Cour de cassation, 3e chambre civile, 12 juillet 2000, no 98-23.171 - Le droit commun du bail

Extraits

[...] Il semble ainsi difficile d'imposer au bailleur des obligations dont l'exécution ne relève pas nécessairement de sa volonté. Est-ce qu'on peut considérer en l'espèce que le fait de louer le reste du local à un seul locataire dépend de la volonté du bailleur ? On aurait dit oui si la décision ne dépendait pas des circonstances de gestion financière et des anciens locataires qui ont quitté les locaux. De plus, la conclusion de tout contrat de bail dépend aussi de la volonté de l'autre partie potentielle. [...]

[...] Elle apporte ainsi une interprétation de l'article 1719 du Code civil à la lumière de l'article 1723 du même Code. Elle dessine une limite claire à l'obligation du bailleur d'assureur la jouissance paisible au preneur du bail. La limite de la jurisprudence étant expliquée, il convient d'en apprécier le contenu. L'appréciation de la limite jurisprudentielle Seront appréciées la conformité de la limite jurisprudentielle à la loi ainsi que ses conséquences sur les parties au contrat de bail La conformité de l'arrêt à la loi L'arrêt étudié est conforme tant au droit commun des contrats qu'au droit commun du bail La conformité au droit commun des contrats L'arrêt est conforme au principe de la liberté contractuelle qui empêche, a priori, d'obliger une personne de conclure un contrat contrairement à sa volonté ou d'être liée par une obligation qu'elle n'a pas voulue dans le contrat. [...]

[...] L'apport jurisprudentiel La jurisprudence antérieure et postérieure à l'arrêt commenté confirme que l'obligation d'assurer la commercialité du bien loué ne relève pas de la nature de l'article 1719 du Code civil. La reprise de la jurisprudence antérieure La juridiction de fond considérait, dans certains arrêts, qu'en matière de bail commercial, le bailleur est obligé d'assurer au locataire le bon exercice de son commerce. C'est ainsi qu'a jugé, à plusieurs reprises, la cour d'appel de Paris. La Cour de cassation, elle, prenait une position contraire. [...]

[...] La limitation prétorienne de l'obligation du bailleur d'assurer la jouissance paisible du bien Le rappel des fondements de l'arrêt est nécessaire pour mesurer l'apport jurisprudentiel à la loi Les fondements de l'arrêt Seront exposés les fondements explicites et implicites de l'arrêt Le fondement explicite L'arrêt ne fait que reprendre à la lettre les dispositions de l'article 1719, 3° du Code civil. Il confirme ainsi que la jouissance paisible relève de la nature du contrat de bail. Le bailleur est donc tenu de cette obligation en dépit de l'absence de toute clause particulière. L'arrêt apporte une précision au terme  jouissance paisible  en considérant que le fait de garantir la commercialité des locaux ne relève pas du champ de ce terme. Cette précision, implicite, ne concerne pas seulement le cas d'espèce. [...]

[...] Ce dernier peut donc garantir expressément qu'il maintiendra, la viabilité du centre pour toute la durée du bail. Une telle clause ne semble pas toutefois évidente. Elle dépend de la notoriété de la marque du preneur et de sa capacité économique de l'imposer au bailleur. En outre, pour éviter les abus, le bailleur peut recourir aux techniques de protection instaurées dans le droit commun des contrats et dans le droit commercial, telles que les dispositions concernant les clauses abusives ou celles relatives à l'abus de dépendance économique. [...]