Commentaire d'arrêt, Première Chambre civile, Cour de cassation, 5 mars 2015, réparation des conséquences des risques sanitaires
L'évolution constante des données acquises par la science en matière de santé justifie une protection particulière des personnes, notamment en ce qui concerne la réparation des conséquences des risques sanitaires. L'arrêt à commenter illustre cette nécessité.
Suite à la découverte d'une malformation dans le lobe du cerveau siège de la vision, Mme X a été traitée au sein de la Fondation ophtalmologique A. de Rothschild. Une chirurgie ablatrice s'est révélée nécessaire et a été pratiquée le 23 septembre 1998 par M. Y, chirurgien salarié de la fondation. Une grave dégradation de l'acuité visuelle de Mme X se déclarait dans les suites immédiates de l'intervention, laquelle assignait alors (demanderesse) la Fondation (défenderesse) en réparation de ses préjudices corporels.
Le 13 décembre 2013, les juges de la Cour d'appel de Paris rejetaient la demande de la requérante au motif que l'indication opératoire était justifiée et qu'aucune faute ne pouvait être reprochée au médecin ni dans le geste ni dans la technique qui était la seule possible. La demanderesse formait alors un pourvoi selon le moyen qu'elle n'avait pas pu donner un consentement éclairé en raison de la mauvaise exécution de son obligation de soins par le médecin. La question qui se posait alors aux magistrats de la Haute Cour était donc de savoir si l'obligation du médecin comprenait le devoir de celui-ci de se renseigner avec précision sur l'état de santé du patient.
[...] Le consentement est l'expression d'une volonté qui sait à quoi s'attendre, qui sait à quoi elle s'expose. C'est en cela que le consentement doit être préalable à tout acte médical, et c'est en cela qu'il doit résulter d'une information complète de la part du médecin. L'obligation de soins consiste donc en l'explication au patient de tout ce qu'il encourt, afin qu'il puisse prendre sa décision en connaissance de cause, sauf urgence médicale. La teneur de l'obligation de soins ayant été précisée, il faut s'intéresser à sa sanction. II. [...]
[...] Ce caractère contractuel découle du visa de l'article 1147 du Code civil, qui vient sanctionner l'inexécution de l'obligation par des dommages et intérêts. L'arrêt Mercier avait en effet fondé la responsabilité contractuelle à raison de la violation de l'obligation contractuelle née du rapport entre le patient et son médecin dans un arrêt de la chambre civile rendu le 20 mai 1936. En relevant que les juges du fond n'ont pas tenu compte du manquement du médecin à son devoir de se renseigner avec précision sur l'état de santé du patient, c'est-à-dire à son obligation de soins, de nature contractuelle, la Cour de cassation justifie la sanction des dommages et intérêts, la sanction d'une responsabilité contractuelle. [...]
[...] Les juges de la Première Chambre civile répondaient par l'affirmative dans leur arrêt du 5 mars 2015 et cassaient la décision rendue au fond. Au visa de l'article 1147 du Code civil, ils retenaient en effet que le devoir de se renseigner avec précision sur l'état de santé du patient était bien une composante de l'obligation de soins du médecin, et que la Cour d'appel avait violé la disposition relative à l'inexécution des obligations en ne tirant pas les conséquences de ce que le chirurgien avait fait un mauvais diagnostic. [...]
[...] C'est en cela que la Cour de cassation relève la violation par les juges du fond de l'article 1147 du Code civil, dans la mesure où ils avaient rejeté la demande indemnitaire de la patiente au motif qu'aucune faute ne pouvait être reprochée au médecin. L'indifférence à la faute résulte des règles d'application de la loi dans le temps. Ceci dit, on peut supposer que si les faits avaient été commis postérieurement à la loi du 4 mars 2002, la faute du médecin aurait été caractérisée : l'obligation d'information du médecin devant être prouvée par celui-ci, par tous moyens, et ce devoir ayant été clairement négligé en l'espèce, il n'aurait vraisemblablement pas pu prouver l'accomplissement de son obligation et aurait vu sa responsabilité certes sur un autre fondement engagée. [...]
[...] Le consentement éclairé du patient L'article 16-3 du Code civil pose le principe de l'interdiction des atteintes à l'intégrité du corps humain sauf en cas de nécessité médicale. Il instaure dans un second alinéa la nécessité du consentement préalable de l'intéressé. Ce consentement s'inscrit plus largement dans l'obligation d'information posée par l'article L.1111-2 du code de la santé publique, en vertu duquel toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé Cette disposition précise ensuite en quoi consiste cette information, et qu'elle incombe à tout professionnel de santé. [...]
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