Ce document est un arrêt de rejet rendu le 7 juin 2012 par la Première Chambre civile de la Cour de cassation relatif à la demande de changement de sexe d'un transsexuel sur son État civil.
En l'espèce, une personne de sexe féminin a, depuis son enfance, le sentiment d'appartenir au sexe masculin et adopte un comportement en conséquence. C'est pourquoi émet le souhait de changer de sexe à l'aide d'une équipe médicalisée spécialisée. Elle saisit alors la justice pour que son changement de sexe soit consacré dans son acte de naissance.
Après un jugement de première instance, la demanderesse interjette appel devant la Cour d'appel de Montpellier qui a rejeté sa demande de rectification de sexe dans son acte de naissance dans son arrêt du 27 septembre 2010. L'appelante se pourvoit en cassation aux motifs développés dans un moyen divisé en quatre branches. En premier lieu, la demanderesse au pourvoi attaque les juges montpelliérains pour violation de l'article 455 du Code de procédure civile du fait qu'ils ont fondé leur décision sur une jurisprudence dont les faits n'étaient pas « analogues » à ceux de l'affaire. De plus, la personne accuse les juges du fond d'avoir violé l'article 1134 du Code civil en interprétant le certificat médical de telle sorte que selon eux, il n'apportait pas la preuve du changement de sexe irréversible. En outre, le demandeur au pourvoi accuse les juges pour violation des articles 10, 144, 146, 147 et 263 du Code de procédure civile.
[...] Pour autant, dans cet arrêt du 7 juin 2012, les juges veulent avoir la certitude qu'il y a bel et bien eu un changement irréversible de sexe. Cette question des critères d'acceptation du changement de sexe fait l'objet d'un débat passionné entre praticiens et magistrats et s'est traduite par une jurisprudence qui s'est enrichie au fil des années. B L'écho à une jurisprudence déjà fournie sur le transsexualisme Dès 1804 le législateur s'est interrogé sur la question du statut du transsexuel et au fil du temps, faute de loi consacrant à ces personnes un statut fixe, les juges ont laissé libre cours à leur interprétation du droit à travers des arrêts qui tendent à consacrer peu à peu un statut aux transsexuels. [...]
[...] Ces conditions, au nombre de trois, sont énumérées dans un arrêt rendu par la cour de cassation le 22 juin 2000. En premier lieu, il ne faut pas que la modification de sexe résulte d'une démarche volontaire qu'elle est un aboutissement juridique légalement et médicalement constaté de plus il faut qu'il y ait eu une impossibilité de donner à la personne un sexe anatomique conforme à son sexe juridique déclaré à la naissance et enfin il faut que le sexe d'élevage soit conforme à celui de l'Etat civil. [...]
[...] De fait, selon les juges de cassation, la Cour n'a pas dénaturé les documents médicaux et que par ailleurs, la mastectomie totale avec la greffe des aréoles et le traitement hormonal ne prouvait pas valider le changement de sexe irréversible. Ce faisant, la Cour de cassation rejette le pourvoi et condamne la demanderesse aux dépens. I L'évolution des conditions de changement d'Etat civil du transsexuel A la complexité juridique du statut du transsexuel Le transsexualisme est considéré comme une maladie depuis les travaux de l'endocrinologue et sexologue Harry Benjamin en 1953, à qui les juges font référence à la fin de l'arrêt. [...]
[...] Or dans cette affaire, les juges ont fait des certificats médicaux livrés par le demandeur au pourvoi bien qu'ils prouvaient que le changement de sexe était irréversible. Dans ce cas, il n'y avait pas à demander une expertise judiciaire du fait qu'il n'y avait pas de doute sérieux sur la réalité du transsexualisme Enfin, dans la dernière branche du moyen au pourvoi la personne accuse les juges du fond d'avoir violé les articles 9 et 16-1 du Code civil et l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, car selon elle, la demande d'une expertise judiciaire viole le respect de sa vie privée du fait de la preuve apportée par le médecin justifié du changement de sexe irréversible ajouté à l'adoption d'un mode de vie et d'une apparence conforme au changement de sexe. [...]
[...] B La nécessaire intervention du législateur Cet arrêt est le symbole de la difficulté qu'a la justice à donner un statut clair aux transsexuels se satisfaisant tantôt de l'attestation d'un traitement hormonal ou exigeant tantôt une expertise approfondie pour établir de façon certaine que le changement de sexe est irréversible. En passant outre, les notions juridiques, il faut s'intéresser aux personnes en tant que telles, il est nécessaire de leur conférer des droits stables, pour leurs permettre de trouver leur place dans une société les mettant déjà à la marge. En effet, comme l'a montré la Cour européenne des droits de l'homme, la France n'épargne pas cette population pour qui le changement d'Etat civil n'est pas un choix, mais une nécessité, la fin d'un processus de soin d'une maladie. [...]
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