Empiétement d'une propriété, arrêt Costa contre ENEL, démolition d'une construction, sanction de destruction, droit de propriété, abus de droit, droit des biens
En l'espèce, des époux X propriétaires d'une parcelle cadastrée A758 ont conclu un acte d'échange de terrain avec leurs voisins, les époux Y également propriétaires de deux parcelles cadastrées A758 et A759. Les époux Y ont fait édifier une clôture sur leurs fonds. Les époux Y, en qualité de demandeurs, se sont plaints de débordements de végétaux provenant de la parcelle des époux X, défendeurs, et les ont assignés en respect des distances de plantation. Les époux défendeurs soutiennent re-conventionnellement que la clôture de leurs voisins, les époux demandeurs, empiète sur leur propriété et en demandent la démolition.
[...] Ainsi, il convient de s'interroger sur le sujet suivant : la construction d'un ouvrage par un tiers sur un fond voisin dont il pense être propriétaire de bonne foi peut-elle constituer un empiètement sur le terrain d'autrui ouvrant droit à destruction ? Dans un arrêt rendu en sa troisième chambre civile le 19 mai 2015, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris le 28 novembre 2013. En effet, la Haute juridiction judiciaire rend sa décision au regard du visa de l'article 545 du Code civil, précisant que « nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique » et estime que l'article 555 du Code civil n'est pas applicable dans le cas d'un empiètement d'un propriétaire sur la parcelle voisine, dont il n'est pas propriétaire. [...]
[...] L'affaire est par la suite portée devant la Cour d'appel de Paris qui, dans un arrêt du 28 novembre 2013, se prononce à son tour sur le litige. Celle-ci va considérer que la clôture objet du litige se trouve sur la parcelle A758, appartenant aux époux défendeurs et que les époux demandeurs pensaient être propriétaires de la portion de la parcelle sur laquelle a été construire la clôture au moment où celle-ci a été édifiée dans la mesure où ils ignoraient que l'acte translatif de propriété, à savoir l'acte d'échange, était nul en raison d'un vice. [...]
[...] Cela peut paraître excessif lorsque le tiers constructeur a agi dans une croyance erronée, mais légitime de sa propriété, comme en cas d'espèce. Néanmoins, la Cour de cassation milite ici en faveur du maintien d'un tel droit pour le propriétaire lésé. D'une part, seul l'intéressé est en mesure d'apprécier l'atteinte portée à sa jouissance paisible du fonds et à sa valeur patrimoniale. Or, la présence d'un ouvrage non autorisé est susceptible d'altérer durablement ces éléments. D'autre part, autoriser la rétention d'un bien édifié par erreur reviendrait à priver le véritable propriétaire d'une partie de ses prérogatives. [...]
[...] L'application de la sanction commune de la destruction L'opportunité de la destruction d'un bien édifié sur le sol d'autrui La Cour de cassation rappelle dans cet arrêt que le propriétaire d'un bien peut demander la destruction d'un ouvrage édifié sur son terrain par un tiers, même de bonne foi, ici s'agissant d'une clôture. Ainsi, au regard de l'article 545 du Code civil, il est possible pour le propriétaire d'exiger la destruction de l'ouvrage. Cette solution soulève la question de l'opportunité d'une telle mesure radicale. [...]
[...] L'empiètement se distingue très nettement de la construction sur sol d'autrui, réglementée par l'article 555 du Code civil, utilisé par la Cour de cassation dans sa solution. Ainsi, la construction sur sol d'autrui suppose une construction qui est totalement établie sur le sol d'autrui, alors que dans le cas d'un empiètement il ne s'agit que d'une construction partielle. L'empiètement est extrêmement fréquent en pratique, car la construction n'est pas une science exacte : il existe parfois des problèmes de bornage ou encore des erreurs de calcul. [...]
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