La Cour de cassation, au visa des articles L. 113-2, L. 131-4 et L. 132-5 du code de la propriété intellectuelle, a cassé partiellement et sans renvoi un arrêt rendu, le 9 février 2005 par la Cour de Paris, en ce qu'il avait annulé une clause de rémunération forfaitaire dans les contrats conclus entre un éditeur et un auteur à propos d'un guide thématique, qui était qualifié d'oeuvre collective, parce que ce guide ne présentait aucune des caractéristiques et ne relevait d'aucune des catégories d'oeuvres à propos desquelles, par exception, les articles L. 131-4 et L. 132-6 CPI admettent la rémunération forfaitaire. La première Chambre civile casse partiellement cet arrêt au motif que les dispositions des articles L. 131-4 et L. 132-5 « qui prévoient le principe d'une rémunération proportionnelle de l'auteur en cas de cession de ses droits d'exploitation ne s'appliquent au collaborateur d'une oeuvre collective pour laquelle la personne physique ou morale qui en a pris l'initiative et qui l'édite, la publie ou la divulgue sous sa direction et son nom, est investie, dès l'origine, desdits droits ». L'arrêt a tous les traits d'un arrêt de principe. Il se fonde sur trois textes : l'un - l'article L. 113-2 donne la définition de l'oeuvre collective, que reprend l'attendu cité in fine ; les deux autres posent le principe de la rémunération proportionnelle - l'article L. 131-4 de façon générale ; l'article L. 132-5, plus particulièrement à propos du contrat d'édition. Pour la Cour de cassation, les articles L. 131-4 et L. 132-5 CPI ne s'appliquent donc pas « au collaborateur de l'oeuvre collective ».
[...] L'application du principe général, du moins dans les hypothèses où l'oeuvre collective ne recoupe pas un des cas d'exception où le forfait est autorisé, ce qui n'est tout de même pas rare, avait pourtant un triple mérite : affirmer l'attachement du droit français au principe de façon générale ; rééquilibrer quelque peu les rapports entre le contributeur à l'oeuvre collective et l'éditeur de celle-ci ; et contribuer à améliorer les pratiques des exploitants, de plus en plus enclins à imposer aux auteurs, grâce à la qualification d'oeuvre collective, des cessions de droits démesurées et rémunérées par des forfaits généralement déconnectés des utilisations illimitées qu'ils s'assurent, de surcroît, au moyen de contrats d'adhésion . La cassation nous paraît d'autant plus difficile à justifier qu'elle méconnaît doublement le principe d'interprétation stricte des exceptions : la qualification d'oeuvre collective a un caractère d'exception et la rémunération forfaitaire aussi, si bien qu'écarter le principe de rémunération proportionnelle sans texte l'autorisant explicitement ou même implicitement, se justifie d'autant moins s'agissant d'une catégorie, qui a elle-même un caractère d'exception, pour ne pas dire d'anomalie. Dommage. Bibliographie A qui appartient l'oeuvre d'art ? ; Françoise Chaudenson. Ed. [...]
[...] Pour la Cour de cassation, les articles L. 131-4 et L. 132-5 CPI ne s'appliquent donc pas au collaborateur de l'oeuvre collective Comment expliquer cette exclusion ? Une première explication serait que la première Chambre civile considère que le contrat passé entre un auteur et un exploitant pour sa contribution à la création d'une oeuvre collective ne ressortit pas aux contrats d'exploitation régis par le code de la propriété intellectuelle. Dès lors, les principes posés aux articles L. 131-2 et suivants, et notamment ceux qui posent le principe de rémunération proportionnelle seraient inapplicables. [...]
[...] 132- c'est-à-dire une rémunération en principe proportionnelle aux produits de l'exploitation. La situation, quoique obscurcie par le statut aberrant de l'oeuvre collective, est comparable à celle du contrat par lequel l'auteur consent à la création d'une oeuvre dérivée : là aussi, l'auteur de l'oeuvre composite sera légalement le seul titulaire des droits sur l'oeuvre composite (art. L. 113-4) mais cela n'empêche que le principe de rémunération proportionnelle s'applique au contrat. Nous avions rendu compte de l'arrêt rendu par la Cour de Paris, le 9 février 2005, en l'approuvant sur le point précis à propos duquel la première Chambre civile vient prononcer une cassation partielle, que nous ne pouvons que déplorer, tant elle nous paraît injustement défavorable aux auteurs et dépourvue de nécessité. [...]
[...] La rémunération que celui-ci verse aux contributeurs n'est pas la contrepartie d'une cession. Elle trouve tout simplement sa cause dans le contrat de commande et la liberté des parties à cet égard ne peut être entravée par des règles qui n'intéressent que les cessions de droits d'auteur Mais le raisonnement peut être discuté : certes, le contributeur n'aura pas de droit sur l'oeuvre collective mais il a des droits sur sa contribution et le contrat qu'il passe avec l'éditeur tend à transférer à celui-ci le droit d'intégrer sa contribution, qui est, en soi, une oeuvre (si elle est originale, bien sûr), dans l'oeuvre collective. [...]
[...] Une seconde explication, qui peut compléter la première, tient au visa de l'article L. 113-2 : ce serait à la qualification d'oeuvre collective que s'attacherait un régime totalement dérogatoire. MM. Lucas estiment que la raison tient, à vrai dire, moins dans le caractère accessoire des contributions que dans le fait que les participants ne sont pas réellement les coauteurs de l'oeuvre collective L'éditeur, investi ab initio des droits sur l'oeuvre collective, ne serait tenu, de ce fait d'aucune des règles posées aux articles L. [...]
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