En l'espèce, la Compagnie écossaise est titulaire d'un bail commercial que lui consent la société CRAMA. Le contrat comporte une clause selon laquelle "les lieux ci-dessus désignés sont loués à usage exclusif de commerce ayant un rapport avec la vente : vente de produits d'habillement, accessoires, produits alimentaires, art décoratif, librairie, salon de thé, petite restauration, le preneur s'y interdit d'exercer toute activité ayant un rapport quelconque avec les assurances et la restauration et de toute activité pouvant faire concurrence aux commerçants en place dans notre immeuble." La société CRAMA consent un autre bail à Mr Z, qui, lui-même, cède son bail à Mr Y afin qu'il y exerce une activité de glacier. L'acte de cession de bail comprenait la même clause que celle existant dans le contrat entre la société CRAMA et la Compagnie écossaise. Or, Mr Y a ouvert une activité de glacier ainsi que toute activité s'y rapportant, sur place ou à emporter, tels que la vente de boisson ou la restauration rapide.
[...] Certes, cette ouverture de l'opposabilité du contrat est faite au nom des tiers intéressés et cela se comprend tout à fait dans l'arrêt de la 3e Chambre civile du 13 juillet 2010, puisque l'inexécution en question qui est invoquée vise précisément à protéger des tiers au contrat. Si cette clause n'était pas opposable par les commerçants de cet immeuble qui sont des tiers étrangers au contrat, cette clause ne pourrait être totalement effective. Cependant, en permettant au tiers d'engager la responsabilité du cocontractant défaillant, cela porte atteinte au principe relatif. Il est vrai que cela accorde une protection plus grande au tiers par rapport au cocontractant. [...]
[...] Selon Jourdain, cette solution créée un déséquilibre entre les tiers et le débiteur; le tiers peut être avantagé par l'invocation du contrat et que le débiteur quant à lui, ne peut opposer au tiers les stipulations qui le favoriseraient. [...]
[...] Le tiers, en invoquant un préjudice créée par l'inexécution du contrat, peut engager la responsabilité délictuelle du cocontractant défaillant en invoquant une faute contractuelle. Cependant, le tiers ne peut, en aucun cas agir sur le terrain contractuel. Effectivement, c'est le principe de l'effet relatif des contrats qui interdit au tiers, qui a subit un dommage, de se fonder sur la responsabilité contractuelle pour obtenir réparation de son préjudice. Ce principe établit en effet que seules les parties au contrat sont tenues par celui-ci. [...]
[...] Ainsi, la 3e Chambre civile de la Cour de cassation admet que le non-respect de la clause de non concurrence entraine un dommage pour le tiers. C'est bien au juge qu'il appartient d'apprécier la faute contractuelle et l'on observe ici que la Chambre assimile dans cet arrêt la faute contractuelle et la faute délictuelle. La 3e Chambre civile permet en effet au tiers étranger au contrat, sous couvert d'une faute délictuelle qui est inexistante, de se prévaloir d'une faute contractuelle, afin de respecter l'effet relatif des contrats. [...]
[...] En effet, la Chambre des requêtes de la Cour de cassation l'admet dès 1898 dans son arrêt du 23 février. L'Assemblée plénière de la Cour de cassation, par arrêt du 6 octobre 2006, avait également déjà considéré qu'un tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage. La caractérisation d'une faute contractuelle suffit donc à engager la responsabilité délictuelle du cocontractant défaillant quand cette dernière a causé un préjudice à un tiers au contrat. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture