Si en droit des biens le démembrement de la propriété semble ne poser aucune difficulté particulière, sur le terrain du droit des sociétés en revanche il en va autrement. Appliquer aux droits sociaux, le démembrement du droit de propriété revient à repartir les prérogatives de la société sur 2 individus. C'est de là que vient toute la confusion.
Ainsi l'arrêt de la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation du 29 novembre 2006 nous éclaire à ce sujet.
Les faits de l'espèce sont les suivants : Mme B a consenti deux baux ruraux à Mme Z et Mme A, s'engageant solidairement, qui l'ont par la suite informée de leur intention de mettre les terrains en cause à la disposition de la société civile de laquelle elles étaient cogérantes et coassociés. Néanmoins il est établi qu'au jour où est intervenue cette divulgation l'une des deux associés avait déjà cédé la nue-propriété de toutes ses parts sociales à un tiers. De sorte que les consorts de la bailleuse ont demandé en justice la résiliation des deux baux.
Cette demande ayant été accueillie par la cour d'appel, les deux preneuses à bail se sont pourvues en cassation.
Selon le pourvoi si le locataire, qui entend apporter à une société d'exploitation un bail, doit avoir la qualité d'associé, il suffit en cas de copreneurs que l'un des deux ait cette qualité.
De plus si l'un d'entre eux perd cette qualité en cours de bail, cette perte ne portera en aucun cas préjudice au bailleur dès lors que chacun d'entre eux est tenu des obligations nées du bail, indépendamment du fait qu'une société soit en cause.
Enfin le pourvoi s'appuie sur le fait que l'usufruitier conserve de nombreuses prérogatives attachées à la qualité d'associé pour soutenir qu'il n'y a, de fait, aucune erreur dans le consentement du bailleur.
Par conséquent la Cour de Cassation était amenée à répondre au problème de droit suivant : pouvait-on considérer que le fait de ne pas dévoiler sa qualité d'usufruitier de parts sociales, lors d'un acte impliquant la société, était de nature à induire en erreur le cocontractant ?
La solution que la Cour de Cassation est très nette, elle confirme la décision de la cour d'appel en estimant que la preneuse a induit le bailleur en erreur en se prévalant de la qualité d'associé, et ce, quelle que soit l'étendue du droit de vote accordée à l'usufruitier par les statuts.
Cet arrêt d'espèce nous amène dès lors à déterminer dans quelle mesure la non-divulgation de la qualité d'usufruitier de parts sociales, lors de la conclusion d'un acte impliquant la société, est de nature à vicier le consentement du cocontractant.
Pour ce faire, nous constaterons d'abord le refus d'accorder la qualité d'associé à l'usufruitier de parts sociales (I), puis nous relèverons les conséquences de ce refus au regard des pouvoirs de l'usufruitier dans la vie sociale (II).
[...] Ainsi, l'arrêt de la 3ème chambre civile de la Cour de cassation du 29 novembre 2006 nous éclaire à ce sujet. Les faits de l'espèce sont les suivants : Mme B a consenti deux baux ruraux à Mme Z et Mme s'engageant solidairement, qui l'ont par la suite informée de leur intention de mettre les terrains en cause à la disposition de la société civile de laquelle elles étaient cogérantes et coassociés. Néanmoins, il est établi qu'au jour où est intervenue cette divulgation l'une des deux associés avait déjà cédé la nue-propriété de toutes ses parts sociales à un tiers. [...]
[...] En revanche, la liberté contractuelle n'est pas totale et les statuts ne sont pas en mesure de priver l'usufruitier de toute participation à la vie sociale. Ainsi, la Cour de cassation a jugé (Cass. Com mars 2004) que la clause des statuts qui prive l'usufruitier du droit de voter les décisions concernant les bénéfices, subordonne à la seule volonté du nu- propriétaire le droit d'user de la chose grevée d'usufruit et d'en percevoir les fruits, alors que l'article 578 du Code civil attache à l'usufruit ces prérogatives essentielles. [...]
[...] Néanmoins, la Cour de cassation a tranché en accordant cette qualité au seul nu-propriétaire. En l'espèce, la Cour de cassation conserve sa position puisqu'elle établit qu'en se déclarant associé à son cocontractant l'usufruitier induit celui-ci en erreur, et ce, quelle que soit l'étendue du droit de vote que lui accordent les statuts. A fortiori, quelle que soit l'étendue des droits accordés à l'usufruitier par les statuts, celui-ci n'a jamais la qualité d'associé. L'impossibilité de dérogations statutaires La 3ème chambre civile de la Cour de cassation précise bien, en l'espèce, que l'usufruitier n'a pas la qualité d'associé, et ce, quelle que soit l'étendue du droit de vote accordé à l'usufruitier par les statuts En effet l'art 1844 alinéa 1 dispose que tout associé a le droit de participer aux décisions collectives. [...]
[...] On voit donc que l'on ne peut supprimer totalement le droit de vote de l'usufruitier. Néanmoins, on peut augmenter celui-ci, mais cette prérogative ne donnera pas pour autant la qualité d'associé à l'usufruitier. Ainsi, l'arrêt met en évidence que l'usufruitier ne pouvait avoir la qualité d'associé quelles que soit les prérogatives qui pouvaient lui être attribuée par les statuts et que, de fait, le bailleur avait était induit en erreur de par l'affirmation contraire, même si le pourvoi soutient que cet élément n'était pas de nature à lui causer un préjudice. [...]
[...] Cette combinaison accroît les prérogatives de l'usufruitier, or dans la société civile les associés déterminent librement dans les statuts les pouvoirs du gérant. De fait à l'égard des tiers le gérant va engager la société par les actes entrant dans l'objet social (article 1849 du Code civil), toutes les clauses statutaires limitant ces pouvoirs sont inopposables au tiers. L'objet social constitue la seule limite au pouvoir du gérant, d'où l'intérêt de le définir de façon précise dans les statuts. A l'égard des associés en revanche, en l'absence de clauses statutaires, le gérant peut effectuer tous les actes de gestion que requiert l'intérêt de la société (art 1848 du Code civil). [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture