Cour de cassation 1re chambre civile 8 décembre 2009, vente aux enchères, annulation d'une vente, erreur excusable, qualités substantielles d'un objet, errans, consentement, conclusion d'un contrat, commentaire d'arrêt
En l'espèce, lors d'une vente aux enchères, l'acheteur, professionnel du domaine, a refusé de payer le prix pour le bien, en alléguant son mauvais état. L'organisateur de la vente aux enchères a assigné l'acheteur en paiement de la somme de 2698,87 euros. La Cour d'appel a déclaré la vente parfaite. L'acheteur s'est pourvu en cassation. La Cour d'appel explique sa position par le statut de l'acheteur, ce dernier étant professionnel du domaine, il ne pouvait pas se tromper sur l'analyse de l'état du bien "que Mme X, exerçant une activité d'antiquaire au moment de la vente, est une professionnelle et connaissait parfaitement les précautions à prendre avant de se porter acquéreur d'un objet dont la vente est mise aux enchères ; qu'elle ne peut donc soutenir qu'elle a été victime d'une erreur".
[...] Heureusement, très tôt, la jurisprudence a admis la conception subjective de l'erreur, afin d'apprécier la notion de substance de la chose (V. en ce sens 16 mars 1898). Contrairement aux rédacteurs du Code civil qui, en 1804, n'avaient nullement défini la notion de substance de la chose , le législateur en 2016, remédié à cette carence en introduisant dans le Code civil un article 1133. Cette disposition prévoit désormais que les qualités essentielles de la prestation sont celles qui ont été expressément ou tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté . [...]
[...] La Cour de cassation vient de censurer la décision de la cour d'appel non sur la déclaration de la vente parfaite ou imparfaite ou sur la négation du caractère déterminant de cette dernière, mais notamment sur le fondement du raisonnement qu'elle avait eu. Les points de vue de la Cour de cassation et de la cour d'appel ont rencontré des divergences non seulement sur l'interprétation de l'existence de l'erreur, mais aussi sur le caractère excusable ou inexcusable de cette dernière. [...]
[...] La question posée à la Cour de cassation était donc la suivante : lors d'une vente aux enchères, l'acheteur, professionnel du domaine, peut-il obtenir l'annulation de la vente à cause d'une erreur commise sur les qualités substantielles de l'objet ? La Cour de cassation casse et annule la décision de la Cour d'appel, avec une réserve, sauf en ce qu'il a déclaré la société Sadde hôtel recevable en son action. La Cour de cassation explique que la qualité professionnelle de l'acquéreur ne signifie d'une manière automatique que ce dernier ne peut pas commettre une erreur, ainsi la Cour d'appel devait analyser si l'erreur existait et émettre ensuite une décision en se fondant sur l'existence de l'erreur qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme lui était demandé de le faire si, nonobstant sa qualité professionnelle, Mme X . [...]
[...] Donc, les juges de cassation indiquent que lors de l'analyse in concreto du caractère excusable ou inexcusable d'une erreur on se pose la question de ce que le contractant a cru ou aurait vraiment voulu. Par ailleurs, les juges de la Cour d'appel de Bordeaux, dans un arrêt de 15 mars 2004, n'admettent pas qu'un antiquaire réputé puisse invoquer l'erreur sur l'authenticité d'un meuble présenté comme l'œuvre d'un célèbre ébéniste, alors que la fausseté pouvait être facilement décelée sans examen approfondi et même par un amateur. [...]
[...] La Cour de cassation met en évidence que par ce raisonnement, les juges d'appel ont lié le caractère de l'erreur qui pourrait être excusable ou inexcusable, avec le statut professionnel de l'acheteur et avec les précautions que ce dernier aurait dû prendre, du fait de son expérience dans le domaine. En se fondant uniquement sur ces éléments, les juges d'appel constatent qu'elle ne peut donc soutenir qu'elle a été victime d'une erreur . En l'espèce, l'acheteur était un professionnel du domaine, exerçant une activité d'antiquaire au moment de la vente, donc, selon les juges d'appel il aurait pu prendre des précautions pour éviter cette erreur. [...]
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