Cour de cassation 3e chambre civile 26 septembre 2012, promesses de vente, vente d'un immeuble, indemnité d'immobilisation, acte authentique, article 1589 du Code civil, promesse unilatérale de vente, absence de faute, contrat synallagmatique, commentaire d'arrêt
Les faits soumis à l'intention de ladite juridiction sont les suivants, la société Dr Cap Corniche (la société promettante) a proposé une promesse unilatérale de vente d'un immeuble à la société bénéficiaire dénommée France Invest Ans. La promesse unilatérale a été conclue par acte sous seing privé du 4 avril 2007 qui prévoyait la vente de l'immeuble et le versement d'une indemnité d'immobilisation par la société bénéficiaire en cas de défaut de signature dans les délais. La société bénéficiaire n'a pas signé l'acte authentique dans le délai de la promesse, de fait, un litige est né entre le promettant et le bénéficiaire.
[...] Mais elle reproche à la Cour d'appel de ne pas énoncer l'article 1589 du Code civil relatif à la promesse synallagmatique, ne donnant pas de base légale à sa décision alors que le principe est simple. Ainsi, c'est l'acceptation par le bénéficiaire de la promesse unilatérale d'une indemnité d'immobilisation presque équivalente au prix de vente qui justifie la promesse synallagmatique, car il y a finalement accord sur la chose et sur le prix. Pourtant, force est de reconnaitre qu'aujourd'hui cette décision de requalifier une promesse unilatérale de vente en promesse synallagmatique du fait d'un montant trop élevé de l'indemnité d'immobilisation est encore l'objet de débats jurisprudentiels puisque la jurisprudence de la Cour de cassation a toujours été très vacillante sur le sujet. [...]
[...] Il convient alors pour mieux comprendre la décision des juges de préciser la nature de cette indemnité. Cette dernière consiste en un « prix de l'exclusivité » qui sonne comme une rémunération de l'obligation de ne pas faire du promettant. C'est donc une indemnité que le bénéficiaire s'engage à verser en contrepartie du geste du promettant pour avoir « immobilisé » le bien en sa faveur. Ainsi l'indemnité d'immobilisation milite en faveur du propriétaire qui a attendu et proposé exclusivement le bien au bénéficiaire de la promesse. [...]
[...] Ce raisonnement fut alors confirmé en février 1978[3] puis en avril 1989[4]. Cependant, la solution a ensuite complètement changé avec un revirement de jurisprudence comme en témoigne un arrêt du 1er décembre 2010[5], on aurait alors pu en déduire que l'importance de l'indemnité prévue entre les parties n'influence en rien la qualification de la promesse alors que dans l'arrêt de 2010 l'indemnité était presque aussi forte que le prix de l'immeuble. Mais c'était sans compter sur le présent arrêt qui relança les débats. [...]
[...] La Cour de cassation confirme donc le raisonnement de la Cour d'appel qui a été de déduire l'absence d'engagement du bénéficiaire à acheter le bien. Ceci reste toujours compréhensible puisque dans le cas d'une promesse unilatérale de vente, le bénéficiaire n'est pas lié, il n'est pas obligé d'acheter, en revanche, comme c'est le cas en l'espèce, il doit indemniser le promettant par une indemnité d'immobilisation s'il ne lève pas l'option dans le délai ou s'il omet de lever l'option. Le cœur de cet arrêt repose alors sur ce délai laissé au promettant pour lever l'option, si un tel délai existe le promettant n'a pas l'obligation de mettre en demeure le bénéficiaire de prendre parti. [...]
[...] - Selon le 2e moyen, pour rejeter la demande, la Cour d'appel retient que le bénéficiaire n'ayant souscrit aucune obligation d'acquérir, il n'avait pas pu commettre de faute. La Cour de cassation devait donc répondre à la question suivante, une indemnité d'immobilisation trop élevée par rapport au prix de vente stipulé dans la promesse unilatérale de vente a-t-il pour conséquence d'emporter la requalification de ladite promesse en contrat synallagmatique bien que le bénéficiaire n'eût souscrit aucune obligation d'acquérir ? À cette question, la Cour de cassation répond très clairement en cassant et en annulant l'arrêt d'appel au visa de l'article 1589 du Code civil et au motif que c'est le prix trop élevé de l'indemnité d'immobilisation par rapport au prix de vente qui permet de requalifier la promesse unilatérale en contrat synallagmatique, ceci malgré l'absence d'engagement de la part de l'acquéreur. [...]
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