Cour de cassation assemblée plénière 5 mars 2010, engagement unilatéral de volonté et ses effets, commentaire d'arrêt, ordonnance du 10 février 2016, Conseil des prud'hommes, licenciement abusif, ancien article 1370 du Code civil, article L225-2 du Code du commerce, article 1100-1 du Code civil
Avant d'être légalement consacrés par le législateur dans son ordonnance du 10 février 2016, l'existence même de l'engagement unilatéral de volonté et ses effets ont longtemps été débattus par la doctrine ; c'est sur ce point et sur son application en matière de droit du travail que s'est penchée, le 5 mars 2010, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation dans un arrêt rendu sur renvoi après cassation. M. et Mme X ont tous deux été employés en tant que concierges d'un immeuble par le syndicat des copropriétaires et ont été licenciés l'année d'après. Estimant que leur licenciement était non-conforme aux stipulations du règlement de propriété, ils saisissent le Conseil des prud'hommes.
Le litige est porté jusqu'à la juridiction suprême qui, le 16 mai 2007, casse l'arrêt rendu en seconde instance et renvoie l'affaire devant la Cour d'appel de Montpellier qui, le 14 mai 2008, condamne le syndicat des copropriétaires à verser dommages et intérêts au couple pour cause de licenciement abusif. Pour cela, elle retient notamment que la décision du licenciement prise par le syndicat était entachée par une irrégularité de fond tenant à l'absence de consultation de l'assemblée générale des copropriétaires, condition pourtant prévue par le règlement de copropriété.
[...] Il prévoit donc une consultation par le syndic de l'assemblée générale avant tout licenciement d'employé. Si une telle pratique est fréquente, elle n'est est pas pour autant obligatoire en droit du travail. Néanmoins, si la Cour de cassation ne rejette pas la possibilité de revenir sur une telle clause, elle estime que le fait qu'elle soit écrite dans un règlement et ne soit pas remise en cause ou arguée de nullité par l'employeur avant le licenciement revient à admette qu'elle constitue un véritable engagement de volonté vis-à-vis de l'assemblée, mais aussi des employés concernés, sur un certain formalisme à accomplir. [...]
[...] La décision de cassation relève donc d'une logique protectrice des droits du salarié. Si la juridiction suprême marque bien l'importance de son interprétation par la réunion de l'Assemblée plénière, c'est le législateur lui-même qui va permettre d'affirmer la pérennité de cette solution. Une pérennité de la solution assurée par le législateur À la suite de l'arrêt de principe ainsi rendu par la Cour de cassation, la jurisprudence a renforcé l'interprétation juridique qui donne force obligatoire à l'engagement unilatéral de volonté. [...]
[...] Si la force de l'engagement unilatéral s'est donc étayée à la suite de l'arrêt de 2010, il n'en restait pas moins que ce type d'acte n'était reconnu que de manière tacite par le législateur, ce qui laissait encore la possibilité aux auteurs de pouvoir douter de sa validité. Cependant, l'ordonnance du 10 février 2016 a enfin apporté une forme de consécration de l'engagement unilatéral de volonté puisque l'article 1100-1 du Code civil qu'elle modifie précise désormais en son alinéa 1 que les actes juridiques « peuvent être conventionnels ou unilatéraux ». L'engagement unilatéral est donc officiellement rattaché à la catégorie des actes juridiques : il en suit le régime, ce qui permet une « assurance légale » de la pérennité de la solution de cassation. [...]
[...] Le problème de droit qui se posait aux juges de cassation était donc le suivant : un salarié peut-il se prévaloir du non-respect d'un formalisme prévu par son employeur dans le cadre de son licenciement ? La Cour de cassation répond par l'affirmatif puisqu'elle rejette le pourvoi et affirme que, si l'enclenchement d'un licenciement par le syndicat des copropriétaires relève bien de sa compétence, en revanche « ce dernier devait néanmoins ( ) respecter le règlement de copropriété qui avait instauré une procédure d'autorisation préalable avant le licenciement du personnel du syndicat, laquelle n'avait pas été remise en cause, ni arguée de nullité par l'employeur comme contraire aux règles de la copropriété ( ) » et qu'ainsi « cette clause emportait engagement unilatéral du syndicat des copropriétaires ». [...]
[...] L'ancien article 1370 du Code civil énumérant les sources d'obligations ne mentionnait pas l'engagement unilatéral de volonté, et c'est ainsi qu'une approche littérale du droit a pu amener une partie de la doctrine à renier son existence. D'autres encore évoquaient le caractère grandement insécure de la pratique : la volonté pouvant défaire ce qu'elle fait, nombre d'auteurs ont considéré que l'engagement unilatéral de volonté constituait une technique très risquée pour les créanciers, dépourvue de toute sécurité juridique. Cependant si cette catégorie d'acte juridique était passée sous silence par le Code civil, on en retrouvait certaines traces dans d'autres textes, comme le Code du commerce dont l'article L225-2 régit la souscription d'actions, forme de promesse faite de prendre part à la société nouvellement créée. [...]
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