Cour de cassation 2e chambre civile 21 décembre 2006, force majeure, responsabilité délictuelle, commentaire d'arrêt, article 1384 alinéa 1er du Code civil, responsabilité du fait des choses, exonération de responsabilité, éléments constitutifs de la force majeure, faute de la victime, responsabilité de la SNCF
La responsabilité de la SNCF vis-à-vis de ses voyageurs a été au coeur d'un important contentieux, et les solutions strictes de la Cour de cassation ont suscité une vive critique doctrinale. Par son arrêt en date du 21 décembre 2006, la Deuxième Chambre civile de la Cour de cassation fait encore une fois preuve de sévérité en rejetant l'exonération de responsabilité de la SNCF par la force majeure, dont elle clarifie implicitement les éléments constitutifs.
En l'espèce, un voyageur n'ayant pas de titre de transport (ce qui explique que le fondement de l'action soit bien la responsabilité délictuelle) force le système de sécurité d'une porte du train, et saute hors du train pour échapper aux contrôleurs. Il se blesse dans sa chute.
Le voyageur assigne alors le transporteur ferroviaire en référé, afin d'obtenir notamment une indemnisation provisionnelle. Le juge des référés accorde la provision. Cependant, la Cour d'appel déboute ensuite le voyageur de sa demande de provision au motif que le comportement du voyageur aurait le caractère de la force majeure, exonérant ainsi le transporteur de toute responsabilité.
[...] Un pourvoi en cassation est alors formé, vraisemblablement par le voyageur blessé, qui souhaite obtenir une indemnité provisionnelle. La Cour de cassation devait alors s'interroger sur le point de savoir si un cas de force majeure peut être caractérisé lorsqu'un voyageur se blesse en sautant d'un train après avoir forcé un système de sécurité, exonérant par conséquent totalement le transporteur ferroviaire de sa responsabilité. Elle répond par la négative, et casse l'arrêt attaqué, au visa de l'article 1384 alinéa 1er du Code civil (qui pose le principe de la responsabilité du fait des choses). [...]
[...] Ainsi, s'il est depuis longtemps admis qu'un fait de la victime peut entraîner une exonération partielle de responsabilité, à condition qu'il soit fautif, l'hésitation était permise dans le cas spécifique du transporteur ferroviaire. Cependant, les parties en l'espèce n'avaient pas invoqué l'exonération partielle sur le fondement de la faute de la victime. Par conséquent, la Cour de cassation ne se prononce pas explicitement sur cette exonération partielle. On ne sait donc pas vraiment si les faits d'espèce auraient permis une telle exonération. Le doute reste permis, cette jurisprudence n'établissant pas clairement la possibilité de l'exonération partielle, mais ne faisant que la sous-entendre. [...]
[...] La Cour de cassation apprécie strictement l'existence d'une force majeure lorsque la responsabilité d'un transporteur est en jeu. Ainsi, la Cour de cassation avait déjà refusé l'exonération de la SNCF dans le cas d'un voyageur blessé alors qu'il se tenait trop près du bord du quai à l'arrivée du train (Cass. Civ juin 1998), d'un voyageur descendu d'un train en marche (Cass. Civ février 2003), ou encore dans le cas d'une personne s'étant engagée dans un passage à niveau alors que les barrières étaient baissées (Cass. [...]
[...] Cour de cassation, 2e chambre civile décembre 2006 - Force majeure et responsabilité délictuelle La responsabilité de la SNCF vis-à-vis de ses voyageurs a été au cœur d'un important contentieux, et les solutions strictes de la Cour de cassation ont suscité une vive critique doctrinale. Par son arrêt en date du 21 décembre 2006, la Deuxième Chambre civile de la Cour de cassation fait encore une fois preuve de sévérité en rejetant l'exonération de responsabilité de la SNCF par la force majeure, dont elle clarifie implicitement les éléments constitutifs. [...]
[...] Cette hésitation était permise dans la mesure où le Code civil, avant la réforme du droit des contrats de 2016, ne donnait aucune définition de la force majeure, qui n'avait été définie que par la doctrine et la jurisprudence. La conception classique de la force majeure, requérant la réunion de trois caractéristiques (l'extériorité, l'irrésistibilité, et l'imprévisibilité du fait en question), pouvait donc être remise en cause. Cette divergence a été tranchée par deux arrêts d'Assemblée plénière de la Cour de cassation du 14 avril 2006, l'un rendu en matière de responsabilité contractuelle, et l'autre en matière de responsabilité délictuelle : dans les deux cas, la Cour de cassation exige la caractérisation de l'irrésistibilité et de l'imprévisibilité pour admettre la force majeure. [...]
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