Commentaire d'arrêt, arrêt de rejet, Première Chambre civile, Cour de cassation, 3 mars 2010, logement de la famille
D'après Le Corbusier, « Le logis c'est le temple de la famille » ; il s'agit d'une citation pertinente en droit patrimonial de la famille, car elle illustre la place que possède le logement de la famille dans celui-ci. En effet, ce logement serait alors un temple pour la famille, un lieu de prospérité de celle-ci, et par conséquent, un lieu nécessitant une protection particulière vis-à-vis de tout autre immeuble qui n'accueillerait alors aucune famille.
Cette conception que le logement peut être au centre de la famille est présente également chez le Doyen Carbonnier, qui de façon métaphorique, considère que celui-ci est un « nid » qu'il faut protéger.
Cette protection du logement de la famille s'effectue notamment par l'article 215 alinéa 3 du Code civil. Cependant, la jurisprudence, a elle aussi, pu poser des règles venant préciser cette protection. Elle s'est notamment interrogée sur les conditions d'exercices de l'action en nullité relative contre un acte de disposition effectué sur ce logement familial.
C'est en l'espèce le cas dans un arrêt de rejet du 3 mars 2010 de la Cour de cassation, réunie en sa Première Chambre civile.
En l'occurrence, deux époux se sont mariés le 4 novembre 1989 sous le régime de la séparation de biens. L'époux s'est porté caution solidaire, par acte du 12 décembre 1991, auprès d'une SCI pour l'acquisition d'un immeuble au moyen d'un prêt. A titre de garantie, ce dernier a consenti à une hypothèque conventionnelle sur un immeuble situé à Champforgeuil qui constitue le logement familial. Par acte du 20 juin 1994, l'époux a donné à son fils la nue-propriété de cet immeuble.
[...] Elle revendique ici qu'elle possède un intérêt légitime à agir et se prévaut de l'article 31 du Code de procédure civile selon lequel l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime Or dans le raisonnement de la requérante, elle a un intérêt légitime puisqu'elle n'a pas donné son consentement à l'acte hypothécaire qu'a passé son époux sur leur logement familial et qu'elle a de ce fait, droit à en demander la nullité. Cependant, ici les juges de la Cour d'appel, ainsi que ceux de la Cour de cassation n'ont pas reconnu l'intérêt à agir de celle-ci par le seul fait énoncé ci-dessus au motif qu'elle ne résidait plus dans le logement de la famille à la date d'introduction de sa demande. La résidence dans le logement de la famille est-elle primordiale pour la demande de l'action en nullité ? Est-ce une condition essentielle au jour de l'assignation en justice ? II. [...]
[...] La jurisprudence va faire apparaître une condition supplémentaire pour l'exercice de l'action en nullité de plus, nous verrons la portée de cet arrêt innovant La nécessité d'un intérêt actuel au jour de l'assignation en justice : la résidence dans le logement familial. La Cour de cassation va venir déclarer irrecevable le pourvoi au motif que l'épouse n'avait plus d'intérêt à agir en nullité de l'acte d'affectation hypothécaire En effet, la Cour de cassation va venir préciser qu'ici l'époux doit justifier d'un intérêt actuel à demander l'annulation de l'acte, ce qui n'a pas été reconnu pour l'épouse en question. [...]
[...] L'épouse revendiquait la nullité de l'effet hypothécaire sur le fondement de l'article 215 du Code civil, en faisant valoir qu'il s'agissait du logement de la famille, et que par ce fait, l'hypothèque ne pouvait être donnée sans son consentement. Sa demande a été, à priori, rejetée, et elle a par la suite interjeté l'appel sur le même fondement. La cour d'appel de Dijon a par l'arrêt du 31 janvier 2008 déclaré sa demande irrecevable. L'épouse a alors formé un pourvoi en cassation. [...]
[...] En cela on peut y voir une certaine protection par cette exigence d'intérêt actuel, il s'agit là d'un revirement de jurisprudence. En l'occurrence dans un arrêt du 16 juin 2000, une épouse ayant quitté le logement familial avait exercé une action en nullité sur le bail passé par son mari sur l'immeuble inoccupé qui constituait le logement familial. La Cour de cassation avait accueilli sa demande et annulé le bail. Cet arrêt, complète d'une certaine manière l'article 215 alinéa 3 du Code civil, cependant, ici le législateur n'avait pas posé cette condition là où la jurisprudence y tranche sévèrement. [...]
[...] Cependant, la Cour de cassation va trancher que si l'époux n'a pas d'intérêt actuel à demander l'annulation de l'acte, l'action ne serait pas possible. La Cour de cassation relève qu'à la date de l'assignation de la requérante en date du 14 septembre, celle-ci ne vivait plus dans l'immeuble litigieux qu'elle avait quitté depuis le 21 juin 1997 au cours de l'instance de divorce, soit plus d'un an avant son assignation. Ici, on pourrait reprendre l'adage pas d'intérêt pas d'action ; en l'espèce, l'épouse n'habitait plus dans le logement familial lors de son assignation en justice, elle ne présentait alors plus d'intérêt actuel à demander l'annulation de l'acte hypothécaire, sa demande est alors irrecevable, même celle-ci a été introduite dans les délais. [...]
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