Le 19 février 2013, M. Y a signé un acte dit "garantie à première demande" au profit d'une société (Cuisines design industries) aux termes duquel il s'engageait personnellement à verser une certaine somme d'argent au créancier dès réception d'une demande de paiement de sa part. L'entreprise de M. Y a fait l'objet d'une procédure collective finalement convertie en liquidation judiciaire. L'établissement créancier a déclaré ses créances au passif de l'entreprise et a par la suite assigné le gérant en exécution de son obligation personnelle. Le sens du jugement rendu au terme de cette première instance n'est pas précisé dans l'arrêt.
Par un arrêt rendu le 29 mars 2017, la cour d'appel de Toulouse a fait droit à la demande de l'établissement en exécution forcée de l'obligation et a mis à la charge du débiteur le versement de la somme déclarée dans le cadre de la procédure collective. Les stipulations contractuelles révèlent d'une part l'existence d'un engagement de payer du garant "autonome et indépendant" des relations contractuelles entre la société emprunteuse et celle accordant le crédit, d'autre part le déclenchement de l'obligation de paiement conditionné par le seul envoi de la demande par la société créancière. Elle considère en outre que M. Y était un cocontractant suffisamment averti à l'égard de l'établissement prêteur si bien qu'il ne peut demander à voir sanctionner un défaut de mise en garde par l'établissement prêteur.
[...] L'engagement personnel pris par le débiteur auprès d'un établissement, prêteur de deniers auprès d'un tiers en relation avec le débiteur doit-il être regardé comme un une garantie autonome du seul fait de la rédaction des clauses de l'acte ? Quelles garanties, écrites ou jurisprudentielles, sont respectivement reconnues à l'obligé (le débiteur de l'obligation) qui souscrit un cautionnement ou une garantie autonome ? Par un arrêt rendu le 30 janvier 2019, la chambre commerciale de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le débiteur et confirme les juges d'appels d'avoir, au terme de leur pouvoir souverain d'appréciation d'un acte ambigu, considéré que l'engagement du débiteur « n'avait pas pour objet la propre dette du débiteur, mais s'analysait en un appel motivé par l'inexécution par le débiteur de ses obligations, de sorte que le garant, à réception de cette demande, ne pouvait en différer le paiement ni soulever de contestation pour quelque motif que ce soit ». [...]
[...] Y aurait dû bénéficier d'une mise en garde : « aucune obligation de mise en garde » n'est due (par le prêteur) au profit du créancier bénéficiaire d'une garantie à première demande. Par cette décision, la Haute Juridiction a donc été amenée à se prononcer, à nouveau, sur les critères de qualification d'un acte intervenant en matière de sûretés personnelles : constitue-t-il une garantie autonome ou un cautionnement ? De cette réponse découlent un régime juridique différent et une protection asymétrique pour le débiteur de l'obligation de verser une somme d'argent La solution n'offre pas uniquement de concourir à clarifier l'état du droit en la matière, révélateur d'un renforcement des intérêts du crédit au détriment des emprunteurs : la Cour décide d'aller plus loin et, saisie du moyen au pourvoi tiré de violation de l'obligation de mise en garde, juge qu'un tel droit n'est pas invocable par le garant dans le cadre d'une garantie à première demande (II). [...]
[...] L'on comprend ainsi que le garant autonome est tenu de s'exécuter conformément aux stipulations et à l'économie du contrat (ces éléments servant par ailleurs à qualifier l'acte) : il est « pieds et poings » liés par les termes de son engagement alors que la caution a une capacité de résistance plus importante. Elle peut invoquer la nullité de l'obligation principale au même titre que le débiteur, car la caution a pour but de garantir le paiement de la dette principale. La garantie autonome à l'inverse ne permet pas d'élever de contestation face à la demande de paiement : « Le garant ne peut opposer aucune exception tenant à l'obligation garantie » selon la loi. [...]
[...] La décision de la Cour de cassation est particulièrement claire : dès lors que l'engagement consiste en une garantie autonome à première demande, le créancier n'est tenu à aucune obligation de mise en garde ou d'information à l'égard du débiteur. Une telle solution conforte encore plus la « logique » de droit réel qui imprègne cette sûreté : le débiteur n'a pas la possibilité de discuter des précautions prises ou non par le créancier prêteur (de même qu'il ne peut s'opposer à payer s'il reçoit l'ordre de le faire), car l'exécution de son obligation ne suppose pas autre chose que la formalisation d'une demande en ce sens Il faut donc voir dans cette décision un refus de la Cour de cassation d'étendre le droit à l'information ou à la mise en garde au profit du débiteur à une garantie autonome. [...]
[...] Mais la jurisprudence et la doctrine estiment que certaines règles du cautionnement doivent s'appliquer à la garantie autonome ( ) »[1]. Ainsi alors même que l'engagement est pris dans un contexte relativement similaire et a une fin identique, le débiteur à une garantie autonome ne bénéficie pas des mêmes droits et garanties. Il apparaît en effet que le cautionnement, dont le formalisme est défini à l'article L. 33-1 du code de la consommation, oblige le débiteur à payer une somme dont le montant est préalablement défini par les parties. [...]
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