Face à l'inexécution de sa part du contrat et dans l'optique de se prévenir du versement de dommages-intérêts dans le cadre de la responsabilité contractuelle, le débiteur peut invoquer le cas de force majeure. Encore faut-il toutefois que les circonstances se prêtent à une telle invocation.
En l'espèce, un passager d'un train est mortellement blessé de plusieurs coups portés à l'arme blanche par un autre passager, ce dernier étant dépourvu de titre de transport et ayant agi sans raison.
L'ayant droit de la victime assigne l'agresseur et le transporteur en réparation de son préjudice moral.
La Cour d'appel de Grenoble, dans un arrêt du 5 janvier 2010, rejette la demande à l'encontre du transporteur, suite à quoi, l'ayant droit se pourvoit en cassation.
Le demandeur fait grief à l'arrêt d'avoir violé l'article 1148 du Code civil en invoquant le cas de force majeure. Selon lui, d'une part les agressions dans un train sont prévisibles et, d'autre part, l'irrésistibilité ne peut être invoqués faute pour le transporteur d'avoir pris des mesures de précaution.
[...] En revanche, l'irrésistibilité est justifiée par le caractère irrationnel de l'agression Celle-ci n'aurait pu être empêché par quelques mesures de la part du transporteur, faute pour ce dernier de pouvoir expulser les voyageurs dépourvus de titre de transport après un contrôle à bord ou que ce se soit par la présence permanente d'un contrôleur dans la voiture. Traditionnellement, il s'avère qu'il existe un troisième élément caractérisant le cas de force majeure à savoir l'extériorité. Cependant, dans cet arrêt, la Cour n'en fait nullement mention. De plus, pour rester sur le thème de l'originalité, la Cour exonère le transporteur de sa responsabilité ce qui est assez rare pour être souligné. Ces deux faits rendent la décision de la première chambre civile concernant l'application du cas de force majeure pour le moins remarquable. [...]
[...] Autre fait remarquable concernant la décision de la première chambre, la non-mention de l'extériorité de l'agression. La non-mention de l'extériorité de l'agression L'extériorité est considérée par la jurisprudence, au regard de l'article 1148, comme le troisième élément constitutif de la force majeure. Elle se définit comme un évènement devant être extérieur au débiteur c'est-à-dire sans lien. Il n'y a donc pas de force majeure lorsque le toit d'un poulailler s'effondre sur des pintadeaux, sous le poids de la neige (Cass., 1ère civ juillet 1988). [...]
[...] En répondant par l'affirmative dans un arrêt du 23 juin 2011, la première chambre civile rejette le pourvoi au visa de l'article 1148 susnommé. Selon elle, l'agression représente un cas de force majeure étant donné son caractère imprévisible et irrésistible : l'agression est irrationnelle, et ni le contrôle à bord du train des titres de transport ni la présence permanente d'un contrôleur dans la voiture n'auraient pu l'empêcher. Par cette décision, on constate non seulement l'établissement d'un cas de force majeure mais également une application remarquable de ce cas de force majeure (II). [...]
[...] Faut-il voir une certaine versatilité, voire un esprit de contradiction, chez la première chambre ou bien une décision opportuniste ? La réponse peut se trouver dans la deuxième proposition. La victimophilie s'étant emparée, en plus de la société en général, de la Cour de cassation, celles- ci se refusent à laisser une victime non indemnisée quand bien même le préjudice résulterait d'un cas de force majeure. Condamner la SNCF permet par ailleurs de résoudre le problème de la solvabilité ; l'agresseur ne l'étant pas toujours. [...]
[...] Dans cet arrêt, la Cour de cassation établit l'existence de la force majeure en retenant deux éléments cumulatifs, à savoir l'imprévisibilité et l'irrésistibilité de l'agression. L'imprévisibilité et l'irrésistibilité de l'agression La Cour décide, en l'occurrence, de retenir la force majeure et donc, d'exonérer le transporteur de l'obligation de sécurité à laquelle il était tenu. Afin de caractériser cette force majeure non définie par la loi, la première chambre énonce que l'agression présentait pour la SNCF un caractère imprévisible et irrésistible A noter que cette qualification s'opère in concreto. [...]
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