L'arrêt Jand'heur, rendu par les chambres réunies de la Cour de cassation le 13 février 1930, a contribué à élaborer le principe général de responsabilité du fait des choses que l'on a sous sa garde. Dans cet arrêt, le 22 avril 1925, un camion automobile appartenant à la Société les Galeries belfortaises a renversé et blessé Lise Jand'heur, mineure.
Lise Jand'heur, représentée par ses parents, demande devant un tribunal de première instance réparation pour le préjudice matériel subi par Lise Jand'heur. Le jugement rendu ainsi que la partie qui interjette appel sont inconnus. La Cour d'appel rend un arrêt favorable à la Société les Galeries belfortaises, puisqu'elle écarte l'article 1384 alinéa 1er du Code civil, invoqué par la famille Jand'heur, pour se fonder sur l'article 1382 du Code civil. La famille Jand'heur se pourvoi en cassation.
Le problème qui s'est posé à la Cour de cassation est le suivant : quel régime de responsabilité est applicable en cas de dommage causé à autrui par une chose inanimée ?
[...] La jurisprudence est prolixe pour définir ce qu'elle considère comme évènement imprévisible (la personne n'avait aucun moyen de prévoir le cas de force majeure), irrésistible (la personne n'avait aucun moyen de contrer ce cas de force majeure, et extérieur aux parties (le cas de force majeure est indépendant de la volonté de celui qui est intervenu dans la réalisation du dommage. Le cas fortuit est assimilé au cas de force majeure. La cause étrangère est entendue de manière large par la jurisprudence, puisqu'elle englobe la force majeure, le fait d'un tiers et le fait de la victime. [...]
[...] La jurisprudence a refusé de distinguer les choses visées par l'article 1384 alinéa 1er, appliquant au cas d'espèce un régime de responsabilité du fait des choses que l'on a sous sa garde. Elle a ainsi pu consacrer une présomption de responsabilité de plein droit du gardien d'une chose ayant causé un dommage, ce dernier ne pouvant s'exonérer qu'en prouvant le cas de force majeure ou la cause étrangère qui ne lui est pas imputable. A défaut de distinguer les choses, la jurisprudence a déplacé le critère de distinction de la chose à la garde de la chose. [...]
[...] Il ne pourra s'exonérer que conformément aux causes prévues par le régime de responsabilité du fait des choses que l'on a sous sa garde. L'arrêt Jand'heur rejette le fondement de l'article 1384 alinéa 1er du Code civil, dont le moyen d'exonération est la preuve de l'absence de faute, pour se tourner vers le régime de responsabilité du fait des choses que l'on a sous sa garde, prévoyant des causes d'exonération propres L'acceptation d'exonérer l'auteur prouvant le cas de force majeure La présomption de responsabilité établie par l'article 1384 alinéa 1er du Code civil La Cour de cassation ne parle plus de présomption faute, puisqu'elle a rejeté le fondement de l'article 1382 du Code civil mais de présomption de responsabilité. [...]
[...] La solution des juges de la Cour de cassation semble donc être fondée davantage sur l'équité l'opportunité de pouvoir élaborer un régime général de responsabilité du fait des choses– que sur de réels arguments juridiques. La jurisprudence postérieure a confirmé cette position des juges des chambres réunies. La 2ème chambre civile de la Cour de cassation a rendu un arrêt le 20 novembre 1968, précisant que le principe de la responsabilité du fait des choses inanimées trouve son fondement dans la notion de garde, indépendamment du caractère intrinsèque de la chose et de toute faute personnelle du gardien. [...]
[...] La jurisprudence permet ainsi d'élargir le domaine d'application de l'article 1384 alinéa 1er aux choses, mais précise que la responsabilité est rattachée à la garde de la chose, notion qui doit donc être précisée par la jurisprudence. L'arrêt Jand'heur rejette toute distinction dans les choses visées par l'article 1384 alinéa 1er du Code civil au motif qu'il faut rattacher cet article à la garde de la chose et non à la chose elle-même. Elle a donc poussé la jurisprudence à définir la notion de garde de la chose, ainsi que les critères de distinctions permettant l'application ou la non-application du régime de responsabilité générale du fait des choses que l'on a sous sa garde La nécessaire élaboration jurisprudentielle de la notion de garde de la chose Le Code civil ne définissant pas la garde de la chose, mais l'arrêt Jand'heur y faisant référence, il est donc apparu nécessaire à la jurisprudence de définir cette notion. [...]
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