Cour de cassation, chambre civile, DDHC Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, Code Civil, usucapion, Conseil constitutionnel, droit de propriété, propriété immobilière, prescription acquisitive, protection du droit de propriété, ordonnance du 17 mars 2011, verus dominus, arrêt du 17 juin 2011
En l'espèce, l'une des parties à l'instance argue de l'inconstitutionnalité de la prescription acquisitive de la propriété immobilière au regard des dispositions de valeur constitutionnelle garantissant la protection du droit de propriété des justiciables.
Le défendeur étant inévitablement le possesseur dans le cadre d'une action en revendication, le demandeur en l'espèce, souhaitant protéger son droit de propriété acquis par publicité foncière, excipe d'une exception d'inconstitutionnalité des articles 2258 à 2275 du Code civil relatifs à la prescription acquisitive au regard du droit de propriété constitutionnellement garanti aux articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et introduit, de fait, un mémoire de question prioritaire de constitutionnalité. Par une ordonnance prise en date du 17 mars 2011 par le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Rodez, ladite question est transmise, selon la procédure usitée en matière de contrôle de constitutionnalité a posteriori, à la Cour de cassation pour qu'elle en apprécie sa conformité relativement aux conditions de renvoi au Conseil constitutionnel.
[...] De plus, lorsque la Cour énonce que la prescription acquisitive fait « correspondre le droit de propriété à une situation de fait durable, caractérisée par une possession », il peut être déduit de son raisonnement que la pureté du droit de propriété et sa véritable acquisition ne résident aucunement dans le titre foncier. De facto, l'usucapion est le seul des mécanismes qui puisse permettre d'acquérir le véritable droit de propriété, c'est-à-dire celui qui puise sa source dans la situation de fait. [...]
[...] En effet, le droit de propriété n'est pas réellement frappé de prescription extinctive, néanmoins, dès lors qu'une possession commence à exister sur ce même droit réel, alors un délai de dix ou trente ans commence à courir, délai au terme duquel le verus dominus pourra se voir dépossédé de son bien dans l'hypothèse où le possesseur faire valoir sa possession. Autrement écrit, dès lors qu'une possession naît, un délai de prescription extinctive commence implicitement à courir à l'encontre du verus dominus puisque son droit de propriété sera cruellement menacé une fois ledit délai arrivé à son terme. [...]
[...] La Cour de cassation use notamment de cet artifice lorsqu'elle précise que l'usucapion « n'a ni pour objet ni pour effet de priver une personne de son droit de propriété », sans affirmer la conséquence sous-jacente, à savoir que le possesseur se voit octroyer un droit de rang préférable sur la chose. Ce raisonnement offert par la Cour de cassation est trompeur, voire insidieux, en ce qu'il use des mots pour altérer le véritable sens de la prescription acquisitive, à savoir permettre la dépossession du verus dominus si ce n'est pas lui qui se prévaut d'une possession. [...]
[...] Ainsi, la Cour de cassation est légitimement arrivée à la solution selon laquelle la prescription acquisitive ne peut qu'être constitutionnelle en ce qu'elle porte une atteinte proportionnée au droit de propriété tout en assurant la protection de l'intérêt général. Néanmoins, si l'usucapion n'a pas vocation à priver le verus dominus de son droit de propriété, elle peut constituer un mécanisme préoccupant pour celui-ci. L'usucapion : un mécanisme aux effets procéduraux et pratiques comminatoires pour le droit de propriété acquis par publicité foncière Étant par essence deux systèmes d'acquisition de la propriété, l'usucapion et la publicité foncière sont amenées à se compléter, mais aussi à se concurrencer en fonction des circonstances. [...]
[...] Nonobstant, il en va autrement de l'hypothèse dans laquelle le possesseur n'est pas le véritable titulaire du droit de propriété. Cette situation est préoccupante et comminatoire pour le verus dominus en ce sens que si la possession est caractérisée par les juges du fond, alors celle-ci primera de manière inéluctable sur son simple titre de propriété. En effet, la publicité foncière ne permet que l'opposabilité aux tiers et donc in fine de trancher un litige dans lequel un tiers se prévaudrait d'un droit concurrent sur l'immeuble. [...]
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