Cour de cassation première chambre civile 13 février 2013, identité de genre, état civil, changement de sexe, articles 8 et 9 de la CEDH, article 57 du Code civil, loi de modernisation de la justice du 18 novembre 2016, article 14 de la CEDH, transsexualisme, théorie du genre, commentaire d'arrêt
L'arrêt commenté est le fruit d'une jurisprudence établie dès 1992 suite à la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'Homme, mais qui a également connu des modifications plus récentes issues de la loi de modernisation de la justice du 18 novembre 2016. L'arrêt a été rendu par la première Chambre civile de la Cour de cassation en date du 13 février 2013. M.X a été déclaré à l'état civil comme étant de sexe masculin, et souhaite remplacer la mention de "sexe masculin" par celle de "sexe féminin". Le 13 juin 2007, il assigne le procureur de la République en rectification de son acte de naissance, requête rejetée par un jugement du tribunal de grande instance daté du 13 mars 2009.
M.X interjette appel et, face à l'arrêt confirmatif rendu par la Cour d'appel de Nancy en date du 3 janvier 2013, il décide de se pourvoir en cassation sur les moyens suivants : en exigeant la preuve d'un changement irréversible de sexe, et ce alors que le droit à la vie privée implique le droit d'obtenir la modification de son état civil de manière à ce qu'il reflète l'identité de genre choisie, la Cour d'appel a violé les articles 8 et 9 de la CEDH et 57 du Code civil ; en invoquant le principe d'indisponibilité de l'état des personnes et celui de la cohérence et de la sécurité des actes de l'état civil pour motiver son exigence d'un changement irréversible de sexe, et ce alors qu'aucun de ces principes n'exige un tel processus, la Cour d'appel a violé l'article 57 du Code civil.
[...] Dans son chapitre III, traitant des dispositions relatives à la procédure devant la Cour de cassation, la loi rajoute une section 2 bis au Code, concernant la modification de la mention du sexe à l'état civil, intégrant ainsi des articles 61-5 à 61-8. Ainsi, l'article 61-5 va venir consacrer la théorie du genre, puisqu'il précise que, pour motiver sa demande de changement de sexe à l'état civil, l'individu peut invoquer qu'il « se présente publiquement comme appartenant au sexe revendiqué » et qu'il « est (connu) sous le sexe revendiqué de son entourage familial, amical ou professionnel ». [...]
[...] Cette perceptive élargit l'admissibilité des modes de preuve de l'irréversibilité du changement de sexe. Ainsi, jusqu'en 2013, la jurisprudence a grandement évolué : d'abord interdit, le changement de sexe a l'état civil a été autorisé de manière strictement réglementée, avant que cette réglementation ne soit assouplie par la circulaire de 2010. Cette dernière circulaire va entrainer la mise en place chez les juges du fond de deux interprétations possibles dru critère d'irréversibilité, l'arrêt commenté s'inscrivant dans une interprétation plus stricte. [...]
[...] Le problème porté aux juges de la Cour de cassation portait donc sur le fait de savoir si, oui ou non, l'identité de genre pouvait-elle suffire pour motiver un changement du sexe à l'état civil. Pour les juges de cassation, la réponse est non : « Mais attendu que ( ) que la cour d'appel a rejeté sa demande ». Autrement dit, les juges de cassation considèrent que l'identité du genre, c'est-à-dire le sentiment qu'à M.X d'appartenir au genre féminin et le fait d'être perçu comme appartenant à ce genre par son entourage ne suffit pas à motiver un changement de sexe à l'état civil, et que ce changement est subordonné à l'existence d'un transsexualisme médicalement constaté, et à la preuve du suivi d'un traitement médico-chirurgical entrainant un changement de sexe biologique irréversible. [...]
[...] C'est pourquoi il parait pertinent de se voir en quoi, en 2013, l'arrêt opte pour une interprétation stricte des conditions de changement de sexe à l'état civil mais également que cette même approche est vouée à évoluer (II). Une interprétation stricte des conditions de changement de sexe à l'état civil Dans un contexte où le sujet du transsexualisme entraine de nombreux débats doctrinaux, l'arrêt de 2013 adopte une interprétation stricte des conditions de changement de sexe. Il s'inscrit en effet dans une évolution jurisprudentielle relativement récente en ce qu'il met en place un cadre strict au changement de sexe à l'état civil Un arrêt inscrit dans une évolution jurisprudentielle récente La question du changement de sexe à l'état civil, et plus particulièrement dans le cas de transsexualisme, a connu une évolution jurisprudentielle relativement récente. [...]
[...] Cependant, l'année 1992 va apporter de grands changements en la matière. En effet, le 25 mars 1992, la Cour européenne des droits de l'homme, dans l'arrêt B contre France, condamne la France pour violation de l'article 8 de la Convention sur le droit à la vie privée de chacun. En effet, la France, fidèlement à sa jurisprudence précédente, avait refusé le changement de sexe à l'état civil d'une transsexuelle, d'où la violation du droit à la vie privée consacré par l'article 8 de la Convention. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture