Les sans domicile fixe se retrouvent à nouveau au cœur de l'actualité en ce moment avec l'occupation de la rue de la Banque. Mais il y a quelques mois, ils furent également l'objet de toutes les attentions du fait de l'ébruitement d'une affaire de distribution de soupe au porc destinée aux plus démunis à Paris. Même si ces distributions effectuées par l'association Solidarité des Français duraient depuis déjà quatre années, celle-ci a davantage capté l'attention des médias et du public car elle a fait l'objet d'une interdiction par le préfet de Paris en raison de son caractère discriminatoire. Cette interdiction, après avoir été déclarée illégale par la Cour Administrative d'Appel de Paris, a été validée par le Conseil d'Etat dans son ordonnance du 5 janvier 2007.
Dans cette ordonnance, le Conseil d'Etat fait appel à de grandes notions : il considère que le choix du lard constitue une discrimination et que celle-ci représente une atteinte à la dignité de la personne humaine. Cette dernière constitue elle-même un risque de trouble à l'ordre public, ce qui justifie l'interdiction du préfet. Il n'y aurait donc pas d'atteinte excessive à la liberté de manifester de l'association.
Si le Conseil d'Etat s'appuie sur la jurisprudence pour faire le lien entre ces différentes notions, on peut néanmoins constater qu'il adopte ici des conceptions plutôt extensives, notamment concernant la discrimination et le trouble à l'ordre public. Ce sont ces interprétations généreuses qui permettent de justifier l'atteinte à une liberté fondamentale. On peut donc légitimement se demander si des considérations éthiques ou philosophiques n'ont pas joué un rôle aussi important que les arguments juridiques dans cette ordonnance du Conseil d'Etat.
Le caractère discriminatoire de cette distribution de soupe, et donc le fait qu'elle constitue une atteinte à la dignité humaine, est en effet discutable. De même, il n'est pas évident au premier abord que le risque de trouble à l'ordre public ait été assez important pour justifier la limitation du droit de manifester.
[...] La Cour administrative d'appel de Paris avait commis une erreur de droit en prenant en compte les manifestations antérieures pour apprécier le risque de trouble à l'ordre public (et surtout en affirmant qu'une atteinte à la dignité humaine ne constituait pas un risque). Dans les faits, il est vrai que la menace qui pesait sur l'ordre public n'était pas évidente a priori. En effet, l'arrêt Benjamin précise que cette menace doit être exceptionnellement grave qualificatif qui ne s'applique pas forcément au cas de la distribution de soupe au porc. [...]
[...] Dès le 6 février 2006, la HALDE (Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité), saisie par la députée européenne Catherine Trautmann, avait alerté sur les pratiques de cette association au travers d'une délibération. Elle avait dénoncé le fait que l'association se cache derrière une action caritative pour faire passer un message politique de nature discriminatoire. Dans cette délibération, la HALDE précise également que d'autres distributions de soupe au cochon avaient été interdites en 2006 par le préfet de la région Alsace et que le référé liberté devant le Tribunal administratif avait été rejeté. Elle en profite pour alerter le procureur de la République sur une discrimination qui lui paraît flagrante. [...]
[...] Une interrogation peut subsister après l'analyse sur l'importance des considérations éthiques dans cette ordonnance. Mais quoi qu'il en soit, les motifs juridiques restent suffisants pour la justifier, même si l'interprétation peut paraître large. La question qui peut se poser après cette ordonnance est celle de poursuites pénales, qui pourrait s'accompagner d'une dissolution administrative de l'association Solidarité des Français, bien que cela ne paraisse pas à l'ordre du jour. Bibliographie Ordonnance du Conseil d'Etat du 5 janvier 2007, Ministre de l'Intérieur Association solidarité des Français. [...]
[...] Pour eux, l'interdiction de distribution de nourriture aux sans-abri était incompréhensible et témoignait d'une régression des libertés publiques ainsi que d'une dictature du politiquement correct Ils vont jusqu'à voir dans cet antiracisme à outrance une lutte contre l'identité française. Dans une affaire similaire du 22 décembre 2006, le préfet avait été condamné pour avoir pris une décision identique mais cela en raison du caractère tardif de l'interdiction et non pour un quelconque aspect attentatoire à la liberté de rassemblement, d'expression et de réunion. Par contre, il existe une jurisprudence dans laquelle l'administration a été condamnée pour voie de fait dans des circonstances similaires. [...]
[...] Conseil d'Etat, Ministre de l'Interieur Association solidarite des Français janvier 2007 Les sans domicile fixe se retrouvent à nouveau au cœur de l'actualité en ce moment avec l'occupation de la rue de la Banque. Mais il y a quelques mois, ils furent également l'objet de toutes les attentions du fait de l'ébruitement d'une affaire de distribution de soupe au porc destinée aux plus démunis à Paris. Même si ces distributions effectuées par l'association Solidarité des Français duraient depuis déjà quatre années, celle-ci a davantage capté l'attention des médias et du public car elle a fait l'objet d'une interdiction par le préfet de Paris en raison de son caractère discriminatoire. [...]
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