L'expropriation par l'atteinte qu'elle porte au sacro-saint droit de propriété est une mesure teintée d'une certaine gravité. Dès sa naissance elle s'est donc retrouvée particulièrement encadrée par le législateur. Malgré cela elle a toujours conservé auprès du public une image négative et est à la source de nombreux contentieux.
C'est pourquoi avant de pouvoir prendre la déclaration d'utilité publique il existe toute une série de préalable ayant en partie pour but d'informer au mieux le citoyen.
L'information dispensée au public passe essentiellement par un élément incontournable le dossier d'expropriation.
C'est au juge à l'occasion d'un recours contre la déclaration d'utilité publique qu'il appartient d'en apprécier le contenu.
En l'espèce, le département du Gard et la Société d'économie mixte d'aménagement du Gard décide de la création d'une « zone touristique de détente et de loisirs » et pour ce faire ils ont recours à l'opération d'expropriation.
Pour poursuivre cette opération, l'arrêté du préfet du Gard en date du 18 mai 1971 vient prendre la déclaration d'utilité publique.
Les époux Ellia contestent la légalité de cet acte et décident de saisir les juridictions administratives.
Le tribunal administratif de Montpellier, par un arrêt en date du 13 octobre 1972 vient rejeter leur demande.
L'affaire se retrouve portée devant le Conseil d'Etat.
La question se trouvait ainsi posée au Conseil d'Etat de savoir si l'absence dans le dossier d'expropriation de pièces telles que le plan général des travaux, les caractéristiques principales des ouvrages les plus importants, et l'appréciation sommaire des dépenses constituée une violation des dispositions de l'article 1 du décret de juin 1959 entrainant ainsi l'irrégularité de la procédure.
Pour le Conseil d'Etat « les époux Ellia sont fondés à soutenir que le dossier soumis à l'enquête était irrégulièrement composé et à demander, par ce motif, l'annulation du jugement du tribunal admi¬nistratif de Montpellier, ainsi que celle de l'arrêté du préfet du Gard, en date du 18 mai 1971.
Afin d'étudier la réponse offerte par le Conseil d'Etat nous nous intéresserons dans un premier temps à l'évolution de la Jurisprudence jusqu'à cet arrêt (I), puis nous verrons qu'en l'espèce le Conseil d'Etat va venir retravailler sa position et entrainer une réadaptation des textes en vigueur. (II)
[...] C'est d'ailleurs dans cette voie que c'est engagé le tribunal administratif de Montpellier, venant par un arrêt en date du 13 octobre 1972 rejeter la demande des époux Ellia. Pour le Conseil d'Etat il suffisait semble t-il d'effectuer un simple contrôle de la composition du dossier sur la base de la jurisprudence Varennes-les-Mâcon Pourtant le Conseil d'Etat vient ici effectuer un repositionnement complet de sa Jurisprudence. Il va en l'espèce refuser la faculté à l'administration de distinguer deux phases dans son opération, en effet celle-ci n'est exceptionnellement ouverte à l'administration que dans le cas où le projet est d'une nature telle que le plan général des travaux et les caractéristiques principales des ouvrages ne peuvent pas être connus à la date de l'enquête Il s'agit ici de dégager une nouvelle conception et de l'appliquer à l'espèce. [...]
[...] Il s'agit parfois opérations d'aménagement bien plus importantes et complexes. Opération souvent qualifié de grande envergure qui exigent l'acquisition de terrains, puis des travaux d'aménagement et des constructions, le tout s'étalant sur une durée plus ou moins longue, parfois plusieurs années, si bien qu'il en résulte qu'il est difficile, voire impossible au moment du déclenchement de la procédure d'expropriation de chiffrer le montant des dépenses et d'en connaître toutes les précisions Il faut pourtant noter que pendant longtemps le Conseil d'Etat a montré bien peu d'égard face à cette difficulté, dans la pratique bien réelle. [...]
[...] (CE 19 Mars 1997, Eurodisneyland). [...]
[...] Le Conseil d'Etat utilisait ici une nouvelle position mais continuait de contourner les textes. Face à cette nouvelle situation il aura fallu un peu plus d'un an pour que le décret du 14 mai 1976 vienne reprendre la jurisprudence du Conseil d'État. Le décret autorise le recours au dossier simplifié pour la réalisation d'une opération d'aménagement ou d'urbanisme importante, lorsqu'il est nécessaire de procéder à l'acquisition des immeubles avant que le projet ait pu être établi Décret reprit par la suite par le code de l'expropriation dans son article R11-3. [...]
[...] Inspirée par ces considérations objectives la Jurisprudence du Conseil d'Etat à évoluée. Ainsi, par une interprétation toute prétorienne (et a l'encontre des dispositions du décret du 6 juin 1959 le Conseil d'Etat a t-il admis, pour certaines opérations qualifiées de complexes que l'administration puisse dissocier en deux phases l'acquisition de terrains et la construction des ouvrages et ne mettre dans le dossier soumis à l'enquête que les documents prévus au paragraphe 2. (CE 26 novembre 1965, Compagnie industrielle de textiles artificiels et synthétiques) Le Conseil d'Etat adoptait ici une nouvelle position mais même si l'évolution était nécessaire ne passait-il pas d'un extrême à l'autre ? [...]
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