Cour de cassation 3e chambre civile 6 mars 1996, sources du droit des contrats spéciaux, article 1134 ancien du Code civil, article 8 de la CEDH, droit d'héberger ses proches, jurisprudence, droit de jouissance, article 55 de la Constitution, ordre public, commentaire d'arrêt
Dans cette affaire, Mme Z avait conclu un contrat de bail d'habitation avec l'office public d'aménagement et de construction de Paris. Le bailleur considérait que l'immeuble devait être destiné à l'habitation personnelle et exclusive du preneur et de ses enfants. Ainsi, le contrat stipulait une clause qui interdisait au preneur de prendre toute initiative pouvant avoir pour objet ou pour effet de mettre le bailleur face à un autre occupant. Mme Z s'est vue alors interdire d'héberger des tiers dans l'appartement loué. Toutefois, cette dernière a hébergé, à titre permanent, sa soeur ainsi que M.Y, son ex-concubin et le père de ses deux enfants.
[...] Sans doute, est-ce aussi pour tenir en échec un des articles fondamentaux de la théorie des contrats en droit interne qu'est l'article 1134 c. civ. (ancien). Si la suprématie du droit d'héberger ses proches sur le contrat est clairement affirmée, un encadrement de ce droit n'en reste pas moins nécessaire, ce qui pose plus largement la question de l'encadrement de l'immixtion de la CEDH dans le droit des contrats spéciaux. L'encadrement nécessaire du droit d'héberger ses proches La Cour de cassation a respecté la hiérarchie des normes dans son raisonnement, protégeant ainsi les intérêts du locataire. [...]
[...] Cela le rend susceptible de s'appliquer non seulement au bail d'habitation, mais également à tout autre type de contrat. L'application de la CEDH en matière de bail d'habitation Le fondement utilisé repose sur la protection de la vie privée et familiale. Or, le logement est le lieu où se concentre, s'épanouit la sphère d'intimité. Par conséquent, il existe en matière de baux d'habitation d'autres clauses qui touchent directement au respect de la vie privée et familiale et dont l'effectivité devra être réétudiée. [...]
[...] Cet argument, soutenu par le Professeur Jamin, fut aussi approuvé par plusieurs auteurs, notamment le professeur Hauser, qui, lui, considère que le visa de l'article 9 du Code civil, relatif au droit de chacun au respect de sa vie privée, aurait certainement été suffisant. Pourquoi les juges ont donc préféré une disposition européenne à une disposition interne ? L'utilisation de l'article 8 §1 de la CEDH pourrait s'expliquer par sa primauté sur le droit interne et par son applicabilité directe. Ceci traduit alors une volonté des juges de donner davantage de valeur au droit d'héberger ses proches en le plaçant au rang des droits fondamentaux supranationaux. [...]
[...] La règle juridique ne peut constituer un frein à un élan d'hospitalité que cet arrêt assure. De plus, la pénurie de logements et la crise financière sont autant de raisons qui ont motivé le maintien de cette solution. Une solution contraire aurait été difficilement concevable. Le droit ne peut décourager un comportement solidaire. La Cour de cassation limite l'emprise du bailleur sur la vie personnelle du locataire . En outre, le bailleur semble suffisamment protégé par la règle selon laquelle le preneur doit répondre du fait des personnes de sa maison . [...]
[...] L'utilisation de ce principe, qui consiste à mettre en balance les intérêts des parties, aurait le mérite d'asseoir et de limiter les contours de la solution retenue. En effet, il est logique que le bailleur souhaite éviter une suroccupation des locaux. La surface du logement était à l'origine prévue et attribuée par l'OPAC pour une mère et ses enfants. Il serait légitime que le bailleur souhaite limiter et contrôler le nombre de personnes habitant dans le logement afin de limiter la multiplication des dégâts. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture