Cour de cassation première chambre civile 24 septembre 2009, commentaire d'arrêt, affaire du distilbène, preuve du dommage, préjudice médical, causalité juridique, responsabilité des laboratoires, objet du dommage, directive du 25 juillet 1985, présomption d'imputabilité, article 1645 du Code civil, système de responsabilité alternative, réparation in solidum
Le 24 septembre 2009, la Cour de cassation, en sa première chambre civile, a consacré une décision à la question de la détermination causale d'un préjudice médical. En l'espèce, une femme est atteinte d'un adénocarcinome à cellulaires claires du col utérin. La demanderesse a été en justice contre ces deux laboratoires fabricants d'une hormone de synthèse appelée le distilbène. Il leur est fait grief d'être les fabricants du produit à l'origine du développement de ces cellules cancéreuses. La Cour d'appel de Versailles a débouté la demanderesse de sa demande par un arrêt du 10 avril 2008, aux motifs que : il ne peut y avoir d'action collective à l'encontre des deux laboratoires du seul fait qu'ils soient effectivement les deux seuls fabricants du produit suscité.
En effet, le lien causal n'est pas démontré entre la survenance du dommage et son fait générateur allégué qui serait le distilbène. Aucun élément de preuve ne permettait de distinguer si le distilbène avait été fabriqué par l'un ou l'autre des laboratoires. La question de droit que la Cour de cassation devait trancher était la suivante : "Les fabricants potentiels d'un produit défectueux, en l'absence d'un raisonnement scientifique permettant de déterminer effectivement lequel d'entre eux a livré le produit défectueux à la victime, doivent-ils rapporter eux-mêmes la preuve de l'absence d'un lien de causalité pour s'exonérer de leur responsabilité ?".
[...] Jourdain, R.T.D., Civ P Cass., Civ., 1re sept n° : 08- 16.097 & Cass., Civ., 1re mars 2006, n° : 04- 16.179 & P. Delebecque, D P T.G.I. Nanterre mai 2002, R.T.D. Civ & C.A., Versailles avril 2004, D note A. Gossement. P. Brun, D p & J. Peigné, R.D.S.S., p Transposée par Loi n°98-389 du 19 mai 1998 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux. P. Brun, D p & P. Delebecque, D P & Cass., Civ., 1re mars 2006, n° : 04- P. [...]
[...] Peigné, R.D.S.S., p « Ce texte [ ] pourrait apporter une solution dans bien d'autres situations, en particulier en cas de dommages causés par un produit distribué par quelques entreprises, toutes identifiés, lorsqu'on ne peut établir laquelle d'entre elles a vendu le produit même qui est à l'origine des préjudices subis par les victimes. », (Rapport Catala, septembre 2005) P. Jourdain, R.T.D., Civ P Cass., Civ., 2e sept n° : 13- Ulpien, Digeste P. Malaurie, L. Aynès et P. Stoffel-Munck, Les obligations, Defrénois, 4e éd., n° 210. Système de vengeance privée qui prévalait particulièrement au nord de la France, la loi salique a tenté d'y mettre un terme par la compensation pécuniaire. P. Jourdain, R.T.D., Civ P J. Peigné, R.D.S.S., p Art du Code de procédure pénale. Idem. [...]
[...] D'autres indices probants peuvent être efficacement rapportés tels que : « la proximité temporelle [ ] l'absence d'antécédents neurologiques [ ] l'absence d'autres causes potentielles »[26]. Dès lors, cette présomption d'imputabilité est pour le moins conditionnée. La doctrine a relevé avec justesse que l'objectif indemnitaire de la jurisprudence ne conduit pas à une « condamnation systématique des laboratoires »[27]. Cet usage des présomptions, bien qu'il soit davantage légitime lorsque le législateur lui-même en dispose n'a : « [ ] rien d'hérétique en droit, mais qu'en outre l'équité commande »[28]. Il semblerait que ces présomptions soient utiles pour pallier les insuffisances scientifiques. [...]
[...] La doctrine a relevé avec justesse cette difficulté de constituer une preuve de l'exposition directe entre le fait générateur et la victime : « [les victimes] n'en sont pas moins, dans l'absolu, priées « d'exhumer » des ordonnances médicales au mieux trentenaires »[7]. Il est possible de se questionner, d'autre part, sur la non-invocation de la directive du 25 juillet 1985 relative au produit défectueux[8]. Les faits ayant été antérieurs à la transposition de la directive, c'est sous l'empire du droit commun que les plaideurs se sont affrontés. [...]
[...] Ce type de régime est tout à fait unique en droit français. Il repose comme il l'a été souligné, sur un principe de présomption d'imputabilité, à charge pour les mis en cause de démontrer leur absence de responsabilité. Il s'agit alors de démontrer pour les laboratoires fabricants, non pas que leur produit n'est pas défectueux, puisque le caractère défectueux était un préalable à la mise en cause de leur responsabilité, mais que le produit incriminé n'a pas été produit par eux. [...]
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