Selon les dires du philosophe Alfred Fouillé, qui dit contractuel dit juste, mais le droit des contrats penche davantage vers le principe de liberté contractuelle. Ce subtil équilibre, entre justice et liberté contractuelle, est sujet à discussion, et ce problème est au coeur de l'arrêt qu'il nous faut étudier.
Le 15 décembre 2010, la Troisième Chambre civile de la Cour de cassation a rendu un arrêt de cassation partielle relatif à une vente immobilière.
En l'espèce, le litige opposait un emprunteur et des époux prêteurs, ceux-ci lui accordant successivement deux prêts pour un montant total de dix millions de francs, et ayant pour garantis une hypothèque sur une parcelle de l'emprunteur. Simultanément, l'emprunteur a souscrit par une promesse unilatérale de vente de sa parcelle et des constructions l'occupant au profit des prêteurs en compensation des prêts qu'il devait rembourser, ceux-ci ont levé l'option. Par la suite, l'emprunteur a reconnu être débiteur d'une somme de quatre millions de francs envers ses prêteurs et a conclu avec un acte de rétrocession prévoyant la revente à son profit du bien promis à la vent, moyennant un prix de quatorze millions de francs. Postérieurement, le prêt n'ayant pas été remboursé dans les délais prévus, la vente de la parcelle a été réitérée aux prêteurs, l'emprunteur-vendeur a donc agi en nullité de la vente, et les prêteurs ont agi reconventionnellement en nullité de l'acte de rétrocession, demandant aussi le remboursement des sommes dues et le paiement de dommages et intérêts.
[...] Plus généralement, le juge s'était demandé s'il était possible d'appliquer le régime de l'article 1676 du Code civil en cas de vileté du prix ? Cette situation d'hésitation entre deux régimes fut déjà traitée en jurisprudence, mais la réponse du juge de droit n'a peut-être jamais été aussi claire et précise. Ici le juge confirme la réelle distinction entre la nullité pour prix dérisoire et pour prix lésionnaire cependant cette distinction n'est pas anodine, en raison du régime et des effets de l'action distinguée, le juge marque une volonté d'assouplissement au regard des demandes de nullité dans un contrat de vente (II). [...]
[...] Le juge, en différenciant nettement les deux régimes, éprouve une volonté d'assouplir l'action en nullité au sein d'un contrat de vente. II - Une volonté d'assouplissement par la différenciation des régimes de l'action en nullité L'arrêt étudié présente la volonté d'assouplir la nullité du contrat de vente en conséquence de l'aisance de mise en place de la nullité pour vileté du prix, quant à sa prescription et sa nullité Ainsi, différence faite de la rescision pour lésion, il semble se profiler une autonomie de l'action en vileté du prix A - La mise en place plus aisée de l'action en nullité pour vileté du prix : prescription de droit commun et nullité absolue En l'espèce, les juges du fond soumettaient à l'action du demandeur au bref délai de 2 années imposé par l'article 1676 du Code civil, ce délai est volontairement court pour sécuriser les cocontractants, même en cas de lésion. [...]
[...] Ainsi, de part son régime et ses effets, l'action en vileté du prix semble devenir autonome. B - Vers l'autonomie de l'action en vileté du prix C'est dans un article publié, qu'un praticien en la matière («Vente immobilière : Vileté du prix ou rescision pour lésion», Me Neu-Janocki) indique qu'un «pas supplémentaire est donc franchi vers l'autonomie de l'action en vileté du prix». Cette autonomie se justifie en plusieurs points faisant guise de synthèse. D'abord au sujet de la cause, cette action vient contrer un vice sur les éléments constitutifs du contrat tandis que la lésion est un simple déséquilibre. [...]
[...] Simultanément, l'emprunteur a souscrit par une promesse unilatérale de vente de sa parcelle et des constructions l'occupant au profit des prêteurs en compensation des prêts qu'il devait rembourser, ceux-ci ont levé l'option. Par la suite, l'emprunteur a reconnu être débiteur d'une somme de quatre millions de francs envers ses prêteurs et a conclu avec un acte de rétrocession prévoyant la revente à son profit du bien promis à la vent, moyennant un prix de quatorze millions de francs. Postérieurement, le prêt n'ayant pas été remboursé dans les délais prévus, la vente de la parcelle a été réitérée aux prêteurs, l'emprunteur-vendeur a donc agi en nullité de la vente, et les prêteurs ont agi reconventionnellement en nullité de l'acte de rétrocession, demandant aussi le remboursement des sommes dues et le paiement de dommages et intérêts. [...]
[...] Enfin, relativement aux effets, cette action entrainera automatiquement la résolution du contrat de vente, tandis que la rescision pour lésion entrainera soit le rachat de la lésion par l'acheteur soit l'annulation de la vente. Ainsi, en matière d'annulation du contrat de vente, on constate une évolution trouvant sa genèse dans l'unité de l'action en nullité pour aboutir aujourd'hui en une dualité de l'action en nullité, et notamment dans l'autonomie totale de l'action en nullité pour vileté du prix. Cette autonomie est donc justifiée et vient sécuriser l'acheteur d'un bien quelconque (meuble ou immeuble) dans le cadre du contrat de vente. [...]
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