, il semble que l'exploitant se soit appauvri en raison de la perte d'une partie de sa propre clientèle (3e Civ mars 2002, Trévisan), Mais à quelle partie la Chambre commerciale fait-elle référence ? En effet, il ne peut pas s'agir de la clientèle liée aux activités de souscription d'abonnements, car celle-ci n'est jamais attachée au distributeur mais à l'opérateur de téléphonie. Par conséquent, la seule clientèle dont le franchisé pourrait se prévaloir est celle avec laquelle il commerce de manière personnelle et indépendante, c'est à dire, la clientèle liée aux opérations de vente, d'entretien et de réparation du matériel de téléphonie mobile. [...]
[...] En l'espèce, la Chambre commerciale semble admettre l'existence d'un lien de causalité entre le fait du franchiseur et le préjudice du franchisé. L'arrêt précise en effet que La rupture du contrat stipulant une clause de non-concurrence était le fait du franchiseur, ce dont il se déduisait que l'ancien franchisé se voyait dépossédé de cette clientèle La rupture, par le franchiseur, du contrat stipulant la clause de non- concurrence serait ainsi, à l'origine de la perte de clientèle du franchisé. Un tel constat laisserait ainsi penser que, la simple rupture, même non fautive, du franchiseur, serait susceptible engager sa responsabilité sur le fondement de l'article 1371 du code civil. [...]
[...] Notamment, lorsque celui-ci n'exerce pas l'activité de vente et de prestation de service en cause. Son enrichissement pourrait, il est vrai, résulter de l'économie réalisée sur les commissions et autres rémunérations versées par le biais du contrat de franchise. Mais, il y a là encore un obstacle. Cet enrichissement peut être justifié par la fin naturelle des différents contrats (Com janvier 1994). De la même manière l'appauvrissement de l'exploitant se trouve lui aussi juridiquement causé par la fin des contrats de franchises et le non-effet de la clause de non-concurrence. [...]
[...] Dans le cas présent, l'article 1371 pourrait tout aussi bien être le vêtement juridique commodément choisi pour habiller un raisonnement autre (Philippe Stoffel-Munck). Depuis longtemps en effet, des voix s'élèvent pour étendre aux franchisés et concessionnaires le bénéfice d'une indemnité de clientèle. La Cour de cassation avait, effectivement, toujours refusé de leur octroyer une indemnité indépendante des dommages et intérêts dus en cas de rupture abusive de leur contrat de franchise ou de concession (Com mars 1976). L'arrêt du 9 octobre 2007 serait-il l'occasion de revenir sur ces positions ? [...]
[...] Aussi, bien que la Chambre commerciale ait effectivement statué au visa de l'article 1371 du code civil, cette dernière n'a pas jugé nécessaire de préciser à quel régime cette disposition faisait référence. Dès lors, plusieurs hypothèses peuvent être envisagées. Il semble, tout d'abord, peu probable que la Cour se soit fondée sur le mécanisme de la gestion d'affaire pour permettre l'indemnisation de l'exploitant. Un tel régime suppose, en effet, qu'une personne ait entrepris, de manière spontanée et sans en être chargée, des actes dans l'intérêt d'une tierce personne, Or, le franchisé certes, agi en faveur du franchiseur, en lui permettant d'étendre sa clientèle, mais cet élan de générosité n'est ni spontanée, ni désintéressé, il est le fruit d'un accord préalable entre les deux parties (3e Civ janvier 1999). [...]
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