Cour de cassation, 1ère Chambre civile, arrêt du 28 mars 2000, nature du contrat de prêt, professionnel du crédit, prêt à la consommation, arrêt 20 juillet 1981 de la Cour de cassation, interprétation contra legem, article 1919 du Code civil, article 1921 du Code civil, contrat réel, commentaire d'arrêt
En application de la pensée de Descartes, le contrat se définit comme "un remède à l'inconstance des esprits faibles" et ce, dans la mesure où il n'est autre qu'un acte de prévision encadrant les relations futures des parties. L'efficience d'un tel acte de prévision est cependant subordonné à sa nature, cette dernière déterminant la naissance des obligations ainsi que l'éventuel recours à l'exécution forcée en cas de manquement à ces dernières. C'est ainsi sur une question précisément relative à la nature du contrat de prêt consenti par un professionnel du crédit que fut amenée à se prononcer la première chambre civile de la Cour de cassation en son arrêt du 28 mars 2000.
En effet M.X, s'est vu consentir un prêt par la société UFB Locabail, aux fins de financement d'un achat de matériel agricole auprès de la société Sanlaville, le versement du prêt ainsi défini étant cependant conditionné par la nécessaire souscription par M. X d'une assurance vie auprès de la société UAP collectives. Ce dernier fit ainsi parvenir le 31 mars 1992 à la société UFB locabail le dossier d'adhésion à la garantie emportant réalisation de la condition convenue. Cependant à la suite du décès accidentel de M. X survenu le 4 juin 1992, un litige survient quant à la qualité du matériel livré. Les héritiers de ce dernier initièrent ainsi un litige tendant à l'annulation du contrat de vente litigieux ainsi qu'à titre subsidiaire à contraindre la société UFB Locabail à verser la somme convenue au titre de contrat de prêt.
[...] La caution doctrinale à la disparition de la notion de contrat réel. De grands noms de la matière juridique tels que Ripert ou Huet considèrent en effet que la notion de contrat réel n'est autre « qu'une survivance inutile et désuète » du droit romain. Ces auteurs définissant les contrats actuellement considérés comme réels en tant que contrats consensuels synallagmatiques. Le principal argument en faveur d'un maintien d'une telle catégorie ne repose en effet que sur l'étendue de l'obligation de restitution en l'absence de remise matérielle initiale, ce à quoi la doctrine majoritaire rétorque que l'exception d'inexécution ou la résolution pour cause d'inexécution permettent d'obtenir un résultat semblable sans pour autant avoir recours à cette catégorie vacillante de contrat. [...]
[...] La motivation réelle de ce revirement jurisprudentiel cependant animé par une volonté de protection de la partie faible au contrat. L'expression d'une volonté sous-jacente de protection de l'emprunteur. La jurisprudence ainsi initiée par la haute juridiction est une illustration de son exigence lancinante tendant à rééquilibrer les contrats par nature empreints d'une forte inégalité de par la qualité de professionnelle de l'une des parties. En effet la protection que permet ce revirement jurisprudentiel s'incarne principalement au travers de l'admission de l'exécution forcée, le prêteur étant ainsi tenu du fait de son seul consentement, l'emprunteur voit sa situation sécurisée. [...]
[...] Ce cheminement jurisprudentiel fut parachevé, ou du moins accentué au moyen de l'arrêt présentement commenté affirmant explicitement la nature consensuelle et non plus réelle du contrat de prêt consenti par un professionnel du crédit. La simple lecture de l'article 1892 du Code civil laisse cependant présager du caractère outrancier d'une telle affirmation. L'audace discutable d'une interprétation contra legem. En effet, par sa jurisprudence la Cour de cassation admet que le contrat de prêt consenti par un professionnel du crédit est rendu parfait par le simple échange des consentements, la remise des fonds n'intervenant ainsi qu'au titre d'un premier acte d'exécution. [...]
[...] Maintenir une telle obligation en présence d'un professionnel peut sembler désuet, eu égard des règles d'informations et de publicités étant imposées aux établissements de crédit, règle permettant une prise de conscience effective de l'emprunteur sans pour autant avoir recours à la notion de contrat réel. De plus dans l'esprit d'un profane c'est bien la remise matérielle de la chose qui fait naître l'obligation de restitution et non pas le seul échange des consentements. Maintenir le caractère réel du contrat de prêt consenti par un non professionnel permet donc également d'accorder la règle de droit avec la conception populaire de l'obligation de restitution. Cependant du fait de son importance, cette solution sous-entend la question plus générale de la pérennité de la catégorie des contrats réels. [...]
[...] L'acception de cette solution est rendue d'autant plus complexe que cette dernière induit l'admission jusqu'alors refusée de l'exécution forcée en nature du contrat de prêt consenti par un professionnel du crédit. L'admission nouvelle de l'exécution forcée, un revirement jurisprudentiel fondé sur l'immixtion du consensualisme. Le recours à l'exécution forcée que permet la haute juridiction par ce revirement jurisprudentiel relatif à la nature du contrat de prêt ainsi détaillé semble être motivé par une volonté sous-jacente de sécuriser la situation juridique de l'emprunteur Une nature juridique nouvellement formulée permettant le recours à l'exécution forcée. [...]
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