La jurisprudence a pendant longtemps conduit à une irresponsabilité civile de fait des dirigeants et gérants sociaux. Pour palier à cela, la Cour de Cassation a fait appel à la notion de faute séparable ou détachable. Cela signifie que pour que la responsabilité d'un dirigeant soit engagée, il est nécessaire de prouver que ce dernier ait commis une faute séparable de ses fonctions ; nous en avons un dans exemple dans l'arrêt que nous nous proposons de commenter.
Dans cet arrêt, rendu le 9 juin 2004 par la chambre commerciale, une société anonyme s'était portée caution d'une autre société sous la signature de son président du conseil d'administration.
A la suite de la défaillance du débiteur principal, l'action en paiement des bénéficiaires de la garantie a été rejetée au motif que le cautionnement n'avait pas été autorisé par le conseil d'administration. Les créanciers garantis effectuent alors une demande en responsabilité contre le président du conseil d'administration, demande rejetée par a cour d'appel de Rouen.
Il forme alors un pourvoi en cassation soutenant que l'inopposabilité à la société de l'engagement de caution laisse subsister à la charge du signataire une obligation personnelle d'exécuter l'engagement.
La Cour de cassation rejette le pourvoi dans la mesure où l'absence de faute séparable des fonctions de président du conseil d'administration suffisait à justifier légalement la décision de la cour d'appel.
Par cet arrêt la chambre commerciale devait savoir si l'engagement de caution pris par le président d'un SA sans autorisation du conseil d'administration pouvait engager la responsabilité de celui-ci. La Cour répond par la négative et rejette donc la possibilité pour les créanciers garantis d'obtenir une quelconque réparation, cette solution utilise la théorie de la faute détachable pour engager la responsabilité du dirigeant (1) ce qui aboutie à une solution critiquable par son impact sur les tiers (2).
[...] Malgré cela, la Cour de cassation a confirmé dans notre arrêt alors même sa position par rapport à la question du cautionnement donné sans pouvoir par un dirigeant alors même qu'elle reconnaît que ce dernier commet une faute en ne vérifiant pas qu'il détient l'aptitude de consentir des cautionnements au nom du groupement, mais celle-ci n'est pas séparable des fonctions. On peut donc dire que cette jurisprudence des cautionnements résiste et aussi important qu'il soit, l'arrêt du 20 mai 2003 n'y change rien. [...]
[...] Une solution discutable aux vues de ses conséquences sur les tiers Après avoir vu que cet arrêt est critiquable car l'application de la théorie de la faute a des conséquences néfastes lorsqu'elle est appliquée au cautionnement , nous essayerons d'envisager une autre solution. A. Les conséquences néfastes de la faute détachable en matière de cautionnement. La solution de la Cour dans notre arrêt n'est pas nouvelle puisque nous l'avons vu la chambre commerciale a déjà estimé (Cass. com. 20octobre 1998 Cass. [...]
[...] 1382) mais la Cour de cassation se borne à le remplacer dans ses visas par les dispositions spéciales du droit des sociétés commerciales. Cette constante référence au code du commerce peut néanmoins s'expliquer par la durée de la prescription : en effet la jurisprudence introduisant la notion de faute détachable avait pour objet de réduire la responsabilité civile des dirigeants au profit de la responsabilité de la société. Dès lors, il peut être logique que cette action soit soumise au délai de prescription de trois ans prévu par le code du commerce afin de ne pas faire peser une menace trop longue sur ceux-ci. [...]
[...] La Cour de cassation, le 9 juin 2004, confirme l'absence de recours en cas de cautionnement non approuvé par le Conseil d'administration La jurisprudence a pendant longtemps conduit à une irresponsabilité civile de fait des dirigeants et gérants sociaux, pour pallier à cela la Cour de cassation a fait appel à la notion de faute séparable ou détachable. Cela signifie que pour que la responsabilité d'un dirigeant soit engagée, il est nécessaire de prouver que ce dernier ait commis une faute séparable de ses fonctions ; nous en avons un par exemple dans l'arrêt que nous nous proposons de commenter. [...]
[...] On sait que lorsque le cautionnement a été accordé sans autorisation du conseil d'administration (ou de surveillance), ou hors délai, celui-ci est inopposable à la société, qui ne peut donc être engagée par cet acte. De plus le créancier ne peut même pas invoquer une éventuelle approbation de l'acte par la société après sa signature ou encore un début d'exécution du cautionnement par celle-ci pour obtenir que l'acte soit opposable à la société. Son seul recours reste donc d'exercer une action en responsabilité contre le dirigeant qui a signé l'acte de cautionnement au mépris des prescriptions légales mais, comme nous l'avons vu, en pratique, ses chances de succès sont bien minces et c'est pourquoi les auteurs sont nombreux à rechercher d'autres solutions. [...]
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