« Les pratiques de l'un ne font pas la loi commune », cette affirmation fut émise au regard de cette affaire par le Professeur Jacques Mestre. C'est par ce semblant adage que pourrait se résumer la présente solution, voyons précisément de quoi il s'agissait.
En l'espèce, une société était propriétaire d'un ensemble immobilier dont elle donnait à bail les appartements. Dans le but de sécuriser ces immeubles, et après avoir avisé les locataires, la bailleresse fit installer des grilles avec des portes s'ouvrant par digicodes. Plusieurs preneurs de confession juive, ont fait connaitre à la bailleresse qu'ils ne pouvaient utiliser ce mode de fermeture pour des motifs religieux. En effet, les jours de Shabbat et de fêtes religieuses, il leur est interdit de mettre en œuvre toute forme d'énergie. Ainsi, les preneurs mécontents ont saisi le juge des référés aux fins de faire condamner la bailleresse à poser une serrure mécanique à l'entrée de la résidence et à leur remettre des clés pour y accéder.
[...] Ainsi, la religion avait fait naître une obligation spécifique à la charge de la bailleresse, non prévue à la conclusion du contrat. Il n'en est rien selon le juge de droit, en prenant pour visa l'article 6 a et c de la loi du 6 juillet 1989 relatif à l'obligation de délivrance et d'entretien du bailleur, il est affirmé qu'aucune obligation ne peut surgir au cours de l'exécution du contrat à la charge du bailleur pour un motif religieux. C'est une décision louable puisqu'il serait trop lourd pour la bailleresse de se voir imposer de nouvelles obligations en fonction de l'identité de son preneur : cela serait source d'une insécurité juridique pour la bailleresse de se voir imposer une obligation inattendu en raison de la confession religieuse du preneur qu'elle ne pouvait connaitre. [...]
[...] ) n'entrent pas dans le cadre du contrat de travail»). En outre, c'est une solution conforme à ce qu'exige la Cour européenne des droits de l'Homme, à savoir que n'importe quel acte ou comportement public motivé ou inspiré par une religion ou conviction n'est pas nécessairement une pratique protégée par l'article 9 de la CEDH (CEDH octobre 2001, Pichon France). En résumé, il faut retenir que l'idée de liberté fondamentale n'est pas compatible avec l'idée de mettre des obligations supplémentaires à la charge d'une partie. [...]
[...] En résumé, la Cour de cassation va permettre l'application de l'article 9 de la CEDH dans la relation contractuelle sous condition d'une stipulation expresse. Or en l'espèce, le contrat de bail ne prévoyait pas cette prise en compte des convictions religieuses des preneurs pour imposer à la bailleresse de s'adapter dans la modification périphériques des lieux, donc l'article 9 ne pouvait pas être directement invoqué au regard du principe de laïcité contractuel qu'impose la jurisprudence. Le statut d'exception de l'article 9 se justifie par le fait que l'intérêt général doit l'emporter sur les intérêts individuels, les avantages collectifs sur les inconvénients individuels. [...]
[...] En effet, en matière de contrat de bail, la Cour de cassation a par la suite admis l'application de la liberté d'association de l'article 11 (Civ juin 2003) ou encore du droit au respect de la vie privée de l'article 8-1 (Civ mars 2006). C'est la preuve d'un certain pragmatisme de la Cour, qui sait s'adapter aux besoins et libertés des individus. Au lieu d'appliquer strictement la logique civiliste qui peut parfois être désuètes au regard de situations nouvelles, elle va juger à la lumière des libertés fondamentales afin d'assurer une meilleure application de la CEDH en droit interne, et d'éviter par ailleurs les condamnations de la France par la Cour de Strasbourg. [...]
[...] En effet, les jours de shabbat et de fêtes religieuses, il leur est interdit de mettre en oeuvre toute forme d'énergie. Ainsi, les preneurs mécontents ont saisi le juge des référés aux fins de faire condamner la bailleresse à poser une serrure mécanique à l'entrée de la résidence et à leur remettre des clés pour y accéder. Les juges du fond ont accueilli cette demande en ordonnant à la bailleresse, sous astreinte, a effectuer les modifications invoquées. Ils retiennent qu'au regard de la liberté de culte garantie par la Constitution et des textes supranationaux, le fait pour la bailleresse de refuser l'installation et les modifications demandées par les résidents requérants, leur causait un trouble manifestement illicite, et que les conventions devaient être exécutées de bonne foi, la pose d'un serrure supplémentaire et la confection de clés n'altérant pas l'équilibre du contrat. [...]
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