Commentaire d'arrêt, Troisième Chambre civile, Cour de cassation, 23 septembre 2009, avant-contrats
Il est fréquent de rencontrer lors de ventes d'objet à forte valeur, un recours par les parties en présence à des contrats préparant leur vente. Il s'agit de véritables formes contractuelles de la négociation du contrat futur de vente dont la formation est envisagée. La formule employée est celle « d'avant contrat », néanmoins cette expression bien que renseignant sur le caractère préparateur -illustrant le moment de leur intervention- trompe le justiciable puisque semble conférer une valeur inférieure à celle d'un contrat classique. Et pourtant l'arrêt soumis à notre étude est une illustration topique de cette problématique, où le juge vient affirmer le caractère de contrats à part entière des pactes de préférence –destinés à préparer un autre contrat.
Par un acte notarié en date du 23 mai 2003, la commune de Saint-Pée-sur-Nivelle vend à Mme Y et M.X un lot d'une superficie de 999m2 dans un lotissement communal au prix de 42 685 €. Dans le contrat de vente, figure une clause spécifique prévoyant un droit de priorité de la commune vis-à-vis des tiers pendant vingt ans en cas de revente par les acquéreurs du terrain. Cette clause prévoit que le prix de revente du terrain nu ne peut pas excéder son prix d'achat initial, réactualisé en fonction de la variation de l'indice INSEE du coût de la construction. L'appel à un expert sera rendu obligatoire afin d'effectuer une majoration du prix proportionnellement aux coûts de construction.
[...] A fortiori, le juge a conclu en l'espèce à une admission d'une telle durée, car la jurisprudence précise que la stipulation d'un délai n'est pas une condition de validité du pacte de préférence (Civ. 1ère 6 juin 2001 et Civ. 3e 15 janvier 2003). Aucune précision n'est apportée, mais sans doute il convient classiquement de se référer au droit commun qui prohibe seulement les engagements perpétuels, soit des engagements dépourvus de délai de validité. Le droit français considère que l'engagement perpétuel est nul. Le fondement de cette position de principe est de défendre les libertés individuelles. [...]
[...] L'article 544 du Code civil confère aux propriétaires de bien un droit absolu sur le terrain, objet du litige, de sorte que les modalités du pacte de préférence institué unilatéralement par la commune en constituent un affront répréhensible. En défense, la commune soutient que la clause instituant son droit de priorité en cas de revente a été conventionnellement prévue par les parties, de sorte qu'il est impossible de se soustraire à son exécution. La loi n'institue aucune restriction quant aux modalités d'élaboration d'un pacte de préférence tant concernant la durée de validité que concernant le prix déterminable. [...]
[...] Le juge fait preuve d'une grande souplesse au regard de l'objectif même de l'opération contestée. La Cour de cassation admet donc que conventionnellement les parties choisissent une durée relativement longue, encore cette acceptation est justifiée par la nature synallagmatique de l'acte en présence. Certes, le pacte est favorable à la commune, mais elle a permis à un particulier d'accéder à moindre coût à la propriété, il s'agit en somme d'un échange de bons procédés La Cour de cassation consacre la validité des clauses antispéculatives de façon inédite. [...]
[...] De surcroît, si le tiers est de mauvaise foi, alors il pourra voir sa responsabilité extracontractuelle engagée, mais le bénéficiaire du pacte devra démontrer le triptyque classique à savoir un préjudice, un lien de causalité et une faute qui s'entend comme l'intention de nuire. Sur ce point, l'arrêt est muet, l'absence de considération et de précision sur le sort de l'acte de vente pose véritablement problème. La mise en suspend de l'acte authentique de vente : un procédé non juridique Une telle solution amène des insécurités sur le plan contractuel, sur ce point, elle reste donc contestable. [...]
[...] Cet objet de prévision des parties crée alors comme en l'espèce des zones d'ombre sur le contrat de vente à l'origine de l'action intentée. Un problème est ainsi résolu pour qu'un autre soit alors ouvert à moins de tirer des considérations relativement extrapolées de cet arrêt. [...]
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