Cour de cassation 1re chambre civile 20 janvier 2010, sociétés sans personnalité morale, concubinage, affectio societatis, sécurité juridique, article 1871 du Code civil, article 1832 du Code civil, projet de vie commune, commentaire d'arrêt
Si la société créée de fait est un mécanisme permettant au concubin délaissé d'être indemnisé du fait de sa rupture, la reconnaissance d'une telle entité est conditionnée par la preuve d'éléments impératifs, dont un en particulier qu'est la volonté de s'associer. L'arrêt commenté ci-dessous en est une parfaite illustration, il a été rendu par la 1re chambre civile de la Cour de cassation le 20 janvier 2010. Les faits soumis à l'attention de ladite juridiction sont les suivants, au sein d'un couple de concubins, le 13 novembre 1990, l'un d'eux a acquis un terrain sur lequel les deux concubins ont fait construire une maison en souscrivant à un emprunt en tant que co-emprunteurs. Cependant, le concubin à l'origine de l'achat a ensuite vendu le bien en 1999, le litige en l'espèce étant la conséquence de cette vente.
[...] Ainsi, cette solution de la Cour de cassation vient protéger les intérêts d'un des concubins contre la reconnaissance d'une société créée de fait qui se traduirait par le partage de ses biens en deux. Elle vient donc renforcer la sécurité juridique à son égard, bien que cela puisse paraître injuste pour la concubine délaissée en l'espèce, mais qui a remboursé l'emprunt à hauteur de la moitié du prix. En fin de compte, tous les arrêts suscités, que ce soit ceux de la première chambre civile ou de la Chambre commerciale, ne semblent pas refuser strictement la reconnaissance d'une société créée de fait entre concubins, ils subordonnent seulement cette dernière à la preuve véritable de l'intention de s'associer. [...]
[...] La Cour de cassation devait donc répondre à la question suivante, l'intention de s'associer nécessaire à la reconnaissance de la société créée de fait peut-elle découler de la participation financière à la réalisation d'un projet immobilier commun entre concubins ? Pour répondre à la question la Cour de cassation casse et annule l'arrêt d'appel au visa de l'article 1832 du Code civil et au motif que l'intention de s'associer en vue d'une entreprise commune ne peut pas découler de la participation financière à la réalisation d'un projet immobilier. [...]
[...] Ainsi, en l'espèce, les concubins avaient mis en commun des intérêts financiers pour faire construire leur maison, la Cour de cassation indique que cette mise en commun est insusceptible de prouver l'intention de s'associer. De fait, en énonçant l'article 1832 du Code civil, la Cour de cassation se permet d'écarter le contrat de société du cadre familial alors que la Cour d'appel de Fort-de-France avait essayé de transposer ledit contrat à ce même cadre pour reconnaître la société créée de fait. [...]
[...] Il convient donc d'expliquer cela. Par l'intention de s'associer, la Cour de cassation entend toujours l'affectio societatis et conditionne toujours la reconnaissance de la société créée de fait à ce critère. La mise en commun d'intérêt correspond de son côté aux divers actes et responsabilités inhérents à la vie de couple, tels que payer les factures, entretenir le logis, toutes les dépenses de la vie quotidienne en quelque sorte ainsi que la volonté de fonder une famille en s'installant dans un logement familial. [...]
[...] Ce que l'on entend par là c'est tout simplement que la Cour de cassation a donné des hypothèses dans lesquelles elle refuserait dorénavant de reconnaître une société créée de fait entre ex-concubins. Cependant, ces hypothèses sont limitatives puisqu'elles ne se cloisonnent qu'à la mise en commun d'intérêts entre concubins et à la réalisation en commun d'un projet immobilier. C'est-à-dire qu'on pourrait penser qu'en dehors de ces hypothèses les concubins pourraient peut-être réussir à faire reconnaître une société créée de fait, toujours sous réserve de prouver individuellement chaque élément de validité du contrat de société. [...]
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