absence de consensus, lien de causalité, responsabilité civile, injection d'un vaccin, Sanofi Pasteur MSD, réparation d'un préjudice, produit défectueux, consensus scientifique, article 1353 du Code civil, versatilité juridique
En l'espèce, une femme présente, quinze jours après la dernière injection d'un vaccin contre l'hépatite B, fabriqué par la société pharmaceutique Pasteur vaccins, des symptômes ayant amené au diagnostic d'une sclérose en plaques. Suite à une expertise judiciaire, elle assigne ladite société, devenue Sanofi Pasteur MSD, à fin d'indemnisation du préjudice subi. La juridiction de première instance ayant rendu un jugement inconnu, une des parties interjette appel. Par une décision de la Cour d'appel de Paris, rendue en date du 19 juin 2009, la femme est déboutée de ses demandes. En effet, la Cour n'y fait pas droit aux motifs que le vaccin en cause ne présentait pas les caractéristiques d'un produit défectueux d'une part, et qu'eu égard aux controverses scientifiques en la matière, un lien de causalité certain entre la vaccination et l'affection démyélinisant ne pouvait être raisonnablement déduit d'autre part. Cette dernière forme alors un pourvoi en cassation.
[...] C'est d'ailleurs cet aspect que la Cour de cassation tend, dans un premier temps, de mettre en avant, en précisant que « l'absence de consensus scientifique » en l'espèce n'a pu raisonnablement conduire à l'établissement « d'un lien de causalité entre la vaccination et les affections démyélinisantes ». Il est à comprendre dans cette première partie de la solution rendue par la haute juridiction que la matière scientifique, en plus de sa primauté, apparaît nécessaire à la détermination d'une corrélation certaine. De fait, la personne revendiquant un droit à réparation du dommage subi en raison d'un vaccin, estimé de produit défectueux, doit apporter la preuve dudit lien. [...]
[...] La Cour de cassation, en retenant prioritairement le consensus scientifique pour démontrer un lien de causalité suffisant, et à défaut, le jeu de présomptions graves, précises et concordantes, délinée une logique probatoire en principe favorable à la victime. Néanmoins, malgré cet effort en faveur de son indemnisation, il s'avère que ledit système établi présente certains écueils au détriment de la victime (II). Un système probatoire déficient Il convient de constater que, si la haute juridiction construit en principe un système favorable à la victime et à son indemnisation, naît en pratique un système probatoire déficient, caractérisé par une indemnisation, en l'espèce impossible et présentant un risque de versatilité juridique Une indemnisation en pratique impossible Si la Cour de cassation construit en théorie un système favorable à l'indemnisation de la victime en facilitant la preuve d'un lien causal, il faut constater à l'inverse que le rejet des présomptions en l'espèce conduit en réalité à une indemnisation quasi impossible. [...]
[...] En effet, la Cour n'y fait pas droit aux motifs que le vaccin en cause ne présentait pas les caractéristiques d'un produit défectueux d'une part, et qu'eu égard aux controverses scientifiques en la matière, un lien de causalité certain entre la vaccination et l'affection démyélinisant ne pouvait être raisonnablement déduit d'autre part. Cette dernière forme alors un pourvoi en cassation. Elle fait grief à l'arrêt litigieux de l'avoir déboutée de ses demandes en ne tirant pas les conséquences légales de ses constatations, sur le fondement des articles 1353 et 1147 du Code civil, interprété à la lumière de la directive CEE du 25 juillet 1985. [...]
[...] De même, en l'absence de motivation, la Cour ne semble pas préciser les contours de la notion complexe de « présomptions graves, précises et concordantes ». Celle-ci paraît d'ailleurs d'autant plus obscure suite au refus des éléments que la première chambre civile avait déjà approuvé. Il peut ainsi paraître étonnant que la cour reconnaisse en principe la possibilité d'une preuve par présomption et l'écarte a contrario dans l'arrêt commenté. Par ailleurs, l'impossibilité d'indemnisation est également traduite par la cour à travers le bouleversement d'analyse du triptyque, fait générateur, préjudice et lien de causalité entre les deux éléments précités, qu'elle effectue. [...]
[...] C'est en outre ce que démontre la controverse existante entre l'arrêt du 22 mai 2008 et la décision commentée, portant sur la qualification des présomptions graves, précises et concordantes. Or, les divergences jurisprudentielles tendent à compliquer un système probatoire, théoriquement efficace et favorable à la victime. Celui-ci ne trouve avec cet arrêt qu'une application difficile. Ce mécanisme est toutefois reconnu conforme aux droits européens à l'occasion d'une décision de la Cour de Justice de l'Union européenne rendue en date du 21 juin 2017. Suite à une question préjudicielle, la cour a admis la validité de la preuve par présomption ainsi que les indices retenus par les juridictions nationales. [...]
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