Cour de cassation assemblée plénière 13 janvier 2020, responsabilité extracontractuelle du contractant défaillant, convention d'assistance mutuelle, recours en paiement, article 1165 du Code civil, arrêt But Shop, faute, responsabilité délictuelle, commentaire d'arrêt
En l'espèce, à cause d'un incendie dans une centrale thermique exploitée par la société Compagnie thermique de Bois rouge, l'usine de Bois rouge, spécialisée dans la production de sucre, a dû arrêter son fonctionnement parce que la compagnie thermique l'alimentait en énergie. Pendant cette période, une autre usine spécialisée dans la production du sucre (usine du Gol) qui avait conclu une convention d'assistance mutuelle avec l'usine de Bois rouge a assuré le traitement de la canne qui aurait dû l'être par l'usine en panne.
L'assureur de l'usine du Gol, qui a dû indemniser son assurée, l'usine du Gol à cause de l'exploitation additionnelle à sa charge, a saisi dans l'exercice de son action subrogatoire, le tribunal afin de condamner la société tombée en panne et la compagnie thermique à lui rembourser l'indemnité versée.
Par un jugement du 13 avril 2015, le juge de première instance rejette sa demande. La Cour d'appel confirme, le 5 avril 2017, le jugement de la première instance. L'assureur s'est pourvu en cassation, le pourvoi étant renvoyé pour être examiné en Assemblée plénière.
[...] Selon la formule de Olivier Deshayes Le tiers bénéficie du meilleur des deux mondes (contractuel et extracontractuel) . Cela veut dire que le tiers tirent les bénéfices du contrat et les inconvénients ne le concernent pas. En dehors de cela, certains contrats prévoient parfois une limite en réparation, or cette limite ne s'appliquera pas sur le champ extracontractuel. Ainsi, on constate qu'il y a un vrai déséquilibre entre la situation du débiteur et du tiers. En l'occurrence, il est moins probable que la compagnie thermique aurait pu envisager que suite à l'inexécution contractuelle de fourniture d'électricité signée avec l'usine, lui sera imposé de payer une somme si astronomique. [...]
[...] Néanmoins, dans la présente affaire, les juges de cassation justifient cette position par le fait que si un dommage existe et un lien de causalité entre le dommage et l'inexécution contractuelle est constaté, alors il ne faut pas entraver l'indemnisation de ce dommage. Cette approche des juges confirme une ancienne jurisprudence en la matière, notamment l'arrêt But Shop du 6 octobre 2006 selon lequel le tiers à un contrat peut invoquer sur le fondement de la responsabilité délictuelle un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage . Cet arrêt marque l'avènement du principe d'identité des fautes contractuelles et extracontractuelles : toute inexécution contractuelle est une faute extracontractuelle. [...]
[...] En effet, autoriser le tiers à invoquer une simple faute contractuelle revient à lui permettre de réclamer à son profit le bénéfice d'un contrat auquel il n'est pas partie. Ces inconvénients se manifestent encore plus lorsqu'on est en présence d'une obligation de résultat pour laquelle l'assimilation à une faute extracontractuelle apparaît comme encore plus dénuée de sens puisque ne pas fournir le résultat contractuellement convenu n'implique aucun manquement au devoir général de ne pas nuire à autrui Or, en l'espèce il s'agissait bien d'une obligation de résultat, notamment le fait de fournir de l'électricité. [...]
[...] En effet, cette réaffirmation de la jurisprudence But Shop par les juges de cassation rend la situation du débiteur incertaine. Bien que la réforme de la responsabilité civile vienne avec une solution, notamment dans son article 1234 distinguant le tiers qui a un intérêt légitime à la bonne exécution du contrat qui a le choix entre la responsabilité contractuelle et extracontractuelle et les autres tiers qui ont l'obligation d'exercer une action en responsabilité extracontractuelle en prouvant la faute extracontractuelle du débiteur contractuel. [...]
[...] cit) a vu dans cette formule de la Cour de cassation le fait de gommer la distinction entre faute contractuelle et faute extracontractuelle ou plutôt de confondre inexécution contractuelle et faute contractuelle. La faute contractuelle est le fait de ne pas exécuter une obligation née du contrat. Or tout manquement à une obligation ne caractérise pas la violation du devoir général de ne pas nuire à autrui, c'est-à-dire un devoir général de conduite sociale dédié à la protection de tous, fondement de la responsabilité extracontractuelle. [...]
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