Par acte du 23 avril 1971, un homme exerçant une activité de peinture en entreprise, s'est obligé envers ses deux coassociés (à une future société) à racheter, au plus tard le 30 avril 1975, les 200 actions à souscrire par chacun d'eux moyennant la somme de 20000 francs, ce dans la perspective de constituer une société anonyme au sein de laquelle le premier fait apport de son entreprise de peinture. S'agissant du prix de rachat de ces actions, les parties ont stipulé une clause d'indexation ainsi libellée : "compte tenu de l'activité de la société", le prix se déterminera "en tenant compte de la réévaluation en plus ou en moins de leur valeur nominale (…). Cette réévaluation sera calculée en fonction de la variation constatée au jour de l'achat du dernier index de construction" paru par rapport à celui d'avril 1971.
Les faits à l'origine de la saisine de la juridiction de première instance, de même que la solution rendue en première instance ne sont pas connus. L'on peut concevoir que les coassociés aient tenté d'obtenir le rachat des actions calculé conformément à la clause d'indexation par leur associé, lequel s'est opposé au paiement en contestant la validité de cette clause tant pour sa rédaction prétendument ambiguë que pour son contenu estimé contraire au droit du contrat des sociétés.
[...] Dalloz action Droit et pratique de la procédure civile, Chapitre 221 - La matière du procès et le principe dispositif – Georges Bolard ; Serge Guinchard – 2017-2018, n° 221 11 Répertoire de droit civil, Contrat : effets – Contenu du contrat – Gaël CHANTEPIE – Janvier 2018 (actualisation : Février 2020) n° 11 https://www.courdecassation.fr/publications_26/rapport_annuel_36/rapport_201 2_4571/livre_3_etude_preuve_4578/partie_1_objet_preuve_4579/preuve_fait_4581 /chapitre_2_denaturation_26208.html Répertoire de droit civil, Contrat : effets – Contenu du contrat – Gaël CHANTEPIE – Janvier 2018 (actualisation : Février 2020) n° 14 C. [...]
[...] L'interdiction pour le juge de statuer en équité Le contrat de société n'étant pas caractérisé, la demande tendant à censurer la clause de rachat sur le terrain du pacte léonin a été rejetée. En effet, dans son second moyen au pourvoi, l'acquéreur (débiteur à l'obligation de rachat) reprochait aux juges du fond de ne pas avoir annulé la clause qui offre aux coassociés (créanciers) le droit d'exiger en toutes circonstances l'exécution de l'obligation, en toutes circonstances, alors que l'article 1855 ancien prohibe les clauses léonines. [...]
[...] En effet, dès lors que l'acte souffre une quelconque ambiguïté dans sa formulation ou sa mise en œuvre, l'interprétation des clauses, c'est-à-dire « l'opération intellectuelle par laquelle on donne sens à un signe, un discours ou un écrit »[2] retrouve à jouer et s'impose même au juge. En ce sens, « Les parties sont les premiers interprètes de leur contrat, lorsqu'elles l'exécutent ou en débattent. Mais le juge, entendu largement ( . ) est l'interprète naturel du contrat en cas de litige. » La solution se justifie en droit positif au regard des dispositions de procédure civile selon lesquelles le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables (article 12 c. [...]
[...] Cette requalification du contrat par le juge trouve sa justification non seulement dans la recherche de la commune intention des parties, le contrat étant la loi (uniquement) des parties qui s'y obligent, mais aussi par l'obligation qu'a le juge, dans sa mission de trancher le litige conformément aux règles de droit, de « donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposé » (article 12 c. pr. civ.). La doctrine a souligné combien ce pouvoir de qualification et d'interprétation se rapproche participant d'une même opération intellectuelle, sans se confondre toutefois : « Quoique distinctes, les deux opérations relèvent principalement de l'activité intellectuelle du juge. À l'interprétation, qui vise à donner sens aux stipulations contractuelles, succède la qualification, qui permet de rattacher les contrats à des catégories juridiques, afin d'en déterminer le régime. [...]
[...] La clause ne supposant pas l'intervention du juge afin que celui-ci donne sens à ce qu'ont voulu dire les parties - elles l'ont déjà explicitement et clairement formalisé dans l'acte - les juges n'ont pas à se livrer à l'interprétation du contrat. La solution est conforme à la jurisprudence selon laquelle les clauses claires d'un contrat ne peuvent être interprétées par les juges du fond à peine de dénaturation de l'acte, ce que la Cour de cassation est susceptible de censurer si elle se trouve saisie d'un pourvoi dirigé contre une telle décision. [...]
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