La détermination du "prix" entraîne souvent le risque de se tromper et de nuire à la bonne exécution du contrat ainsi qu'à la sécurité des transactions et du commerce. Face à ces interrogations et ces préoccupations, la position des tribunaux a connu une évolution permanente notamment dans le secteur du contrat-cadre de distribution qui se définit comme « un contrat visant à définir les principales règles auxquelles seront soumis les accords à traiter rapidement dans le futur : « contrats d'application » ou « d'exécution », auxquels de simples bons de commande ou ordres de service fourniront leur support ». Il est apparu le cadre des brasseries, d'où le nom de « contrats de bière » initialement donné à ce type de conventions, et se rencontre aujourd'hui dans de multiples secteurs, allant de la concession automobile à la franchise par exemple. Jusque très récemment, la plupart des litiges liés à l'indétermination des prix des contrats-cadres était en réalité le moyen de se soustraire, pour la personne en difficulté, à ses obligations contractuelles. En effet, si le prix n'était pas déterminable pendant toute la durée du contrat, l'application de l'article 1129 du code civil permettait aux tribunaux d'en prononcer la nullité. C'est pour remédier à cette utilisation trop stratégique de notre droit que la jurisprudence a finalement changé sa position. C'est par ses quatre décisions du 1 décembre 1995 que l'Assemblée plénière modifie considérablement les règles. « L'article 1129 n'est pas applicable à la détermination du prix (...) la validité des contrats-cadres ne doit plus être contestée sur le fondement de l'indétermination du prix ». Dans sa quatrième espèce, celle qui nous intéresse plus particulièrement, un franchisé lié à son fournisseur par une clause d'approvisionnement exclusif au tarif en vigueur au jour des commandes, demandait la nullité du contrat de franchisage au motif que la détermination du prix des commandes à intervenir appartenait au franchiseur de manière unilatérale. La cour d'appel avait accueilli sa demande aux motifs que la détermination des prix est à la discrétion du franchiseur. La cour devait alors méditer sur la question suivante : la détermination du prix est-elle une condition de validité du contrat-cadre ? L'Assemblée plénière répond par la négative, casse l'arrêt en se fondant sur les articles 1134 et 1135 qui prescrivent la bonne foi et l'équité dans les contrats. Elle considère qu'une telle clause n'affecte pas la validité du contrat, seul l'abus dans la fixation du prix serait sanctionné par la résiliation ou l'indemnisation. Dans l'espèce du second arrêt nous intéressant, une personne a acheté une Ferrari mais qui fut livrée 3 ans après la commande, son fils en avait également commandé une, dont il reçu le prix trois ans après, mais se désista ; tous deux demandèrent le remboursement de leurs acomptes versés le jour de la commande en s'appuyant sur l'indéterminabilité de prix, leur permettant ainsi d'annuler les contrats litigieux. La cour d'appel a refusé d'annuler les contrats car la mention « prix en vigueur le jour de la livraison » permet de déterminer le prix dont l'acquéreur devra s'acquitter à la livraison. Les demandeurs au pourvoi réfutèrent cette thèse et estimèrent que le prix fut d'une part, fixé de manière discrétionnaire par le constructeur et, d'autre part indéterminé en violation de l'article 1591 du code civil. La question soulevée était celle du prix déterminable dans les ventes simples. Le prix à payer le jour de la livraison (soit trois ans plus tard) était-il déterminable le jour de la commande ? La cour de cassation, dans un arrêt rendu le 2 décembre 1997, rejette le pourvoi et déclare comme déterminable le prix « en vigueur le jour de la livraison » indépendamment de la volonté du vendeur.
L'étude de ces deux arrêts nous conduit à réfléchir. En effet, d'une manière générale, la nouvelle position jurisprudentielle de 95 sur l'indétermination du prix dans les contrats-cadre détient-elle des retombées sur les autres sortes de contrats ? La réponse semble nuancée, car bien que la portée de l'arrêt de l'Assemblée plénière semble limitée, la position de la cour de cassation reste à priori dans un état d'esprit similaire, c'est-à-dire supprimer les abus, protéger le faible (à priori celui qui subit) contre le fort (qui décide), même si les bases légales diffèrent. Il serait ingénieux d'étudier la possibilité par le fabricant, de manière unilatérale et ultérieure, de déterminer le prix (I), et la position du franchiseur ou, à l'échelle plus bas, le client d'en refuser la modification (II). Le plus faible, au regard de ces deux arrêts, ne semble pas être celui que l'on croit….
[...] Le juge doit se référer donc notamment aux clauses du contrat, à l'intérêt commun des deux partenaires, aux pratiques de la profession. Dans nos deux arrêts, le franchiseur et le constructeur augmentent leurs tarifs, la conséquence étant une répercussion sur les prix du franchisé et du concessionnaire. La jurisprudence préfère laisser une certaine liberté au constructeur ou franchiseur, qui sont à la tête de la chaine de distribution, et contrôler la fixation du prix au stade de l'exécution du contrat plutôt que lors de sa formation, comme elle a pu le faire de 1974 à 1995. [...]
[...] La logique même du dispositif nouveau impose de rechercher les critères du prix dans le contrat initial même. Désormais le prix est fixé unilatéralement par le vendeur-fournisseur ; lui seul dispose des informations relatives aux éléments constitutifs du prix de la marchandise ; mais il ne peut pas méconnaître les contraintes de l'acheteur. Celui-ci les a exprimées, au moins une fois, lors de la formation du contrat. Tenu d'exécuter le contrat conformément aux exigences de bonne foi (art al.3 c.civ.) et selon les prescriptions des usages professionnels, le vendeur doit fixer un prix du réapprovisionnement qui ne saurait s'éloigner des prévisions initiales, qui lui servent de socle. [...]
[...] Or, en cas de refus de la modification, la partie, s'estimant lésée, va contester la pratique devant les tribunaux afin de renoncer à ses obligations contractuelles. II/ Refus de la modification du prix Le refus, dans les deux arrêts étudiés, ne provient pas de la même personne. En effet, dans l'arrêt de 95, le contestataire est le franchisé, tandis que dans l'arrêt du 2 décembre 1997, il n'est autre que le dernier maillon de la chaine de distribution : le client (et non le concessionnaire). [...]
[...] C'est par ses quatre décisions du 1 décembre 1995 que l'Assemblée plénière modifie considérablement les règles. L'article 1129 n'est pas applicable à la détermination du prix ( . ) la validité des contrats-cadres ne doit plus être contestée sur le fondement de l'indétermination du prix Dans sa quatrième espèce, celle qui nous intéresse plus particulièrement, un franchisé lié à son fournisseur par une clause d'approvisionnement exclusif au tarif en vigueur au jour des commandes, demandait la nullité du contrat de franchisage au motif que la détermination du prix des commandes à intervenir appartenait au franchiseur de manière unilatérale. [...]
[...] La cour d'appel a refusé d'annuler les contrats car la mention prix en vigueur le jour de la livraison permet de déterminer le prix dont l'acquéreur devra s'acquitter à la livraison. Les demandeurs au pourvoi réfutèrent cette thèse et estimèrent que le prix fut d'une part, fixé de manière discrétionnaire par le constructeur et, d'autre part indéterminé en violation de l'article 1591 du code civil. La question soulevée était celle du prix déterminable dans les ventes simples. Le prix à payer le jour de la livraison (soit trois ans plus tard) était-il déterminable le jour de la commande ? [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture